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the frenchbooklover - Page 132

  • L'Echange des princesses de Chantal Thomas

    L’Échange des princesses

    de

    Chantal Thomas

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    ""La gueule de bois n'a jamais empêché les bonnes idées" se dit Philippe d'Orléans en fermant les yeux dans les forts parfums de son bain. S'il les ouvrait, il aurait le regard bloqué sur ce gros corps ventru, blanchâtre, flottant dans l'eau chaude; et cette bedaine de bête échouée, cette espèce de molle bonbonne gonflée par les nuits de débauche et de goinfrerie, sans lui gâcher complètement le plaisir et la bonne idée, l'affaiblirait"

    En cet été 1721, le Régent Philippe d'Orléans vient de décider de demander en mariage l'infante d'Espagne pour le roi Louis XV et de proposer en échange la main de sa fille pour le futur roi d'Espagne.

    Après de nombreuses tractations et l'ambassade de Saint-Simon, l'accord est conclu.

    L'infante de 4 ans et la jeune princesse de 12 ans entament leur voyage et se croisent à la frontière franco-espagnole, sur la petite île de Bidassoa.

    Mais rien dans cette alliance ne se déroule comme prévu.

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    Je suis une grande fan de l’œuvre de Chantal Thomas. J'avais adoré les Adieux à la Reine et passé un très bon moment en compagnie du Testament d'Olympe.

    Aussi, quand ce nouveau roman est sorti au moment de la rentrée littéraire, j'attendais avec impatience de pouvoir m'y plonger.

    Dans cet ouvrage, elle traite d'un moment de l'histoire que je méconnaissais totalement. Pour moi, Louis XV n'avait pas eu de fiancée avant d'épouser en 1725 Marie Leszczynska.

    C'est donc tout un pan de la Régence et du début du règne de Louis XV que j'ai découvert.

    Comme d'habitude, l'auteure nous apprend beaucoup de choses sur les coulisses de ces arrangements politiques.On suit ainsi l'ambassade de Saint-Simon, le trajet des deux princesses, les conditions des accords (la date retenue pour la consommation de l'union, par exemple), la cérémonie de l'échange, les arrivées triomphales des cortèges...

    Mais elle s'attarde également sur les us et coutumes de ces "Grands".

    J'ai été notamment frappée par la vie à la Cour d'Espagne. Le couple, que formait Philippe V (petit-fils de Louis XIV) et sa seconde épouse Elizabeth Farnèse, vivait en grande majorité dans son lit. De même, parmi les divertissements proposés, on trouvait en bonne place les autodafés de l'Inquisition ou les messes à répétition.

    Au contraire, en France, le Régent s'oubliait dans une vie de débauche. Quant au Roi, il était sans cesse supervisé par son gouverneur le maréchal Villeroy et craignait d'être empoisonné. Il se divertissait dans des mini-sièges organisés avec des acteurs pour lui apprendre les tactiques à adopter en cas de guerre.

    De même, Chantal Thomas souligne les difficultés d'intégration des deux jeunes épousées et rappelle à quel point il ne faisait guère bon d'être femme au 18ème siècle.

    Néanmoins, même si j'ai l'impression de m'être beaucoup instruite, je n'ai pas pris autant de plaisir à ma lecture que pour ses opus précédents.

    Cela tient sans doute au choix narratif. Alors que dans les Adieux à la Reine, on suivait l'intrigue par les yeux de la lectrice de Marie-Antoinette et dans le Testament d'Olympe par ceux d'Olympe et de sa sœur, l'Echange des princesses ne reprend pas ce schéma.

    Au contraire, ce roman oscille sans cesse entre deux modes: tantôt il prend le ton d'une chronique et se révèle factuel, tantôt il tente de retranscrire les pensées des deux jeunes femmes.

    Et je n'ai pas trouvé ce fonctionnement très percutant. J'aurais aimé que le "je" soit sans cesse présent. Il aurait humanisé le récit et m'aurait permis de vraiment y prendre part. Là, je suis toujours restée en surface, malgré le destin tragique des princesses.

