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humour

  • Tir aux pigeons de Nancy Mitford

    Tir aux pigeons

    de

    Nancy Mitford

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    "Sophia Garfield avait une vision claire de à quoi ressemblerait la guerre. Il y aurait une grande détonation, suivie d'une obscurité d'encre et d'un vent froid. Trébuchant sur des tas de décombres et de cadavres, Sophia chercherait avec application, mais sans espoir son mari, son amant et son chien."

    Sophia Garland a toujours imaginé la guerre comme une sorte de fin du monde aux allures de Derniers Jours de Pompei, où elle tiendrait un rôle dramatique à souhait. Héroïne éplorée qui tente de retrouver ses proches ensevelis.

    Finalement, quand le conflit éclate, elle se révèle assez déçue. Rien ne semble changer dans son existence de privilégiée. Elle partage toujours des dîners avec son amant, son mari et la maîtresse de ce dernier.
    Elle subit les sermons de la Boston Brotherhood, la nouvelle religion qui semble animer son mari.
    Elle écoute les plans politiques de ses amis Fred et Ned.
    Elle rejoint de temps en temps son parrain Ivor King, chanteur idolâtré.

    Mais les discours de son ennemie la princesse Olga sur ses activités d'espionne la poussent à infléchir le cours de son destin. Et elle s'engage dans un poste de secours.
    Sans savoir que ce choix va marquer le début d'aventures rocambolesques.

    Tir aux pigeons a été écrit à Noël 1939. Ce qui explique sans doute à quel point ce récit autour de la Seconde Guerre se pare de fantaisie.

    Même si la fantaisie et l'ironie ont toujours fait partie pour moi du style de Nancy Mitford. Elle a un don tout particulier pour croquer ses pairs et en faire des personnages aux reliefs si drôles et si percutants.
    Le chanteur Igor aux perruques incroyables, les membres de la Boston Brotherhood ou la princesse Olga en sont de très bons exemples.

    De même, son humour affleure dans de nombreuses situations ou de nombreux dialogues. Sens du décalage. Choix de mots toujours ciselés qui marquent et font sourire au détour d'une phrase.

    L'intrigue se déroule tambour battant. Meurtre, mystère, enlèvement..rythment ainsi une partie de l'histoire et transforment Sophia en espionne malgré elle. Ce qui donne l'occasion de nombreux rebondissements facétieux.

    Mais, derrière ce vernis léger, se dissimulent quelques vérités graves. Le soutien de certains au régime nazi. Le bourrage de crâne par radios interposées. Les entraînements dans les postes de secours. Répétition pour de terribles futurs.

    Comme si Tir aux pigeons avec ses allures de guerre d'opérette se permettait un dernier sursaut de désinvolture avant le terrible après.

    Bref, vous l'aurez compris: même s'il ne constitue pas mon roman préféré de l'autrice parmi ceux que j'ai déjà découverts, je garderai un bon souvenir de cette lecture et du plaisir de retrouver la plume de Nancy Mitford.

    Christian Bourgeois, 2013, 204 pages

     

  • Sacrées sorcières de Pénélope Bagieu

    Sacrées Sorcières

    de

    Pénélope Bagieu

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    La bande dessinée s'ouvre sur une scène qu'on croirait tout droit sorti d'un film de super-héros, la lutte entre une sorcière aux allures de la méchante sorcière de l'Ouest et un super-héros. Jusqu'à ce qu'un chien volant semble sur le point de régler le conflit. Mais le lecteur restera en suspens face à cet incroyable combat.

    En effet, le jeune garçon à l'origine de cette séquence d'anthologie vient d'être ramené à la réalité par sa grand-mère. Elle lui propose une glace pour oublier momentanément la tristesse liée à l'enterrement de ses parents, décédés dans un accident. Et le soir venu, elle lui raconte des histoires de sorcières. Des histoires qui, selon elle, se sont réellement déroulées. Des enfants auraient ainsi disparu suite à leur rencontre avec ces êtres fantastiques. Elle lui confie aussi les moyens de les reconnaître. Quelques temps plus tard, tous deux partent pour un séjour à la mer. Et  voilà notre héros qui lors d'une excursion dans les couloirs de l'hôtel, se retrouve enfermé au milieu d'un congrès de sorcières. Dissimulé derrière un paravent, il découvre avec horreur que leur chef, la grandissime sorcière, a fomenté un terrible plan pour que tous les enfants soient exterminés.
    Parviendra-t-il à déjouer le complot ?

