Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

albin michel - Page 5

  • Manderley for ever de Tatiana de Rosnay

    Manderley for ever

    de

    Tatiana de Rosnay

     

    tatiana de rosnay,daphné du maurier,manderley for ever,albin michel,héloïse d'ormesson,biographie,écrivain anglais

     

    "D'habitude, il y a du monde sur les pelouses de Regent's Park. Des promeneurs viennent admirer les parterres de fleurs, les roseraies de la reine Mary, le lac où l'on peut faire du bateau. Mais en cette grise matinée de novembre, rendue humide par une bruine typiquement britannique, le parc est désert."

    Dans cette biographie, Tatiana de Rosnay fait revivre la fabuleuse histoire de Daphné du Maurier, de sa naissance le 13 mai 1907 à sa mort le 19 avril 1989.

    Cadette de Sir Gerald de Maurier, un célèbre comédien, elle grandit dans un monde privilégié, entourée d'artistes. Parmi les familiers de la maisonnée, on retrouve notamment le célèbre écrivain et dramaturge James Barrie.

    Depuis toute petite, elle entend également beaucoup parler de son grand-père, le célèbre George du Maurier, proche de Henry James, dessinateur et auteur de Peter Ibbetson.

    Forcément, issue d'une telle lignée et avec un tel entourage, Daphné ne peut que se lancer dans une voie artistique.

    Elle entame un journal intime, dans lequel elle narre ses tourments amoureux, auprès de la directrice de sa pension française, la belle Fernande Yvon.

    Puis, à l'abord de la vingtaine, après quelques nouvelles cyniques, elle trouve la discipline nécessaire pour rédiger son premier roman, La Chaîne d'amour.

    Commence alors un parcours littéraire jalonné par de grands succès: Rebecca (1938), Le Général du Roi (1946), Ma cousine Rachel (1951)...

    Daphné puise, tant dans sa vie personnelle que dans celle de ses ancêtres, pour trouver l'inspiration.

    Mais, avec les années, sa voix s'éteint. Jusqu'à sa disparition en 1989, alors que sa mémoire s'effiloche.

    tatiana de rosnay,daphné du maurier,manderley for ever,albin michel,héloïse d'ormesson,biographie,écrivain anglais

    Autant j'avais été mitigée concernant la biographie sur la Baronne Blixen, autant j'ai été emballée par celle-ci.

    Tatiana de Rosnay parvient à faire revivre ce destin hors norme sans jamais encombrer son schéma narratif de trop de dates ou de faits. Tout est savamment dosé pour ne jamais susciter une baisse d'intérêt de la part du lecteur.

    De son enfance dorée, parmi des sommités intellectuelles et sous la férule d'un père trop présent à sa retraite à la soixantaine, elle dessine le portrait d'une femme entière, passionnée, intelligente, indépendante.

    Trop indépendante sans doute. Et égoïste. Une femme qui préfère se consacrer pendant des heures à son art, en délaissant ses enfants et son époux. Une femme qui déteste les mondanités inhérentes à son rang. Une femme timide mais qui se lance à corps perdu dans ses amours.

    Une femme scindée en deux et qui laisse, de temps en temps, son double masculin, Eric Avon, s'exprimer.

    Une femme profondément attachée à la nature. Et aux Cornouailles. Après des vacances dans sa maison de jeunesse à Ferryside, elle devient la locataire de Menabilly, un lieu qui l'inspirera pour le Général du Roi et pour le Manderley de Rebecca.

    On ressort fascinés par cette personnalité. Et amusés par certains de ses traits de caractère ou de ses habitudes (à commencer par le langage codé dont elle use avec ses proches (cirer signifie par exemple "faire l'amour"))

    Et avec l'envie de se plonger dans les ouvrages dont on découvre la genèse, au fil des pages.

    Néanmoins, j'aimerais soulever un bémol. Cette biographie a été publiée conjointement par Albin Michel et Héloïse d'Ormesson et cela se ressent. En effet, l'auteur cite à de trop nombreuses reprises le premier éditeur. Certes, Daphné du Maurier était en contrat avec eux. Certes, sa traductrice Mme Butler se permettait de trop nombreuses libertés. Mais, une fois développée cette idée pour une des parutions, avait-on besoin de savoir à chaque fois le type d'accueil reçu en France et les adaptations opérées?

    Bref, vous l'aurez compris: une biographie très réussie sur une femme extraordinaire. Et je vous en recommande vivement la lecture.

