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rouergue

  • Ma dévotion de Julia Kerninon

    Ma dévotion

    de

    Julia Kerninon

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    "A vingt-cinq ans, j'ai écrit un mince essai consacré à Hans Christian Andersen. J'étais jeune alors, et je pensais y avoir démontré de manière convaincante l'étroitesse des liens entre la vie et l’œuvre de l'auteur danois, mais je me leurrais. Des années plus tard, lorsque je l'ai vraiment lu, ce qui signifie lu comme le livre écrit par une autre-ce qu'il avait de fait fini par devenir- j'ai été stupéfaite de ce que j'y ai trouvé. En lieu et place des pertinentes analyses dont je croyais me souvenir, je découvrais page après page une défense presque lyrique de l'isolement- et j'entendais la voix sourde de la jeune femme que j'avais été, une fille introvertie, se cachant derrière ces livres, aussi terrifiée qu'orgueilleuse, et qui tâchait férocement d'imposer un ordre au monde."

    Au crépuscule de son existence, Helen croise par hasard Franck sur un trottoir de Londres, alors qu'ils ne se sont pas vus depuis plus de vingt-trois ans. Sur ce bout de bitume, elle entame sa longue confession. De leur rencontre sous les lambris d'un palais romain à leur installation à Amsterdam, de leurs séparations à leur réunion normande, de leur enfance au drame, se déroule ainsi le fil de leur relation.

    "Si je t'avais parlé à temps, Frank. Si je t'avais une seule fois, dit quelque chose au lieu de simplement faire, toujours faire, toujours tout faire, si j'avais su utiliser tous les mots qui étaient pourtant, sous leur forme écrite, ma compétence la plus achevée, si j'avais su les dompter pour qu'ils portent ma voix, rien de tout cela ne serait arrivé, n'est-ce pas? C'est pour cela que je parle maintenant et que tu dois m'écouter."

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    © Philippe Matsas / OPALE

    Grâce au Grand prix des lectrices Elle, j'ai découvert la plume de Julia Kerninon. Pour mon premier jour de l'année 2019, je me suis plongée dans ce livre et je l'ai dévoré en une après-midi.

    J'ai été captée par ce long chant de l'amour impossible. A la manière de l'héroïne de la magnifique nouvelle Lettre d'une inconnue de Stefan Zweig, Helen revient sur toutes les étapes de sa passion dévorante pour Franck. Rome, Amsterdam, la Normandie, Londres comme autant de couplets de ce même refrain décliné à l'infini: son adoration pour cet homme qui ne cesse de lui échapper et la rattrape au moment des adieux.

    La plume sensible et vibrante de Julia Kerninon épouse au mieux les pensées de cette héroïne au cœur malmené.  Et nous livre un sublime portrait de femme.

    J'ai beaucoup apprécié également l'analyse psychologique, à la fois poussée et d'une grande finesse. Non seulement d'Helen. Mais aussi de Franck, dont on entend une seule fois la voix (et de quelle jolie manière) mais qui se dessine en creux de chaque phrase de la narratrice. Tout s'efface en sa présence. Et les autres protagonistes n'apparaissent que comme des figures de deuxième plan. Même si, à un moment, elles parviennent à occuper un rôle de premier plan. Notamment par les vérités implacables qu'elles délivrent.

    Quant au duo Helen et Franck, il est fascinant de les voir évoluer dans leur danse de l'amour-dévoration, de l'amour-ravage, de l'amour-fuite, de l'amour-jalousie, de l'amour-pardon, de l'amour-drame...Même si, le plus souvent, Helen se retrouve reléguée de la piste de danse, loin de ce cavalier si convoité.

    De plus, ce roman permet une incursion dans les milieux diplomatiques, culturels et un voyage des années 50 à nos jours. Toute la partie sur la création, tant littéraire que picturale, m'a profondément intéressée.

    Chapitre après chapitre, nos sentiments sont chamboulés, entre compréhension, attachement, pitié, rejet, espoir...Jusqu'à cet acte final, d'une certaine façon, inéluctable.

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai entamé l'année 2019 en termes de lectures de la plus belle manière. Ma dévotion, ce drame de l'amour à sens unique, m'a profondément touchée. Et je pense que cette fresque de la passion entre deux êtres extraordinaires fera partie de mes plus belles découvertes du Grand prix des Lectrices Elle 2019.

    Editions Rouergue, La Brune, 2018, 299 pages

    En bonus, je vous glisse un lien vers cette chanson qui a résonné en moi, une fois ce livre refermé.

     

     

     

  • La Meilleure nuit de tous les temps de Séverine Vidal

    La Meilleure nuit de tous les temps

    de

    Séverine Vidal

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    "Quand on tombe amoureux, on tombe pour de vrai.

    Aimer, c'est s'écrouler dans les escaliers, c'est se fendre la cheville en deux, avoir l'os qui ressort et hurler à la mort en attendant les secours.

    Niveau douleur, c'est à peu près ça.

    La première fois, je n'ai vu que ses cheveux.

    J'étais juste derrière elle en allant au collège, le jour de la rentrée. J'ai donc observé un moment ses boucles rousses, qui virevoltent quand elle marche. Et puis, je l'ai doublée sans oser me tourner vers elle. Pour rêver encore un peu. L'imaginer."

    Le jour de la rentrée, Raphaël Durand tombe fou amoureux de la très belle Colombe.

    Très vite, ils deviennent tous les deux inséparables.

    "C'est fou de faire la connaissance de quelqu'un le 5 septembre et de ne plus pouvoir s'en passer le 6."