    Bref, vous l'aurez compris: ce roman se révèle historiquement très fouillé mais il n'a pas suscité d'émotions chez moi.

    Editions du Seuil, 2013, 333 pages, 20 €

  • Coeur de pierre

    Cœur de pierre

    scénario de Séverine Gauthier

    dessin et couleurs de Jérémie Almanza

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    "L'enfant au cœur de pierre était né en décembre, et tous les médecins lors de l'auscultation annoncèrent aux parents qu'ils ne pouvaient entendre les battements du cœur de leur petit garçon.

    C'est ainsi que tomba l'horrible diagnostic.

    On leur dit que leur fils ne sourirait jamais, qu'il n'aimerait personne et serait allergique à tous les sentiments que les autres éprouvaient; qu'il serait tous les jours de très méchante humeur; qu'il avait une pierre à la place du cœur." [...]

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    "Le même jour d'hiver, à l'instant très précis où l'enfant au cœur de pierre poussait son premier cri, une petite fille vint au monde aussi, elle ne cria pas, au contraire, elle sourit...

    Elle sourit à son père, à sa mère, aux docteurs, qui furent bien surpris en écoutant son cœur: les battements légers chantaient une chanson!

    L'enfant semblait avoir un incroyable don.

    Ils furent rassurés en voyant les radios, à la place du cœur poussait un artichaut"

    Les années passent, le petit garçon au cœur de pierre et la petite fille au cœur d'artichaut grandissent.

    Et, un jour, leurs chemins se croisent.

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    "Ce fut un coup de foudre, elle aima tout de lui"

    La petite fille tente alors de déclarer ses sentiments en effeuillant un à un les pétales de son cœur d'artichaut.

    Mais face à un cœur de pierre, comment faire passer ce doux message?

    C'est une bande dessinée que j'ai découverte l'année dernière grâce à Moka. Et je viens juste de la recevoir comme gain d'un pari (merci Plumosaure!). L'occasion pour moi de la relire et de vous faire partager cet immense coup de cœur.

    Dès les premières pages, j'ai été emportée par le très beau texte, tout en poésie et en sensibilité de Séverine Gauthier. Tous les mots sont parfaitement à leur place et savent retranscrire à merveille les émotions (ou l'absence d'émotions) des personnages.

    On s'attache à ces deux héros: ce petit garçon, laissé à l'abandon et qui ne comprend pas le sens des mots "je t'aime" et cette petite fille, choyée, qui, au contraire, dispense peut-être trop généreusement ses "je t'aime".

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    On espère également qu'ils trouveront un langage commun et parviendront à décliner ensemble ce très beau verbe.

    Cette magnifique histoire nous fait donc réfléchir sur les rapports amoureux mais aussi sur les choix déterminants que l'on est amenés à faire.

    Cette intrigue si forte est sublimée par les illustrations de Jérémie Almanza.

    Aux tons noirs et gris qui accompagnent le petit garçon au cœur de pierre répondent les couleurs roses et orangées utilisées pour décrire l'univers de la petite fille au cœur d'artichaut.

    On peut d'ailleurs remarquer que lors de leurs rencontres, les bulles restent sombres. Seule la petite fille apporte une teinte colorée, comme si elle, seule, pouvait éclairer et donner un sens à la vie de notre héros.

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai adoré cette bande dessinée. Et j'espère qu'elle vous fera autant battre le cœur qu'à moi.

    Delcourt Jeunesse, 2013, 29 pages, 9,45 €

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  • La Fille qui n'aimait pas les fins

    La Fille qui n'aimait pas les fins

    de

    Yaël Hassan et Matt7ieu Radenac

    fille qui n'aimait pas les fins.jpg

    "Je déteste cet endroit.

    Les bibliothèques me font toujours cette impression étrange: je les déteste et en même temps, je dois avouer que j'apprécie leur calme, leur ambiance studieuse et leurs rayonnages débordant de livres dans lesquels, s'ils m'appartenaient..

    Mais ils ne m'appartiennent pas!

    Et là est tout le problème....