    Albin Michel et Héloïse d'Ormesson, 2015, 457 pages

  • Quel effet bizarre faites-vous sur mon cœur

    Quel effet bizarre faites-vous sur mon cœur

    de

    Christine Orban

    christine orban, quel effet bizarre faites-vous sur mon coeur, albin michel, joséphine de beauharnais, portrait de femme, roman épistolaire, roman à la première personne

    "Enfin une lettre de toi, retenu à l'île d'Elbe. Comment est-ce possible? Je n'aurais jamais imaginé qu'un jour tu serais exilé et moi répudiée. Que de douleurs nous avons traversé pour en arriver là.

    On me connait mal, dis-tu dans ta lettre. Tu te prépares à substituer ta plume à l'épée, voilà presque une bonne nouvelle. Puisque nous devons être jugés, soyons-le pour ce que nous sommes. Moi, je n'ai pas de comptes à rendre à l'Histoire. A toi seulement. C'est pourquoi j'entreprends de t'écrire. De te raconter ma vie depuis de funeste dîner où tu décidas de la séparer de la tienne."

    Dans son château de la Malmaison, Joséphine décide de rédiger une longue lettre à l'adresse de celui qu'elle a tant aimé. Une lettre de déclaration certes. Mais aussi une lettre de justification sur ses erreurs passées.

    Cette longue confession débute par le moment tant redouté: celui du dîner avec l'Empereur où il annonce sa décision de se séparer d'elle. Une répudiation longtemps repoussée mais finalement, irrémédiable et qui plonge notre héroïne dans les affres du désespoir.

    christine orban, quel effet bizarre faites-vous sur mon coeur, albin michel, joséphine de beauharnais, portrait de femme, roman épistolaire, roman à la première personne

    J'avais beaucoup aimé la plume et la sensibilité de Christine Orban dans la Mélancolie du dimanche. Aussi, j'étais très curieuse de découvrir ce qu'elle avait pu écrire sur ces deux personnages historiques célèbres.

    Dès les premières pages, on est happés par cette narration à la première personne. De la séparation à la rencontre, en passant par l'épisode avec le capitaine Charles, Josèphe-Rose (rebaptisée Joséphine par son illustre mari) dévide le fil de ses souvenirs.

    J'ai trouvé cette partie très intéressante. En effet, sans jamais sombrer dans l'écueil de la leçon d'histoire, l'auteur parvient, par petites touches, à nous parler des points les plus importants de la vie de cette femme.

    Par son biais, elle esquisse également le portrait d'un Napoléon intime: un homme profondément épris aux débuts de leur relation.

    "Je me réveille plein de toi. Ton portrait et l'enivrante soirée d'hier n'ont point laissé de repos à mes sens. Douce et incomparable Joséphine, quel effet bizarre faites-vous sur mon cœur." (Lettre d'octobre 1795)

    Un homme qui dort peu et qui mange avec un lance-pierre. Un homme qui travaille d'arrache-pied. Un homme qui consacre peu de temps aux siens, même s'il leur est profondément attaché.

    Avec cette confession, on suit également son destin hors normes, ses premières victoires, son accès au pouvoir, son sacre d'Empereur. Et, corrélativement son désir de pérenniser cette position qui le pousse à répudier sa femme stérile et à rechercher une nouvelle alliance.

    Ce roman, je l'ai dévoré. Car, comme je le disais précédemment, le "je" nous interpelle immédiatement. Et l'histoire et le style, à la fois sobre et émouvant, nous retiennent.

    Néanmoins, avec le recul, je dois avouer que, pendant toute ma lecture, j'ai été quelque peu gênée par la modernité de cette déclaration. A plusieurs reprises, je me suis demandée si le ton correspondait pleinement à celui qu'aurait pu employer cette souveraine ou s'il ne sonnait pas plutôt comme celui d'une femme de notre époque confrontée à l'échec douloureux de sa relation.

    Peut-être que ce bémol tient à mes connaissances préexistantes sur la vie de cette impératrice et sur l'image que je m'en étais faite...

    Peut-être qu'il provient aussi de mes souvenirs de la Mélancolie du dimanche dont je parlais plus haut et de l'impression d'une similarité dans le ton...

    Bref, vous l'aurez compris: malgré cette réserve sur la contemporanéité de la voix de la narratrice, ce roman épistolaire constitue un beau portrait de femme en souffrance et permet de découvrir la vie de Joséphine de Beauharnais.

