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alexandra de broca

  • Monsieur mon Amour

    Monsieur Mon Amour

    de

    Alexandra de Broca

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    "Au citoyen Philippe d'Orléans

    Palais-Royal

    Pardonnez-moi de vous importuner à l'heure où Paris gronde et attend son rédempteur. Vous, peut-être? Cette lettre, je vous l'assure, pourrait être la dernière car je sens la mort approcher. Mais si la guillotine devait tarder, alors je m'engage à vous écrire jusqu'à ce que mon nom soit crié et mon funeste départ ordonné."

    Emmenée en même temps que la famille Royale au Temple, la princesse de Lamballe vient d'être séparée d'eux et conduite à la prison de la Force pour y attendre son jugement.

    Elle profite de ces quelques jours de sursis pour se livrer à une bouleversante confession. En quinze lettres, étalées du 21 août au 3 septembre 1792, elle ose enfin avouer son amour à Philippe d'Orléans et revient sur ses années en France, de son mariage aux dernières heures de la Monarchie.

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    J'avais beaucoup apprécié la Princesse effacée, le premier ouvrage d'Alexandra de Broca, consacré à Madame Royale. Aussi, lorsque j'ai appris qu'elle venait de publier un nouvel opus, cette fois-ci autour d'une des favorites de Marie-Antoinette, j'ai eu hâte de me plonger dedans.

    Dans ses Mémoires, Talleyrand mentionne la princesse de Lamballe parmi les femmes qui se"crurent successivement aimées par" [Philippe d'Orléans]. Et c'est cette phrase qui a inspiré l'auteure.

    En effet, elle a  imaginé une déclaration d'amour de cette femme, rédigée lors de ses derniers jours à la Prison de la Force.

    S'adressant à celui qui a toujours ignoré le secret de son cœur, elle décide de tout lui dire.

    Un schéma narratif très astucieux qui entremêle ainsi des aspects biographiques et romancés.

    On en apprend plus sur le destin de cette jeune aristocrate turinoise, mariée au fils du duc de Penthièvre et qui fut torturée par son mari lors de sa nuit de noces et tout le temps de leur union.

    Devenue veuve à dix-neuf ans, elle manque épouser le roi Louis XV mais une intrigue de la favorite, la duchesse du Barry, annule ce projet.

    Elle rencontre alors la Dauphine, Marie-Antoinette, et devient très vite sa favorite. Tout le monde se dispute ses faveurs. Mais sa santé fragile, son sérieux, son renoncement aux idylles et l'arrivée de la Polignac dans l'entourage de la nouvelle Reine la précipitent en disgrâce.

    Rentrée à Paris, la princesse fréquente les salons d'avant-garde, comme celui du duc d'Orléans et adhère aux franc-maçons.

    Puis, suite aux événements de 1789, elle revient en faveur et regagne une place de confiance auprès de Marie-Antoinette.

    Jusqu'à cette arrestation en août 1792...

    J'ai trouvé toute cette partie biographique très intéressante. Cette princesse a tour à tour été admirée pour sa vertu, conspuée pour sa place à la Cour et maudite pour ses relations soi disant amoureuses avec la Reine.

    Avec ce "je", Alexandra de Broca entend rétablir la vérité autour de cette figure historique.

    A t-elle raison? A t-elle tort? Difficile de se prononcer.

    Mais, ce qui est certain, c'est qu'à la lecture de ces pages, on ne peut que ressentir de la compassion pour cette femme dont la vie a été sacrifiée aux autres.

    J'ai beaucoup apprécié également la peinture de ce tournant, entre le chute de la Monarchie et les massacres de septembre. On comprend mieux l'atmosphère de chaos qui devait régner et cette peur qui devait étreindre les aristocrates enfermés.

    En revanche, j'ai eu du mal à adhérer à cette amour forcené pour le duc d'Orléans. Les élans passionnés qui retentissent dans chaque lettre ne m'ont pas convaincue. Comme si cela me paraissait impossible de croire à un lien entre ces deux personnalités si antagonistes.

    De même, je reprocherai le flou qui entoure certaines dates. Je comprends cette idée de mémoire labyrinthe et cette possibilité de se perdre entre certains événements. Cependant, dans le cas d'une biographie romancée comme ici, je m'attendais à plus de précision. Notamment au moment du voyage d'Angleterre relié à l'affaire du collier mais dont les dates ne m'ont pas semblé coïncider (1781 et 1785)

    Bref, vous l'aurez compris: Monsieur mon Amour constitue une œuvre intéressante sur le plan historique et elle met en lumière une personnalité jalousée et calomniée. Toutefois, je dois avouer que je n'ai pas toujours été captée par les accents romantiques et que je me suis égarée dans certains faits historiques.

    Albin Michel, 2014, 233 pages

     

  • La Princesse effacée de Alexandra de Broca

    La Princesse effacée

    de

    Alexandra de Broca

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    "Dans la moiteur d'une oppressante soirée de juin, alors que Paris et ses habitants s'endorment, un curieux cortège quitte par une porte latérale l'enceinte de l'ancien domaine des Templiers.

