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roman sur la genèse d'un tableau

  • L'ombre de nos nuits

    L'ombre de nos nuits

    de

    Gaëlle Josse

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    « A Lunéville, en Lorraine, en ces premiers jours de l’année 1639. »

    Tout est prêt. Les grandes lignes, les principaux volumes sont posés. J’ai la main engourdie et le feu est presque éteint dans l’atelier, seules quelques braises persistent à diffuser leurs lueurs rouges sous la cendre. Combien de temps ai-je passé là ? Je ne sais pas. Ce n’est plus la peine d’ajouter une bûche maintenant, ce serait une dépense inutile. Le soir tombe, il fait trop sombre pour continuer. »

    En ce début de l’an 1639, Georges de la Tour s’attelle à la réalisation d’un Saint Sebastien soigné par Irène. Il entend présenter cette toile au Roi de France et devenir ainsi peintre officiel à la Cour.

    Des siècles plus tard, une femme visite le musée de Rouen et tombe en arrêt devant ce tableau. Les expressions du martyr et d’Irène lui rappellent la passion douloureuse qu’elle a vécue pour un homme insaisissable et excessif.

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    De Gaëlle Josse, j’avais adoré les Heures silencieuses et j’espérais retrouver les mêmes qualités dans cet opus.

    En outre, je suis généralement adepte des histoires enchâssées qui se font écho et qui, parfois, se rejoignent pour donner sens à l’intrigue principale.

    Dans ce récit, deux époques s’entremêlent : le début du 17ème siècle où le lecteur assiste à la genèse d’une toile dans l’atelier de Georges de la Tour et l’ère contemporaine où une femme revient sur son idylle avec un amant qu’elle ne semble pas capable d’oublier.

    Le lien entre ces deux histoires ? Ce Saint Sébastien soigné par Irène. L’un le peint, l’autre l’observe.

    Et, dès les premières pages, ce lien ne m’a pas convaincue. Même si je reconnais qu’une œuvre d’art peut servir de déclencheur de souvenirs, la connexion ici m’a semblé par trop artificielle. J’aurais préféré que l’auteur fasse le choix entre les deux axes narratifs.

    Un déséquilibre s’est donc opéré, au fil de ma lecture. Autant la partie plus ancienne m’a passionnée, autant je ne me suis pas intéressée à cette confession de l'héroïne plus actuelle.

    « J’aime le silence qui accompagne la nuit, j’aime le feu, l’ombre et leur danse, ils se cherchent, s’évitent, s’enlacent. Le silence qui accompagne nos vérités. Je n’ai pas besoin de grand-chose d’autre, quand j’y pense. »

    Ainsi retentit la voix de Georges de la Tour, qualifié par ses proches de « maître du Silence »

    « Je n’ai qu’un peu de beauté à offrir au monde, celle du tremblement d’une flamme dans la nuit. Peut-être est-ce dérisoire mais c’est mon seul talent. »

    On suit son processus créatif, son quotidien également, le travail de ses apprentis…Pour mieux souligner encore son génie et décrire d’autres coulisses, la voix du maître laisse parfois la place à celle de son second apprenti, un garçon qu’il a recueilli dans la rue, après que la peste a décimé toute sa famille.

    Dans le silence de l’atelier, le fracas de la guerre, tout comme les épidémies, n’ont pas leur place.

    Sauf quand les portes s’ouvrent sur le monde extérieur. Notamment lors de ce trajet de la Lorraine à Paris pour montrer le résultat de ce Saint Sébastien au Roi.

    A chaque fois, j'ai quitté à regret cette narration. Je ne dirai que peu de choses sur l’autre. Car je n’ai pas accroché. Une impression de déjà vu. Une impression de décalage pour moi avec l’autre volet. Un lien trop ténu aussi ou que je n’ai pas réussi assez à identifier.

    Bref, vous l’aurez compris : malgré son très beau style, ce livre m’a laissé une impression mitigée. Et je regrette vraiment que Gaëlle Josse ne se soit pas concentrée sur Georges de la Tour.

    Les Éditions Noir sur Blanc, janvier 2016