Je voulais te dire
de
Louisa Young
"France, 7 juin 1917, 3h10 du matin
La nuit avait été tiède. Comme un parfum d'été. Plutôt calme.
Le fracas assourdissant des explosions fut si soudain, crevant l'épaisseur de l'air et de la terre, qu'il secoua tous les crânes ébranlés et les cervelles ébahies, chassant toute pensée résiduelle."
Après ce préambule autour de la guerre et de son impact sur tous les personnages principaux, retour à Londres au moment des fêtes de Noël 1907. Dans les jardins de Kensington, une boule de neige atteint le jeune Riley Purefoy et le fait tomber à la renverse sur une fine couche de glace qui se brise.
Après avoir été repêché par les Waveney, un famille de riches intellectuels, il est ramené chez eux. Très vite, il tisse des liens avec eux et fait la connaissance de Sir Alfred, un peintre qui évolue dans leur cercle social.
Ce dernier veut prendre le fils d'ouvrier comme modèle et bien vite, il l'accueille chez lui et lui permet de suivre des études secondaires.
A l'été 1914, Riley se rend compte de son attirance pour Nadine Waveney.
A l'été 1914, ces deux jeunes gens, en dépit de l'opposition de leurs proches, partagent un moment de complicité.
A l'été 1914, la guerre éclate et Riley s'engage.
Dans le fracas de la guerre et face à la fin du monde qu'ils connaissaient, Riley et Nadine vont-ils poursuivre leur relation?
Cela faisait longtemps que j'avais remarqué ce titre mais je n'avais pas encore eu l'occasion de m'y plonger. Dans le cadre d'une LC pour le 11 novembre, j'ai pu réparer cette erreur.
Ce roman se découpe en trois parties distinctes: l'avant conflit, les trois premières années de la guerre et l'après juin 1917.
J'ai apprécié la phase d'apprentissage de Riley, celle où il fréquente le cercle des intellectuels londoniens et où on le voit croiser des célébrités tels que JM Barrie. Un moyen pour le lecteur d'en apprendre plus sur la vie artistique et sur l'atmosphère de la capitale anglaise juste avant la Première Guerre mondiale.
Malheureusement, cette présentation m'a semblé trop courte.
Parce que j'aurais aimé m'attarder plus longtemps sur Riley et Nadine (on en apprend pas assez sur le développement intellectuel de cette dernière. Ni sur ses qualités humaines. Difficile dès lors de s'attacher à elle et de comprendre ce qui va l'animer dans différentes situations plus tard dans le roman).
Parce que je n'ai pas compris les raisons profondes qui ont poussé Riley à s'engager. L'antagonisme des proches quant à sa relation avec Miss Waveney n'est pas assez présentée pour qu'on sente le poids qu'elle représente pour le jeune homme. Et "l'incident" avec le peintre ne semble pas assez grave pour motiver une telle décision.
Ensuite, on retrouve notre héros au combat.
A ce moment, j'ai été déstabilisée par l'introduction de trois autres personnages principaux. Au duo Riley-Nadine se rajoutent désormais Rose, Locke (le major de Riley) et sa femme Julia. Je peux comprendre l'intérêt de ses nouveau protagonistes, dans le sens où, au fil de l'intrigue, ils vont permettre à Louisa Young d'aborder des thématiques importantes (j'y reviendrai plus tard) Non, ce qui m'a gênée, c'est leur brutale entrée. Pourquoi ne pas avoir choisi de les décrire dès le préambule sur l'avant-guerre? On aurait pu alors assister à un entrelacement de leurs destins jusqu'à leur rencontre. Cela aurait même certainement plus donné de souffle au récit.
Même si je reste toujours assez dubitative sur le choix de plusieurs héros. Généralement, j'arrive à m'attacher à deux ou trois mais quand cela dépasse ce nombre, je trouve que, souvent, un déséquilibre se produit entre eux et que certains restent dans l'ombre ou constituent de simples faire-valoir.
