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grand angle

  • Les Souliers rouges, tomes 1 & 2

    Les Souliers rouges, tomes 1& 2

    de

    Cousseau & Cuvillier

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    "La vie ne tient qu'à un fil, affirme le dicton, un fil fragile et lent comme celui de l'eau"

    Ainsi débute cette histoire,à Saint-Nicolas-du-Pélem, un petit village breton, en juin 1944. On y fait la connaissance de Jules, un jeune homme qui améliore l'ordinaire familial en braconnant ou pêchant.

    C'est d'ailleurs en laissant échapper un poisson qu'il fait la connaissance de Georges, un Russe blanc émigré, qui a décidé de s'installer dans le château de ses amis.

    Immédiatement, une forte relation d'amitié se noue entre ces deux hommes.

    "Les coïncidences n'existent pas. Il y a seulement des chemins que nos inconscients désirent voir se croiser..."

    Mais en cette période troublée, la vie tient à peu de choses et nos héros vont en faire l'amère expérience lors de l'arrivée d'un bataillon allemand...

    "Si on s'en sort, je te promets de faire Paris-Moscou aller et retour, déguisé en lapin blanc chaussé de bottines rouges"

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    Cette œuvre, je l'ai reçue vendredi dernier à la médiathèque et elle fait partie des premières que j'ai désirées entamer. J'ai d'ailleurs dévoré ce dyptique en très peu de temps.

    S'inspirant de faits réellement vécus par son beau-père, Gérard Cousseau a réussi à créer une intrigue qui entremêle habilement la grande et la petite histoire.

    Dans le contexte particulier du débarquement, il évoque le quotidien d'un petit village, bouleversé par l'arrivée des Allemands. Ces derniers entendent faire le ménage et vont faire appel aux miliciens pour les seconder dans leur tâche. Rien n'est épargné aux lecteurs: les scènes d'interrogatoire, de torture, de pendaison, de violences sur la population civile se succèdent.

    Au fil de la plume et des dessins du tandem Cousseau&Cuvillier, on revit ainsi les heures sombres de l'Occupation. Mais toujours sans manichéisme. De chaque côté, on côtoie les êtres les plus vils comme les plus bons. Car tout le monde a été emporté par le flot de la guerre.

    La guerre comme révélateur du caractère de chacun donc

    La guerre comme moyen de se rencontrer aussi et de grandir. Face à ces heures sombres dépeintes dans les deux volumes, subsistent en effet des bulles de gaieté. Celles de deux amis tout récents qui se promènent dans les bois ensemble, qui apprennent l'un de l'autre et qui se protègent.

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    Comment ne pas tomber sous le charme de Georges, cet être si atypique: un érudit, un homme fidèle à ses convictions et qui a dû quitter sa partie, un homme qui se sacrifie pour ceux qu'il aime....et qui porte de magnifiques souliers rouges...?

    Les pages se tournent toutes seules, on est tour à tour horrifiés, émus, choqués, amusés...Et là réside le talent de Gérard Cousseau: avoir su créer une histoire originale qui fait la part belle à l'amitié alors que tant de choses ont déjà été dites sur cette période troublée.

    A cette trame réinventée se superposent les dessins de Damien Cuvillier. Des images à la fois d'un graphisme réaliste et tout en finesse qui accompagnent à merveille cette chronique en temps de guerre.

    Bref, vous l'aurez compris: je vous recommande fortement cette bande dessinée historique.

    Bamboo, collection Grand angle, 96 pages, 2015 & 2015

     

     

  • La Faute au midi de Jean-Yves Le Naour

    La Faute au midi

    de

    Jean-Yves Le Naour

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    "Marseille, 7 août 1914

    Allons, la mère, il faut bien faire son devoir.

    Et puis, ça ne va pas durer longtemps. Dans quelques semaines, on sera de retour."

    C'est sur ces mots qu'Auguste Dodde quitte sa mère sur le quai de la gare à Marseille. Il s'en va grossir les rangs du XVème corps, un bataillon qui regroupe les soldats de Provence ainsi que ceux de Corse, des Alpes-Maritimes, du Gard et de l'Ardèche.