    Aucun bruit de pas, d'armes ou de paroles ne vient perturber l'étrange procession qui s'avance lentement. Huit soldats, dirigés par un caporal, et une dizaine d'hommes en civil aux visages en partie masqués progressent serrés les uns contre les autres pour dissimuler le petit cercueil en bois clair qu'ils transportent"

    Depuis la mort de son mari en 1786, Renée Chantereine s'est installée rue des Rosiers. Elle a noué des contacts avec le voisinage, notamment le citoyen Binet, petit-fils du célèbre perruquier de Louis XIV et le citoyen Robert qui travaille pour le Convention.

    Ce dernier la sollicite d'ailleurs pour une mission de la plus haute importance en juillet 1795. Il est à la recherche d'une femme sans lien avec la royauté qui rendrait visite à la fille Capet. Renée accepte et rencontre pour la première fois au Temple Madame Royale.

    "Une ombre grise se tient debout devant elle, les mains jointes dans le dos comme si elle attendait d'être suppliciée. Chantereine, à sa propre surprise, esquisse, pour la première fois de sa vie, une révérence presque au ras du sol et s'immobilise. Elle attend un geste, un ordre pour se relever. C'est un rire puissant, caverneux, affreux, qui l'oblige à affronter le regard de la prisonnière. Le râle est bien sorti de cette forme inerte où seuls les yeux affolés prennent vie en roulant sans cesse. Ce ricanement est haché de raclements de gorge incompréhensibles! Ce ne sont pas des paroles, mais des sons comparables à ceux d'un animal blessé."

    Renée se retrouve ainsi face à une jeune femme de 16 ans qui a perdu tous ses proches et qui n'appartient quasiment plus au monde des vivants.

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    La Tour du Temple vers 1795

    J'avais remarqué cet ouvrage sur le beau blog de Bianca. Et j'ai été ravie de pouvoir l'emprunter rapidement dans la médiathèque que je fréquente.

    Dès les premières pages, je me suis laissée emporter par ce roman qui permet de découvrir un personnage historique, généralement peu évoqué, à savoir Marie-Thérèse de France, surnommée Madame Royale, la fille aînée de Louis XVI et de Marie-Antoinette.

    J'ai été frappée par l'état d'animalité dans lequel elle se trouve quand Renée fait sa connaissance pour la première fois. Elle vit dans le noir et surtout dans des conditions hygiéniques déplorables, dort sur une paillasse, n'a pas adressé la parole à quiconque depuis 13 mois- si on excepte les officiels... Et surtout elle ignore tout du sort de sa mère, de sa tante et de son frère.

    Après l'avoir lavée, habillée confortablement, la citoyenne Chantereine doit lui apprendre ce qui est advenu des siens. Et se rend vite compte que le seul moyen de la sauver serait de la laisser dicter ses mémoires.

    "Soit elle bascule dans la folie dans les prochaines heures, soit vous lui donnez une raison de se maintenir en vie avec ce témoignage"

    Débutent alors des séances d'écriture autour des souvenirs de cette "princesse effacée". Tout oppose ses deux femmes: leur condition, leur destin, leurs manières...Néanmoins, elles vont nouer une relation profonde.

    Dans cette première partie qui s'étend de juillet 1795 au 19 décembre 1795, deux niveaux de récit s'entremêlent donc: celui du retour à la vie de Marie-Thérèse et celui des évènements auxquels elle a assisté depuis son emprisonnement avec sa famille en août 1792.

    J'ai beaucoup apprécié ce schéma narratif. Il permet de vivre de l'intérieur ce qu'a enduré la famille royale. On assiste ainsi aux premiers jours au Temple, à la séparation des fidèles (Mme de Lamballe suppliciée, la gouvernante Mme de Tourzel, le fidèle valet Hué), à la dégradation des conditions de vie, aux derniers jours du Roi, au départ du Dauphin, à celui de la Reine et de Mme Elizabeth....Mais aussi aux brimades quotidiennes, aux regards intrusifs et sales des gardes révolutionnaires, au silence qui s'installe, au combat mené pour survivre malgré tout...

    Le 19 décembre 1795, Marie-Thérèse, après de longues tractations, est finalement confiée à son oncle, l'empereur d'Autriche. Les adieux sont déchirants.

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                   Marie-Thérèse libérée du Temple

    La seconde partie s'ouvre le 3 mai 1814 sur le retour de Louis XVIII et de Madame Royale. Alexandra de Broca imagine les retrouvailles entre cette dernière et Renée Chantereine (alors qu'on a perdu sa trace dans l'histoire en 1806).

    Les deux femmes se rendent à Versailles et au Trianon. L'occasion pour la dauphine d'évoquer son mariage douloureux à l'impuissant duc d'Angoulême et surtout de reparler des derniers temps au château, de ceux aux Tuileries, de la fuite à Varennes...Pour finalement revenir sur la petite "Mousseline", que sa mère adorait.

    Néanmoins, on ne peut s'empêcher de ressentir de la tristesse pour cette femme brisée par son passé.

    "Je ne sais pas me libérer de mon passé et pourtant, sans lui, je ne suis rien"

    On apprend aussi beaucoup de choses sur la fin de l'Ancien Régime, la Révolution française et le début de la Restauration. Sans jamais avoir l'impression d'être submergé par les informations.

    Bref, vous l'aurez compris:  j'ai beaucoup aimé ce roman aux allures de biographie sur un personnage assez méconnu (le titre est à cet égard très bien choisi). Il se dévore et on en ressort avec la sensation d'en savoir plus sur ce tournant de l'histoire française.

    Editions Points, 2010, 403 pages, 7,50 €