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  • Le Voleur d'enfants

    Le Voleur d'enfants

    de

    Michael Escoffier,

    illustré par Clément Lefèvre

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    « C’est un voleur d’enfants

    Avec de longues dents

    Pointues, comme des couteaux.

    A la faveur de la lune

    Son chariot de fortune

    Sillonne la campagne.

    C’est un voleur d’enfants

    Avec de longues dents

    Et de très vieux chevaux.

    On ne sait pas d’où il vient

    Qui il est, encore moins

    Mais on sait où il va. »

    Ce voleur d’enfants, la nuit venue, s’introduit dans les maisons et dérobe les petits garçons et les petites filles. Il les enferme dans une cage rouge et les ramène dans sa cabane au fonds des bois.

    Nul ne sait le sort qu’il leur réserve…A moins que….

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    Michael Escoffier fait partie de mes auteurs d’albums préférés. Il a toujours une façon très originale de narrer des histoires souvent pleines de rebondissements.

    Dès le début, on a l’impression de plonger dans une histoire sombre, un conte des anciens temps où il ne fait pas bon être enfant. Surtout avec cet individu dans les parages…

    Page après page, à la manière d’une ritournelle inquiétante, ce voleur de gamins aux longues dents pointues comme des couteaux nous fait frémir. Quel sort attend ceux qu’il a enlevés ?

    Et c’est là justement que réside le talent de Michael Escoffier. A nous faire frémir, puis à nous surprendre..Avec une chute totalement inattendue. Mais je n’en dirai pas plus de peur de vous gâcher la surprise.

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    Au texte à la fois sombre et tendre répondent les très belles illustrations de Clément Lefèvre. Il joue sur les images références du fantastique (des chevaux lancés au galop, un carrosse au loin, un manoir brinquebalant, des ombres qui se dessinent sur les murs et envahissent tout…) pour contribuer à l’atmosphère angoissante.

    Mais il y rajoute également une tonalité onirique avec ce voleur mi-ogre mi-oiseau, ses dessins tout en rondeur, son choix de couleurs….Comme si tout n’était qu’un rêve….Bon ou mauvais ? A vous de le découvrir…

    Bref, vous l’aurez compris : j’ai beaucoup aimé cet album et j’espère que vous serez aussi conquis que moi.

     

    Editions Chocolat jeunesse, 2010

  • Lever de rideau sur Terezin

    Lever de rideau sur Terezin

    de

    Christophe Lambert

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    "Une nuit de novembre 1943

    "Ta passion pour le théâtre te perdra!"

    Victor Steiner avait entendu cette phrase durant son adolescence. C'était la prophétie de son père, un individu aussi grincheux qu'autoritaire. Chaque fois que le jeune Steiner osait parler de sa vocation à la maison, la voix du chef de famille tonnait, pareille à celle de Zeus en personne: "Mener une vie de saltimbanque, c'est ça que tu souhaites? Tu as songé aux fins de mois difficiles? Tu as envie d'habiter sous les toits, dans les chambres de bonne éclairées à la bougie? "[...] Et le sermon paternel se terminait invariablement par: "Ta passion pour le théâtre te perdra!""

    Novembre 1943, Victor Steiner, le célèbre dramaturge juif, quitte sa cachette parisienne pour assister à une représentation du Soulier de satin de Claudel. Mal lui en prend car, sur le chemin du retour, il est arrêté et déporté. Mais, grâce à sa notoriété, il est envoyé à Terezin, un camp spécial, conçu par les Nazis comme une vitrine. Une visite de contrôle de la Croix-rouge est d'ailleurs prévue dans les prochains mois.

    Et Steiner se voit assigner comme tâche de monter une pièce autour du Roi Soleil. Il hésite...Jusqu'à ce que la Résistance interne le convainque de la nécessité d'accepter. En effet, est prévue une évasion lors de cette représentation exceptionnelle.

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    Le camp de Terezin

    Parmi les œuvres qui ont compté cette année pour moi, figure Swing à Berlin. Aussi, j'ai été ravie de retrouver Christophe Lambert avec ce nouveau titre.