    Mais c'est sans compter leurs parents qui, brusquement, leur interdisent de se retrouver.

    Heureusement, Colombe a une idée géniale pour contrer ce diktat.

    Et s'ils passaient la meilleure nuit de tous les temps?

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    Vous vous rappelez sans doute à quel point j'ai eu un coup de cœur pour le magnifique Quelqu'un qu'on aime de Séverine Vidal. Et je poursuis mon exploration de son œuvre avec ce titre..

    Dès les premières pages, j'ai été happée par cette histoire à la fois drôle et poétique.

    Peut-être parce qu'il est impossible de ne pas s'attacher à Raphaël dont le quotidien a été tourneboulé depuis la rentrée...

    Peut-être parce que l'amour entre Raphaël et Colombe frappe par sa sincérité et sa pureté...

    Peut-être parce qu'il fait résonner en nous d'anciennes amourettes d'enfance...

    Peut-être parce qu'on est surpris par la tournure de l'intrigue...

    Peut-être parce qu'on aurait adoré à l'âge des héros connaître cette meilleure nuit de tous les temps (et quelle nuit!)....

    Peut-être parce qu'on oscille entre le rire et les émotions...

    Peut-être parce que ce roman parle avec une telle justesse et une telle sensibilité d'amour, de famille, de colère, de révolte enfantine...Bref, de vie...Tout simplement... et c'est là peut-être que réside sa plus grande force....

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai beaucoup aimé cet ouvrage qui évoque avec talent la force du premier amour.

    "Quand on tombe amoureux, on tombe pas vraiment. On s'envole."

    Rouergue, 2012, 87 pages

     

     

     

     

     

  • Quand un chat réunit des coeurs esseulés

    Chat par-ci/ Chat par-là

    de

    Stéphane Servant

    chat par ci.gif

    "J'attends Lundi.

    C'est un drôle de nom pour un chat.

    Mais je n'aime ni les lundis ni les chats. C'est pour cela que j'ai choisi de l'appeler Lundi."

    Suite à un accident à vélo, Lorette, une vieille dame, se retrouve plâtrée. Et elle s'ennuie à mourir. Heureusement, pour la distraire, elle bénéficie de la présence d'un chat qu'elle a surnommé Lundi.

    Aujourd'hui est un jour pas comme les autres car autour du cou du chat, elle trouve un message. Quelqu'un essaie d'engager la conversation avec elle.

    Lorette aimerait bien que ce soit le vieux monsieur en face.

    Une correspondance s'établit...

    "J'attends Lunes.

    C'est un drôle de nom pour un chat.

    Mais j'adore les lundis et les chats. Et l'espagnol aussi. Lunes, ça veut dire lundi."

    Sofiane doit rester chez lui car il a une jambe plâtrée. Mais compte les heures car personne ne vient lui rendre visite.

    "Personne ne vient jamais sonner à ma porte. Parce que je ne sais pas comment me faire des amis. Le jour où je suis né, on a oublié de me donner le mode d'emploi."

    Sofiane rêverait de sortir de sa coquille et d'aborder notamment la petite voisine qu'il adore entendre rire ou chanter.

    Quel stratagème employer pour engager la conversation?

     

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    Je ne sais pas si vous connaissez la collection Boomerang du Rouergue. Elle a l'originalité de proposer des romans recto verso. Peu importe le sens de lecture, on est toujours surpris quand les intrigues se rejoignent.

    Avec Chat par-ci et son pendant Chat par-là, Stéphane Servant propose un très joli texte sur les solitudes modernes et sur les cœurs esseulés.

    Lorette/Sofiane: deux personnes aux âges opposés mais réunis par le même problème: tous deux sont refermés sur eux-mêmes et peinent à s'ouvrir aux autres.

    Deux voix qui vont nous raconter leur semaine et l'évolution de leur vie grâce à un chat.

    Pour mieux montrer les points communs entre ces deux narrateurs, l'auteur a pris le parti de commencer de la même manière son recto et son verso. A une variante près: là où Lorette se montre négative, Sofiane se révèle positif.

    Puis, après avoir souligné les ressemblances entre ces deux protagonistes, il se lance dans deux récits différents et qui parviennent quand même à se recouper au milieu du livre.

    Comment? Je vous laisse le plaisir de la découverte. Sachez juste que j'ai trouvé l'idée très ingénieuse et j'ai eu hâte de me lancer dans le verso (Chat par-là) pour tout comprendre.

    A cette trame très bien conçue se superpose un langage à la fois prosaïque et poétique. Le prosaïque, c'est plus pour Lorette, la poétique, plus pour Sofiane. Mais le langage prosaïque de Lorette se teinte de plus en plus fortement d'éléments poétiques au fil des jours. Tout comme la poésie de Sofiane s'intensifie.

    "Avec Pablo Neruda et tes chansons et tes rires dans le jardin d'en bas, le mercredi est passé à toute allure. Mes yeux vont des poèmes au jardin, et du jardin aux poèmes. Et tout se mélange. La vie et la poésie. Tout est beau. Tout brille. Et les phrases de Pablo et tes yeux. Des soleils partout."

    On est conquis par les scènes, par les échanges de regards, par les vagues d'espoir qui étreignent nos héros, par leur ouverture progressive et on ressort émus de cette lecture.

    Bref, vous l'aurez compris: un très beau roman jeunesse qui résonnera aussi bien dans les cœurs des plus petits que des plus grands.

    Rouergue, 2014, 74 pages (37 et 37)