Cela a été le cas, par exemple, pour Julia. Que ce soit dans la partie sur la guerre ou celle après juin 1917, on comprend rapidement que c'est une femme de bonne famille, élevée pour être un bel objet d'ornement mais on ne saisit pas tout ce qui peut motiver ses décisions. Certaines ellipses amplifient encore plus ce sentiment de passer à côté d'elle. Et que dire de son choix final? Il m'a paru complètement incongru.
J'ai été également déçue par le traitement de Rose, la cousine de Locke. De prime abord, elle nous est dépeinte comme une jeune femme laide et qui le sait. Cette affirmation n'a jamais été démentie tout au long du roman. Comme si le physique n'était pas affaire de regard. Comme si elle ne pouvait pas prétendre au bonheur. (contrairement à certains mutilés de guerre)
Chacun de ces cinq protagonistes, même s'ils ne sont pas toujours assez creusés, permet d'évoquer la guerre et ses conséquences. Solitude, négation de soi, sacrifice, manque, douleur, courage, abnégation, courage de repartir à zéro, nécessité d'oublier...constituent autant de sujets traités.
On s'intéresse également à la reconstruction des "gueules cassées". J'ai beaucoup aimé toute cette partie. L'auteur a réussi à la fois à montrer tous les progrès et les prouesses techniques réalisés pour permettre aux soldats de reprendre une vie à peu près normale et à insister sur les dommages psychologiques et la peur du regard des autres.
Cependant, malgré quelques scènes réussies, je dois avouer que je suis passée à côté de ce roman. Ni les personnages ni l'intrigue ne sont parvenus à complètement m'intéresser.
Bref, vous l'aurez compris: une lecture en demi-teinte pour moi et je ne pense pas que je me lancerai dans Ravages, la suite parue récemment.
Livre de Poche, 2014, 456 pages
Billet dans le cadre d'une LC avec Fanny, Fanny et Bianca et dans le cadre des challenges Un pavé par mois et Première Guerre mondiale
Commentaires
C'est dommage qu'il ne t'ai pas plus plu que ça. J'avais repéré ce titre mais si les avis des deux Fanny et de Bianca sont similaires au tien, je passerai mon tour !
Peut-être qu'elles préféreront ce roman à moi. Je l'espère en tout cas.
C'est dommage car tous les ingrédients étaient réunis pour me plaire.
Mais je suis passée à côté. Cela arrive...
Il est dans ma PAL ! Je verrai bien... ;)
Oui, tu verras bien. Beaucoup de personnes ont aimé ce titre. Et je regrette d'être passée à côté.
Evidemment, ton analyse qui va au delà d'une simple note pointe les défauts du roman. Personnellement je crois que je les ai pour la plupart oubliés dans l'émotion de l'action… Sauf peut-être, c'est vrai, pour Rose, dont on ne cerne pas vraiment les sentiments (changeants ?).
Je comprends que tu aies aimé. Mais c'est vrai que malheureusement pour moi, je n'ai pas été entraînée par le cours de l'action et je suis passée à côté de ce roman qui pourtant plaît beaucoup...Je le regrette.
En revanche, la partie sur la reconstruction des gueules cassées m'a vraiment beaucoup intéressée.
J'attendais d'avoir terminé le roman pour lire ton avis Claire ! C'est dommage que tu n'aies pas aimé, mais bon, parfois, on ne sait pas trop pourquoi mais on passe à côté !
J'ai bien aimé. J'ai trouvé qu'il y avait quelques longueurs et comme toi j'ai beaucoup aimé le début et les passages concernant les opérations de Riley.
Je reconnais que tu as raison pour de nombreux points mais j'ai dépassé tout cela en m'attachant aux personnages (même le grand désespoir et la superficialité de Julia m'ont touchés...) !
C'est super que tu aies apprécié Fanny de ton côté. Je suis vraiment frustrée d'être passée à côté de cette histoire.
Je vais lire de ce pas ton billet!
Comme souvent nos avis se rejoignent ! comme toi j'ai aimé toute la partie consacrée à al reconstruction faciale, le reste m'a ennuyé malheureusement
Oui, une fois encore, nos avis se sont rejoints! Bon courage pour le deuxième tome! Mais peut-être qu'il te permettra de mieux cerner la psychologie de certains des personnages...