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roman d'anticipation

  • Vox de Christina Dalcher

    Vox

    de

    Christina Dalcher

    vox, christina dalcher, littérature américaine, dystopie, roman d'anticipation, science-fiction, condition des femmes, liberté, parole, droits, réflexion, premier roman

    "Si on m'avait dit qu'en une semaine, j'allais faire tomber le Président, le Mouvement pur, et ce petit merdeux incompétent de Morgan LeBron, je n'y aurais pas cru. Mais je n'aurais pas protesté. Je n'aurais pas dit un mot.

    Je ne suis plus du genre bavarde."

    Imaginez une Amérique où les femmes doivent rester à la maison. Asservies aux décisions de leurs maris. Où toute autorité et pouvoir décisionnel leur sont retirés. Où leurs mots sont comptés.
    100, pas plus, chaque jour.
    Les femmes ont littéralement perdu leur voix.

    C'est ce que dépeint Christina Dalcher dans cette dystopie. Des États-Unis dominés par un président et par une éminence noire, un révérend qui repousse en permanence les frontières des interdits sous couvert d'une morale biblique.

    L'autrice a choisi pour héroïne une doctorante neurolinguiste, Jean Mclellan, parvenue au bout de ses recherches pour lutter contre l'aphasie, juste avant de devoir renoncer à son activité professionnelle. Une femme qui est longtemps demeurée en marge des changements politiques. Une femme qui souffre de son manque de mots. Qui a peur pour sa fille. Qui voit son fils aîné dériver vers le radicalisme. Bref, une femme qui se révèle prête à tous les sacrifices pour changer son pays et revenir à la situation d'avant.

    J'aime ces portraits de femmes fortes. Tout comme j'aime ces histoires qui décrivent un univers peu éloigné du nôtre, où toutes nos craintes se sont réalisées. Aussi, cet ouvrage, dans la lignée de la Servante écarlate, avait tout pour me plaire.

    Et la recette a bien fonctionné pendant les 2/3 du livre. J'ai adhéré au point de vue narratif, cette voix muselée qui se déverse entre les pages. J'ai adhéré également aux choix d'intrigue, aux personnages archétypaux ainsi qu'aux rebondissements.
    Tout comme j'ai adhéré à ce tableau d'une Amérique tombée dans l'engrenage d'une morale puritaine et d'une réduction de toute liberté de la femme. Ainsi qu'à cette  phrase de Burke répétée comme une litanie sur l'inaction des gens de bien. J'étais captée et je ne pouvais m'arrêter.

    Puis, est arrivée cette idée de complot biologique et je n'ai pas cru à cette énième péripétie ni au dénouement qu'elle entraînait. Cette résolution dans une certaine précipitation.  Comme un frein au développement d'autres arcs de l'histoire. Laissés un peu trop en jachère. Tels que le mouvement de la résistance. Et ce basculement trop rapide de certains protagonistes. En effet, avoir recours à des êtres monolithiques comme personnages a ses avantages. Comme ses inconvénients car leurs retournements trop précipités ne paraissent pas sonner juste.

    Bref, vous l'aurez compris: Vox a constitué une découverte en deux temps pour moi. Elle  reste néanmoins une oeuvre divertissante mais qui a manqué de la force de certaines dystopies. 

     

  • La Ballade de Lila K. de Blandine Le Callet

    La Ballade de Lila K.

    de

    Blandine Le Callet

     

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    "Dans la vie, il y'a toujours un avant, un après, vous avez remarqué? Avec entre les deux, une cassure franche et nette, heureuse ou malheureuse-c'est une question de chance. Elle ne peut pas sourire à tout le monde, évidemment. Je suis sûre que personne n'y échappe."

    Pour Lila, la rupture s'est produite quand des hommes l'ont arrachée à sa mère et l'ont emmenée dans un centre pédagogique.

    Dans cette société futuriste de 2100 où chaque activité est encadrée, normée, épiée, elle a dû réapprendre les gestes du quotidien, le contact avec les autres...Elle a grandi, a été accompagnée par des tuteurs, est devenue savante...

    Mais elle n'a jamais oublié son objectif principal: celui de retrouver sa mère.

    Jusqu'au jour où...

