Défense et trahison
de
Anne Perry
"Hester Latterly descendit du cab. Voiture légère à deux places, d'invention récente, c'était un moyen de locomotion bien moins cher qu'une grosse berline qu'on louait à la journée. Elle fouilla dans son réticule à la recherche de la somme exacte et, après avoir réglé la course, se dirigea d'un pas vif vers Regent's Park où les jonquilles s'épanouissaient dans leur éclat doré sur la terre sombre"
Londres, milieu du 19ème siècle: Hester Latterly a rendez-vous avec une de ses meilleures amies à Regent's Park. Or, celle-ci arrive très en retard. Il vient d'arriver un malheur dans sa famille: son frère, le général Carlyon est mort dans ce qui semble un accident domestique stupide. Il se serait empalé sur une arme, après une chute d'escalier.
Mais, très vite, la femme du général confesse son meurtre. La famille Carlyon décide de payer Oliver Rathbone, le célèbre avocat pour assurer sa défense.
Ce dernier, afin de sauver sa cliente, fait appel à William Monk, désormais détective privé.
Et l'enquête pour comprendre les raisons qui entourent cet assassinat débute...
Comme vous avez déjà eu l'occasion de vous en apercevoir, je suis devenue récemment très fan de William Monk. Je l'ai découvert grâce au challenge Anne Perry organisé par Syl.
Aussi, j'ai été ravie quand Syl a accepté de faire une lecture commune du troisème volume des aventures de cet enquêteur.
Cet opus m'a tout d'abord semblé très différent des deux précédents en raison de sa construction. En effet, dès le début, on sait qui est coupable. L'enquête, au lieu de mener au procès, va cette fois-ci l'accompagner.
L'aspect juridique revêt donc une importance primordiale. On assiste à tous les témoignages, aux retournements de situation... Cette manière d'appréhenher le crime et ses motifs n'est pas sans rappeler les films américains tels que Autopsie d'un meutre d'Otto Preminger où la majeure partie de l'action se déroule dans une salle d'audience. La tension monte, monte jusqu'au...verdict final.
Il en va de même pour ce roman. J'ai d'ailleurs vu quelque part qu'Anne Perry avait centré les aventures de Monk autour des tribunaux afin de plaire au lectorat américain. Cela annonce donc d'autres oeuvres construites sur ce modèle.
Et par conséquent, une plus grande importance accordée à Oliver Rathbone. J'apprécie de plus en plus ce personnage. Je le trouvais un peu trop sûr de lui dans le précédent tome. Au contraire dans celui-ci, il gagne en profondeur. Il montre ses failles devant sa cliente et devant Hester Latterly.
En effet, son "humanisation" s'accompagne d'un développement de ses sentiments pour l'infirmière. Ainsi, un trio que je ne qualifierai pas encore d'"amoureux" (Monk n'a pas pris conscience de son attachement) se met progressivement en place...
C'est là justement une des forces d'Anne Perry: nous rendre attachants ses protagonistes. De livre en livre, on a envie de les voir évoluer, se rapprocher...Et tout semble crédible.
Bien entendu, l'autre force de la plume de cette écrivaine tient à son talent de reconstitution. Comme dans Un étranger dans le miroir et Un deuil dangereux , elle parvient à nous plonger dans le Londres victorien. Sont évoqués la condition des femmes, la vie dans les intérieurs nobles, la guerre de Crimée et ses conséquences, l'importance des apparences...
J'aimerais enfin aborder la question de l'enquête. Je me suis assez vite doutée de la nature des motivations de la criminelle. Même si je ne mesurais pas l'ampleur du drame...Je n'en dirai pas plus de peur de trop en dévoiler...
Bref, vous l'aurez compris: j'ai bien aimé cette aventure de William Monk . Mais elle m'a moins plu que les précédentes. Certes, le souci de reconstitution et d'approfondissement des interactions des personnages m'a fait passer un très bon moment. Mais la construction autour du procès et le nombre important de scènes d'audience m'ont moins convaincue. J'attends de voir si Anne Perry réutilisera ce procédé...
Voici le billet de Syl.
Editions 10/18, 2001, 8,80 €, 416 pages
Lu dans le cadre d'une lecture commune avec Syl, du challenge Anne Perry, du challenge du Polar historique et du challenge Victorien.