    Albin Michel, 2014, 263 pages

     

     

     

  • Mon année Salinger

    Mon année Salinger

    de

    Joanna Smith Rakoff

    mon année salinger,joanna smith rakoff,albin michel,récit d'apprentissage,autobiographie,roman sur une rencontre avec salinger

    "Nous étions des centaines, des milliers, à nous habiller avec soin dans la lumière grise du matin de Brooklyn, du Queens, du Lower East Side, à quitter nos appartements, croulant sous le poids de nos fourre-tout gonflés de manuscrits que nous lisions dans la queue de la boulangerie polonaise, du deli grec, du diner du coin, en attendant de commander notre café, léger et sucré, et notre viennoiserie à emporter dans le métro, où nous espérions trouver une place assise afin de pouvoir lire encore avant d'arriver à nos bureaux de Midtown, Soho, Union Square. "

    Dans ce récit autobiographique où elle a tenté de raconter aussi bien qu'elle a pu la vérité, Joanna Smith Rakoff nous parle de ses 23 ans. Une année où, fraîchement sortie de l'université, elle est entrée à l'Agence. Une année où s'est posée de nombreuses questions et où elle est parvenue à comprendre ce qu'elle voulait. Une année marquée par la présence de Salinger...

    mon année salinger,joanna smith rakoff,albin michel,récit d'apprentissage,autobiographie,roman sur une rencontre avec salinger

    J'avais remarqué dès sa sortie, ce titre de la rentrée littéraire mais il a fallu l'avis d'un blog (je ne sais plus lequel et je m'en excuse) et celui de ma collègue Mathilde pour que je me lance.

    J'ai immédiatement été happée par ce récit d'apprentissage et par les premières phrases d'introduction, qui m'ont évoqué l'atmosphère du réussi Rien n'est plus beau de Rona Jaffe.

    Alors qu'elle était censée préparer un doctorat et rejoindre son petit ami de la fac à Berkeley, Joanna a décidé de tout abandonner et de revenir à New York. Là, elle a été engagée comme assistante de la patronne d'une agence littéraire.

    Une agence littéraire désignée tout au long de cet essai romanesque par le terme de l'"Agence". J'ai aimé l'impersonnalité de ce terme, tout à fait en décalage avec ce lieu, arrêté dans le temps. Même si la modernité et les ordinateurs commencent à entrer dans le quotidien des entreprises, cette boîte reste accrochée aux pratiques du dictaphone et de la machine à écrire et fête l'arrivée d'une photocopieuse comme un événement extraordinaire. Comme si elle ne pouvait pas oublier les pratiques éditoriales des années 50 et 60.

    Sur cette Agence, règne une patronne atypique. Une femme qui crie sans cesse au téléphone et qui ne semble s'occuper d'aucun auteur, à l'exception de "Jerry". J'ai lu que certains avaient comparé ce roman au Diable s'habille en Prada mais je n'ai pas trouvé de ressemblance entre les deux employeuses.

    Et bien entendu, sur cette Agence, plane l'ombre de "Jerry" Salinger. On guette ses coups de fil, on espère qu'il acceptera de publier sa nouvelle dans cette toute petite maison d'édition et surtout, on attend une visite.

    Comme Joanna, je n'ai jamais eu d'époque Salinger à l'adolescence. J'ai tenté de commencer L'attrape-coeur au début de la vingtaine mais je n'ai pas accroché. Pourtant, en refermant ces pages, je n'ai qu'une envie: renouveller l'expérience.

    Car cet ouvrage se révèle une très belle déclaration à cet auteur et à ses personnages. Des personnages tous marqués par le deuil et en errance. Des personnages qui semblent trouver un écho dans tous ceux que croise Joanna lors de cette année particulière. On sent toute l'importance de cette rencontre dans la vie de cette écrivain et c'est là justement que le titre trouve toute sa justification.

    A cet hommage à l'auteur américain se superposent une radioscopie du New York de la fin des années 90 et du monde des agences littéraires. Ou comment de jeunes de 20-30 ans, malgré des salaires de misère, des appartements-taudis...se battent pour rester dans cette ville qui les fascine tant et essayer de percer dans le monde de la littérature.

    Cependant, je dois confesser que je suis restée un peu en retrait. Alors que généralement, je m'attache aux personnages, je n'ai pas réussi à le faire avec Joanna. Finalement, ce qui m'a le plus intéressé chez elle, c'est son rapport à l'Agence, à Salinger, ce mythe qui continue de recevoir des lettres quotidiennes, et à son travail. Ses errances, ses doutes sur sa relation avec Don...m'ont moins passionnée.

    Bref, vous l'aurez compris: Mon année Salinger constitue un récit d'apprentissage prenant dont la trajectoire littéraire m'a plus concernée que le volet personnel.

    Albin Michel, 2014, 357 pages, 20,90 €