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    De Blandine Le Callet, je connaissais Une pièce montée, un roman que j'avais découvert à sa sortie et beaucoup apprécié et le premier tome de la bande dessinée Médée. Mais je ne m'étais jamais lancée dans La Ballade de Lila K., malgré les très bons échos que j'en avais eus. Aussi, quand ma copinaute Bianca m'a proposé cette LC, je n'ai pas hésité longtemps avant de me lancer.

    J'ai commencé cet ouvrage hier soir et je l'ai achevé cet après-midi. Avec son style toujours aussi percutant, l'auteure m'a happée dans l'univers qu'elle a imaginé.

    Dans cette société de 2100, il existe une forte scission entre l'intra-muros et la Zone, divisée en de nombreux districts réputés dangereux.

    Dans cette société, chaque acte de la vie humaine est réglementé: le travail, la sexualité, la reproduction....

    Dans cette société, des caméras surveillent et enregistrent en permanence tout.

    Dans cette société, les livres sont perçus comme extrêmement dangereux. Les manipuler sans gants est réputé mortel et on tâche de les faire disparaître petit à petit pour les remplacer par des fichiers pour grammar books.

    Dans cette société, Lila, profondément asociale et marquée par la séparation avec sa mère, tente de trouver sa place. On la suit ainsi de 4 à 21 ans.

    Sur son chemin, elle croise plusieurs personnes: M. Kauffmann, Lucienne, Fernand, Justinien...et ce mystérieux "vous", destinataire de sa confession. Même si certaines rencontres vont se révéler plus déterminantes que d'autres, chacune va lui permettre de s'ancrer plus dans la vie et de se rapprocher des autres.

    "On passe sa vie à se construire des barrières au-delà desquelles on s'interdit d'aller: derrière, il y'a tous les monstres qu'on s'est créés. On les croit terribles, invincibles, mais ce n'est pas vrai. Dès qu'on trouve le courage de les affronter, ils se révèlent bien plus faibles qu'on les imaginait. Ils perdent consistance, s'évaporent peu à peu. Au point qu'on se demande, pour finir, s'ils existaient vraiment."

    Je me suis attachée à cette héroïne atypique, à son parcours hors du commun. J'ai aimé la voir évoluer, s'humaniser au contact de cette galerie de personnages secondaires réussis.

    J'ai attendu ses retrouvailles avec sa mère, émue de la force des sentiments qu'elle éprouvait toujours pour elle au bout de quinze ans. J'ai guetté les explications qui justifiaient leur isolement.

    Cependant, le destin de Lila n'a pas constitué le seul attrait de ce roman. En effet, je me suis particulièrement intéressée à la vie en 2100. Reprenant des thématiques chères aux œuvres de science-fiction, à l'instar de la surveillance des caméras ou de la dangerosité des livres (l'ombre de George Orwell et de Ray Bradbury n'était jamais loin), Blandine Le Callet a su créer un monde qui fait froid dans le dos.

    Surtout qu'il ne paraît pas improbable. Je ne sais pas si cela tient au fait qu'elle utilise des lieux que nous connaissons déjà: Paris, la banlieue, la BNF à Tolbiac ou qu'elle accentue des phénomènes déjà en cours (les livres papier scannés et détruits...).

    On sort de ces pages, un peu hagards et la tête pleine de réflexions sur le moyen d'éviter de telles dérives.

    On sort également de ces pages profondément émus par cette intrigue qui sait si bien parler d'amour, d'amitié, de pardon, d'espoir, de deuil...et de vie.

    "C'est cela sans doute, faire son deuil: accepter que le monde continue, inchangé, alors même qu'un être essentiel à sa marche en a été chassé. Accepter que les lignes restent droites et les couleurs intenses. Accepter l'évidence de sa propre survie."

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai adoré La Ballade de Lila K. Et je pense que cette lecture va continuer à m'accompagner pendant les prochains jours.

     

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    Le Livre de Poche, 2012, 354 pages, 7,10 €

    Billet dans le cadre d'une lecture commune avec Bianca et Yuko

    Et pour finir, je vous mets en bonus un lien vers Summertime, cette magnifique chanson qui joue un rôle si important dans les souvenirs de Lila.