    Emprunter un livre et avoir à le rendre ensuite, à s'en séparer, à s'en éloigner...Impossible!"

    Maya est une jeune adolescente qui adore les livres. Elle en possède pas moins de 334. Mais ses étagères débordent. Et sa mère, pour contrer cette invasion, décide, malgré ses protestations, de l'inscrire à la bibliothèque.

    Elle y fait la rencontre de Manuelo, un vieil original.

    Des liens se tissent très vite entre ces deux passionnés de littérature.

    Mais leur relation tient-elle vraiment au hasard?

     

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    A mon arrivée en secteur jeunesse, j'avais découvert certaines œuvres de Yaël Hassan: Un grand-père tombé du ciel, Momo, petit prince des bleuets et Le professeur de musique. Et, à chaque fois, j'avais été frappée par sa faculté à parler avec simplicité et émotion de sujets tels que les relations intergénérationnelles, les disputes familiales....

    Aussi, quand ce roman qu'elle a rédigé à quatre mains avec Mathieu Radenac est arrivé à la médiathèque, je n'ai pas hésité longtemps avant de m'y plonger. Surtout que je gardais en mémoire le bel article de George dessus.

    Pour raconter l'histoire de Maya et de Manuelo, les deux auteurs ont opté pour un schéma narratif qui s'articule autour d'une alternance de leurs deux points de vue (à une exception près). Un procédé que j'ai trouvé habile car il permet de mieux cerner ces protagonistes et de comprendre ce qu'ils cachent.

    Maya est une adolescente de 13 ans passionnée par les livres. Une passion qu'elle tient de son père qui avait l'habitude de lui lire des histoires tous les soirs. Un père qu'elle a malheureusement perdu trois ans auparavant.

    Maya a dû mal à faire son deuil et à accepter le nouvel ami de sa mère.

    Mais c'est justement son inscription à la bibliothèque municipale et sa rencontre là-bas avec Manuelo qui vont l'aider à avancer.

    De son côté, Manuelo dissimule également des blessures. Très vite, on comprend qu'il est le grand-père de Maya et qu'il tente de rattraper le temps perdu. En effet, son fils et lui étaient fâchés (pour des motifs que nous apprendrons à la fin) et il a été tenu à l'écart de tous les grands événements de sa vie.

    A cette thématique sur le deuil, sur les disputes familiales et sur les regrets qui peuvent en découler se greffe un bel hommage aux livres et à l'écriture.

    Maya et Manuelo nouent des échanges à partir de l'emprunt de Robinson Crusoé. Ensemble, ils vont ainsi disserter des Trois mousquetaires, de l'importance des carnets pour épancher toutes ses pensées, de marque-pages et de la fin des romans.

    Comme le laisse deviner le titre, Maya, pour une raison bien particulière (je vous laisse la découvrir), n'aime pas les fins. Elle a pris pour habitude de laisser en plan tous les ouvrages qu'elle parcourt cinquante pages avant de les avoir achevés.

    Cette question de savoir s'il arrive de regretter une fin, elle va la poser à une romancière qu'elle rencontre qu'à son grand-père, lui-même écrivain.

    "Si je regrette les fins? Je ne pense pas qu'il faille les regretter, elles marquent un nouveau départ. La fin peut être une petite lumière qui illumine l'ensemble en lui donnant un sens. Je l'espère en tout cas."

    J'ai beaucoup apprécié toutes ces réflexions sur le livre comme lien entre les personnes, sur l'écriture comme remède....

    En revanche, j'ai moins adhéré à certains éléments de l'intrigue tels que l'histoire d'amour adolescente. J'ai trouvé qu'ils avaient tendance à éloigner le lecteur des thématiques essentielles et déjà très riches abordées dans ce court roman.

    De même, je n'ai pas été convaincue par les arguments avancés pour justifier la brouille entre Manuelo et son fils.

    Bref, vous l'aurez compris: malgré quelques bémols, j'ai passé un agréable moment en compagnie de cette œuvre qui fait réfléchir sur le pouvoir de la littérature et sur le deuil.

    Syros, 217 pages, 6,50 €