    Comme la Bérénice d'Isabelle Stibbe, Victor Steiner est habité par la passion du théâtre.

    "Le théâtre le nourrissait. Entendre les trois coups, sentir l'odeur des vieilles boiseries, regarder le rideau s'écarter, vibrer au jeu des acteurs, rire, pleurer, frémir...A ses yeux, rien ne pouvait remplacer cette farandole d'émotions. Les planches rendaient la vie plus belle, plus intense."

    A la sortie d'une représentation, il est arrêté et déporté.

    Direction Terezin...Un camp spécial, tout près de Prague, dont je n'avais jamais entendu parler. En quelques phrases et quelques scènes, une fois encore, le romancier parvient à nous plonger d'emblée dans l'horreur de ce camp-vitrine.

    Une vitrine pour dissimuler la barbarie/Une vitrine pour taire l'horreur

    Mais une vitrine où la violence est tout aussi présente

    Coups de feu/Têtes qui éclatent/Malades entassés dans des mouroirs/Convois qui partent sans cesse...

    Voilà le quotidien dans lequel se retrouve Victor Terezin. Comment imaginer qu'il puisse continuer à exercer son art? Surtout quand le papier sert à réchauffer...

    Cependant, sa renommée l'a précédé et, très vite, il est obligé d'écrire une pièce en cinq mois autour du Roi Soleil.

    D'où la question/fil rouge de cette œuvre: peut-on créer sous contrainte et dans un contexte de violence extrême?

    C'est passionnant d'assister à ce processus créatif.

    Balbutiement des débuts/Recherche d'inspiration/Trouvaille de l'idée locomotive/Ferveur de l'écriture

    "Il avait surnommé "idées-locomotives" ces graines suffisamment prometteuses pour laisser germer des histoires excitantes. Une fois "l'idée-locomotive" lancée dans son petit monde intérieur, plus rien ne pouvait l'arrêter. Elle était comme une voie ferrée, allant de l'avant coûte que coûte, traversant les continents, franchissant les précipices et forçant les montagnes."

    C'est d'autant plus passionnant que ce drame inventé de toutes pièces se fait l'écho de la vie réelle. Mise en abîme d'un auteur (Steiner) qui parle d'un autre auteur (Molière) obligé de changer sa pièce les Fâcheux pour complaire à la volonté royale.

    L'art contre le pouvoir ou l'art soumis au pouvoir?/ L'art libre ou l'art esclave?

    Autant de thèmes très forts qui sont traités tout au long de ces chapitres....

    Les pages se tournent, on est happés par ce bouillonnement intellectuel et artistique, on fait corps avec toutes ces réflexions, on espère que le héros va trouver des talents à la hauteur de ces mots.

    Comme si l'art nous éloignait de l'horreur de ce Terezin...

    Comme si seule comptait la représentation....

    Toutefois, l'art, comme nous le prouve Christophe Lambert, ne peut pas tout...

    Et, la réalité reprend ses droits...

    S'intercalent ainsi des passages sur le quotidien de tous ces hommes et femmes déportés. A la violence extrême de leur situation, ils opposent toute l'humanité dont ils sont capables.

    Des éclats de joie dans un océan de barbarie/ Des graines d'amour et d'amitié plantés un peu partout/Des poussées d'intelligence

    Face à l'horreur, tous ces êtres humais se révèlent et évoluent. Forcément. A l'instar de notre héros...

    Comment ne pas s'attacher dès lors à tous ces prisonniers? Comment ne pas espérer qu'ils s'échappent? Comment ne pas avoir peur pour eux? Comment ne pas pleurer pour certains?

    Bref, vous l'aurez compris: vous voici en face d'un beau roman, un roman vibrant, un roman sombre, un roman qui fait réfléchir, un roman qui nous apprend encore et encore à quel point l'art est nécessaire pour résister à toute oppression.  Et j'espère que vous partagerez ce coup de cœur.

    Bayard, 2015, 456 pages

     

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