Les Neuf géants
de
Edward Marston
"Atterré, Lawrence Firethorn contempla le corps de son épouse et exhala un soupir de désespoir qui donna le frisson à tous ceux qui l'entendirent. Vacillant devant la silhouette prostrée de sa toute jeune femme, arrachée à lui au soir de leurs noces, il hurla comme un animal blessé et leva des mains suppliantes vers le ciel."
Nicholas Bracewell doit affronter plusieurs situations périlleuses. Non seulement sa troupe, les Hommes de Westfield, est menacée d'expulsion par l'aubergiste de la Tête de la Reine, mais il doit aussi porter secours à un apprenti chapelier, poursuivi par des meurtriers.
Et si tout cela ne suffisait pas, voilà qu'il découvre un cadavre atrocement mutilé et abandonné dans les eaux boueuses de la Tamise....
Après avoir laissé Nicholas Bracewell sur la Route de Jérusalem, j'ai eu plaisir à le retrouver pour ce quatrième opus dans les rues de la capitale anglaise.
Même si je dois confesser que j'ai été moins emballée par cette aventure que par les précédentes. J'ai remarqué que, parfois, le défaut des polars historiques résidait dans la trop grande importance accordée au contexte et aux protagonistes, au détriment de l'intrigue policière.
Et c'est exactement sur cet écueil que ce tome a buté. Comme dans les titres précédents, Edward Marston démontre son talent pour nous plonger dans le monde du théâtre élisabéthain.
Ainsi, on en apprend plus sur la difficulté des troupes, sur la nécessité pour elles d'avoir un endroit de référence où faire venir le public, sur l'importance des choix des pièces, sur le rôle des protecteurs....
A cette peinture de l'univers des saltimbanques se superpose toute une description de la vie politique londonienne et des combats menés pour obtenir le titre de maire. Toute cette partie m'a passionnée.
De même, j'ai beaucoup apprécié les ressorts comiques développés au fil des chapitres. L'auteur s'amuse à reprendre les codes de la farce et nous livre quelques scènes vaudevillesques très réussies. Je fais notamment référence à un morceau d'anthologie: le duel entre le très cabotin Lawrence Firethorn et un batelier, qui se prétend poète. J'ai beaucoup ri!
Venons en maintenant aux bémols...Comme vous vous en doutez, j'ai jugé que l'intrigue policière n'était pas des plus réussies. Meurtres et complots s'enchaînent sans jamais vraiment accrocher l'intérêt du lecteur...Et le rebondissement, quelque peu attendu, ne m'a pas convaincue.
De plus, selon moi, un des avantages des séries réside dans les retrouvailles avec les protagonistes et dans l'avancée de leurs interactions. Or, dans ce roman, même si on revoit avec plaisir Nicholas, Lawrence..., on a l'impression de ne pas les voir évoluer. Comme si leur caractère était figé et comme si les comédiens n'avaient plus qu'un seul type de rôle...et donc de réaction. Dommage car j'aurais préféré que leur psychologie soit un peu plus creusée.
Bref, vous l'aurez compris: cette lecture, même si elle m'a intéressée sur le plan historique, ne me laissera pas un souvenir impérissable...
Editions 10/18, 275 pages
Billet dans le cadre d'une lecture commune avec Shelbylee
Commentaires
J'ai noté cette série lorsque tu as parlé des premiers tomes sur ton blog. L'écueil que tu évoques ici est exactement celui que je crains de retrouver dans notre prochaine lecture commune Claude Izner... Verdict très prochainement !
Au contraire de Claude Izner, j'ai trouvé que les premiers tomes de Marston tenaient la route, côté intrigue policière.
Dans ce tome, en revanche, il n'en est rien et j'espère que le prochain opus sera au même niveau que les premières aventures.
Verdict prochainement!
C'est souvent le cas des séries historiques, elles sont réussies d'un point de vue historique au détriment de l'intrigue policière
C'est en effet souvent le cas. Pourtant, dans les deux premiers tomes, Edward Marston avait réussi à atteindre un certain équilibre.
Je ressors un peu avec les mêmes impressions que toi. D'ailleurs, j'avais totalement oublié cette aventure de la série. Je commence à me demander si je n'ai pas rêvé une des aventures de la série, car j'ai lu en diagonale le résumé du prochain et cela n'apparaît pas dedans (d'après mes souvenirs, Barnaby a besoin de l'aide de Nicholas). On verra bien si ce sera le cas. Même si les personnages n'évoluent pas trop, je les aime quand même comme ils sont !
Nous partageons le même avis toutes les deux, comme je l'ai vu dans ton billet.
J'aime aussi beaucoup les personnages mais je les ai vraiment trouvés figés dans des réactions et des comportements. J'espère qu'Edward Marston les fera évoluer dans le prochain tome.
Tu voudrais qu'on se lance quand dans notre prochaine LC?
J'avais beaucoup aimé la découverte de cette série grâce à Shelbylee et il faudrait que je me décide à lire le tome 2. Comme toi, j'apprécie beaucoup le côté historique, l'étude de la vie d'une troupe de théâtre. L'atmosphère de l'époque est vraiment bien rendue.
C'est là justement un des talents d'Edward Marston: savoir si bien rendre l'atmosphère de cette époque. J'adore la reconsitution opérée à chaque fois et cette plongée dans les coulisses du théâtre élisabéthaine.
J'espère que les prochaines intrigues seront plus à la hauteur car j'ai peur sinon de m'ennuyer...et de laisser tomber la série.
C'est le genre de roman qui va plus me convaincre pour son cadre, ses personnages que pour le fond. Comme je l'ai mis chez Shelbylee, je me laisserai tenter par le tome 1 ;)
Le premier tome est réussi, tant par son sens de la reconstitution historique que par son intrigue policière, plutôt réussie. Et j'aime beaucoup le personnage principal.
Je serai curieuse de connaître ton opinion si tu te lances.