    Avec eux, il est dirigé vers la frontière, au Nord de Nancy.

    Sur cette ligne du front, les Allemands semblent se dérober et refuser toute bataille. Les Français croient qu'ils ont peur de leur surnombre et veulent engager le combat.

    Malgré les avertissements de Mosellans et ceux du capitaine Armengaud, un aviateur parti en reconnaissance, ils foncent ainsi droit dans le piège tendu par leurs ennemis.

    Dans une nasse, sous le feu de l'artillerie, quelques 10 000 soldats tombent. Et les survivants se retirent.

    Cette défaite remet en cause la stratégie du général Joffre qui souhaitait laisser les Allemands avancer en Belgique tout en les contrant en Lorraine.

    Mais, surtout, elle n'est pas comprise par le grand Quartier général ni par Adolphe Messimy, le Ministre de la Guerre de l'époque. On cherche des coupables et la faute revient au Midi.

    Messimy dépêche le sénateur Gervais auprès du Matin et l'enjoint à dénoncer le XVème corps. Un article assassin paraît donc dans le journal le 24 août.

    Un article qui provoque un tollé auprès des sénateurs et députés provençaux et auprès du Sud du pays et qui pousse Messimy à la démission le 25 août. Un article, aussi, qui entretient le racisme intérieur et suscite des gestes de rejets, des rebuffades...à l'encontre de ces soldats incriminés.

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    J'ai emprunté par hasard cette bande dessinée à la médiathèque où je travaille. Et je l'ai dévorée. Je n'avais jamais entendu parler de ce fait de guerre ni de ce racisme intérieur que subissaient certains combattants. De même, j'ignorais tout du sort rencontré par Auguste Dodde et par Joseph Tomasini.

    Cet album monte sans cesse en puissance. En le lisant, j'ai eu l'impression d'assister à une tragédie en quatre actes.

    Acte 1: la bataille sanglante en Lorraine. Une bataille piège contre laquelle les état-majors avaient été prévenus. Mais fort de leur savoir et désirant renouer avec les opérations militaires napoléoniennes, ils ont oublié l'importance du canon et envoyé 10000 personnes à la mort.

    Acte 2: la recherche du coupable idéal. Au lieu d'endosser la responsabilité, on impute la faute au Midi.

    Acte 3: la reconnaissance de l'erreur et de la fausseté des accusations. Mais les graines de la suspicion ont déjà germé dans certains esprits face à ces bataillons provençaux.

    Acte 4: les victimes collatérales (je n'en dirai pas plus afin de ne pas gâcher la découverte....)

    A chacun de ces actes, on assiste au sort injuste fait aux soldats, souvent simples chairs à canon et jouets des puissants. Et on en ressort révolté et profondément ému.

    Impuissance des sans-grades/Jusqu'au boutisme/Erreur militaire/Rejet de la responsabilité sur l'autre. Autant de thèmes qui traversent cette œuvre et se révèlent malheureusement bien intemporels.

    Car, même si ce drame se situe pendant la Première Guerre mondiale, on sait bien que de telles attitudes sont souvent universelles.

    Et que dire de cette dernière scène? Une scène  à la fois émouvante et éprouvante. Une scène où la réponse est tellement inadaptée face au malheur et à la souffrance.

    L'historien Jean-Yves Le Naour signe là une belle bande dessinée, à la fois instructive, habilement construite et forte.

    En revanche, je dois avouer que j'ai été moins sensible aux dessins. Mais je reconnais que leur sobriété sert à merveille le texte.

    Bref, vous l'aurez compris: je vous recommande la lecture de La Faute du Midi, ne serait-ce que pour découvrir cette partie assez méconnue de l'histoire de la Première Guerre mondiale

    Bamboo Editions, 2014, 56 pages, 13,90 €

    Billet dans le cadre du challenge Première Guerre mondiale que j'organise.

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