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manoir de tyneford

  • Le Manoir de Tyneford

    Le Manoir de Tyneford

    de

    Natasha Solomons

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    "Quand je ferme les yeux, je vois Tyneford House. Allongée sur mon lit dans le noir, je vois sa façade de pierre calcaire baignant dans la lumière dorée d'une fin d'après-midi."

    Vienne, printemps 1938: Elise Landau, jeune femme issue de la bourgeoisie artistique (son père Julian est un écrivain célèbre, sa mère Anna une chanteuse d'opéra reconnue) se voit contrainte de trouver un emploi en Angleterre afin d'échapper aux persécutions contre les Juifs. Elle passe une annonce et très vite, reçoit une réponse positive de la gouvernante du manoir de Tyneford.

    S'ensuivent les préparatifs, les dernières fêtes, les promesses de se retrouver, une fois les visas obtenus, aux Etats-Unis et le départ pour le Dorset avec l'alto familial contenant un manuscrit paternel inédit.

    Les premiers temps à Tyneford se révèlent difficiles. Elise fait le dur apprentissage du métier de domestique, se sent rejetée par ses pairs et espère obtenir enfin de bonnes nouvelles de ses parents.

    Mais l'arrivée du fils de la maison, Kit Rivers, va bouleverser ce quotidien....

     

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    Il s'agit du second roman de Natasha Solomons, une auteure anglaise née en 1980 et qui avait été très remarquée pour son premier ouvrage Jack Rosenblum rêve en anglais. Elle s'est inspirée du destin de sa grand-tante Gabi qui avait réussi à fuir en devenant aide maternelle.

    J'avais aperçu cet ouvrage en librairie, au moment de sa sortie et j'avais tout de suite été attirrée par sa couverture et par le titre. Aussi, je n'ai pas hésité quand je l'ai vu en présentation dans ma bibliothèque. Et je l'ai littéralement dévoré.

    J'ai beaucoup aimé le style et la construction du roman. Elise Landau, devenue vieille, nous raconte son histoire et nous transporte au printemps viennois de 1938, un moment décisif de sa vie.

    "Les souvenirs n'obéissent pas à une chronologie. Dans mon esprit, tout se bouscule [Mais] dans les pages qui suivent, je dois m'astreindre à, un certain ordre"

    Même si les feuillets consacrés à Vienne ne sont finalement que peu nombreux par rapport au reste du livre, je trouve qu'ils se révèlent très marquants. Ils permettent de comprendre la vie des bourgeois bohêmes menacés par la montée du nazisme. Mais aussi de mieux cerner la personnalité de l'héroïne, "le bébé de la famille" Landau et l'impact de Tyneford sur elle.

    Tout le reste du roman est consacré à la vie à Tyneford. Je suis totalement d'accord avec le choix du traducteur d'avoir changé le titre original "le Roman dans l'alto" en "Le Manoir de Tyneford" (Les Américains ont d'ailleurs pris la même décision. Le roman s'appelle là-bas The House of Tyneford). En effet, je pense qu'il correspond plus au contenu. Certes, le roman dans l'alto, métaphore de la mémoire familiale et surtout paternelle, constitue un élément essentiel de l'intrigue. Mais le manoir et la ville de Tyneford, lieux de toutes les beautés, de toutes les évolutiions et de tous les bouleversements, m'ont encore plus fascinée.

    " Enfin, nous sortîmes de l'allée et Tyneford s'offrit à ma vue. Je n'oublierai jamais cette première vision. C'était un manoir simple et élégant. D'une couleur différente de celle des cottages, ses pierres d'un jaune chaud luisaient au soleil. Un porche gothique s'élevait sur le côté. Le blason familial était sculpté dans sa façade en grès et deux roses en pierre ornaient chacun de ses coins. Une vieille glycine chargée de grappes de fleurs encadraient les fenêtres à l'ouest. [...] rares sont les endroits où la nature a été plus prodigue. Des bois de hêtre bordaient le jardin, et la demeure, construite sur un terrain en pente, avait la rangée de collines en arrière-plan. Une élégante terrasse courait le long de la maison d'où quelques marches menaient à une pelouse soyeuse qui descendait vers la mer. Toutes les fenêtres de la façade donnaient sur cette étendue d'eau étincelante, calme, enchanteresse. "

    J'ai beaucoup aimé également les personnages. J'en parlerai peu de peur de trop en révéler mais je trouve que l'écrivaine a su leur donner un aspect attachant et montrer leur évolution. Chacun, même les protagonistes les plus secondaires, est impacté par la Seconde Guerre Mondiale.

    Une des autres qualités de cet ouvrage tient à la peinture des moeurs anglaises à cette période. La scène où Elise se travestit en garçon pour l'anniversaire de Kit; l'ignorance d'Elise et de son amie Polly sur le déroulement des relations sexuelles...donnent un aperçu de la vie des "privilégiés" à la fin des années 30.

    De même, l'apprentissage du métier de bonne par Elise offre la possibilité de découvrir les règles qui régissent le monde des domestiques.

    "La première chose qu'on m'avait apprise, c'était l'importance de la rapidité! Une bonne n'est jamais oisive, or traîner, ce n'est rien faire"

    "Rappelez-vous qu'on ne doit jamais vous voir de l'extérieur. Quand vous lavez les vitres, baissez-vous et partez si jamais vous apercevez une dame ou un monsieur dehors, sur la pelouse ou la terrasse. [...] Vous devez vous rendre invisible"

    Bref, vous l'aurez compris: ce roman, tant pour son intrigue bouleversante que pour son style et sa construction, constitue un coup de coeur. Et j'espère vous avoir donné envie de vous plonger dedans.

    Je mets en lien la vidéo de présentation par les éditeurs anglais (le manoir est tout bonnement magnifique).


    Editions Calmann-Levy, avril 2012, 20,90 €, 450 pages, traduit de l'anglais par Lisa Rosenbaum

    Ce billet marque ma quatrième participation au challenge Au service de...

     

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