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    Petite, Roald Dahl fait partie de ces auteurs dont j'ai lu quelques titres avec beaucoup de plaisir. Je me souviens notamment d'heures merveilleuses passées en compagnie de Charlie et de Matilda. Mais je n'avais jamais eu l'occasion de parcourir Sacrées sorcières. J'ai réparé cette erreur avec cette adaptation graphique par Pénélope Bagieu.

    Réussir à adapter un classique tout en continuant à instiller de sa personnalité artistique peut se révéler une gageure. Ici, j'ai trouvé le pari relevé. J'ai apprécié les dessins tout en rondeurs, truffés de références aux films comme le Magicien d'Oz, Catwoman ou à une Nounou d'Enfer avec cette grand-mère, sosie de Yeta.

    J'ai été frappée par le dynamisme de la narration. Le choix des découpes de cases, les dialogues, la fragmentation de l'histoire : tout invite en permanence au mouvement.

    Pour autant, l'humour, parfois noir, si cher à Roald Dahl,  demeure bien prégnant.  Je me suis souvent surprise à sourire voire à rire au fil des pages.

    Il y a également une certaine dose d'émotion, notamment dans la relation entre le héros et sa grand-mère et cette peur viscérale de voir l'autre disparaître. Comme s'ils étaient désormais les remparts l'un de l'autre face à la solitude et au vide.

    Bref, vous l'aurez compris : une oeuvre réussie que je ne peux que vous recommander et qui confirme une fois encore le talent de Pénélope Bagieu. 

    Editions Gallimard, 2020

  • Rendez-vous avec le crime de Julia Chapman

    Rendez-vous avec le crime

    de

    Julia Chapman

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    "Brouillard. Brume. Ou même bruine. Un nuage épais s'enroule comme une écharpe autour du réverbère de la gare, assourdit sa lueur. Sortis de nulle part, des rails jumeaux émergent de la purée de pois, tandis que le néant avale doucement le bout du quai. L'endroit se trouve trop loin de la mer pour que ce soit le haar ou le fret-comme on appelle localement la brume marine apportée par le vent d'est-mais quel que soit le nom qu'on lui donne, cela confère à l'ombre sombre de ce début de matinée des relents de mort."

    Richard Hargreaves attend sur un quai de gare, au petit matin. Mais, au moment où arrive son train, une ombre surgit dans son dos et le pousse sur la voie. Personne n'a assisté à ce crime et tout le monde est persuadé que le défunt s'est suicidé. Tout le monde....sauf ses parents. Sa mère profite du retour de Samson O' Brien, un ancien flic, qui a décidé de se lancer dans une carrière de détective et d'ouvrir une agence dans son village natal. Elle lui confie sa première enquête et le conjure de trouver la vérité.

    Notre héros se lance donc à corps perdus dans son investigation. Richard Hargreaves n'est pas le seul mort récemment. Un randonneur et un ouvrier agricole ont aussi péri dans ce qui semble être des accidents.

    Le point commun de ces trois hommes: tous les trois se sont inscrits au même site de rencontres amoureuses et ont participé au même speed dating. Ce site est tenu par Delilah, la propriétaire du local de l'agence de détectives. Une ancienne amie de Samson qui nourrit de forts ressentiments à son égard.

    Pourtant, ils vont conjuguer leurs forces et tenter tous les deux de comprendre qui frappe les membres du site.

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    Comme vous le savez peut-être déjà, j'aime beaucoup les aventures d'Agatha Raisin. J'en ai déjà parlé d'ailleurs à plusieurs reprises sur le blog. Aussi, quand j'ai vu qu'une nouvelle série, dans l'esprit "cosy mystery" allait être publiée à la Bête noire, j'ai été ravie. Je tiens à remercier les éditions Robert Laffont pour leur envoi. Aussitôt reçu, aussitôt entamé.

    Pour tout vous confesser, j'ai mis quelques chapitres à entrer pleinement dans l'intrigue. En effet, malgré la scène choc du prologue, j'ai trouvé que l'histoire tardait à prendre de l'ampleur. En revanche, dès que cela a été le cas, j'ai été captée et je n'ai pas pu m'arrêter.

    Cette entrée en matière un peu plus ardue tient sans doute au caractère introductif de ce tome. Comme il s'agit du premier livre, nous sommes invités à faire connaissance avec tous les personnages et avec Bruncliffe, leur village du Yorkshire. Il faut prendre la mesure de chacun et s'habituer à ce nouveau lieu. Une fois tous ces éléments posés, l'envie de rester là-bas avec toute la communauté se fait tellement forte que les dernières pages se tournent à regret.

    Dans cette enquête, il y a deux héros: Samson et Delilah. J'ai jugé ce choix de prénoms intéressants car il m'a fait penser à la Bible. Et je me demande si, comme dans cette histoire, Delilah va trahir Samson et choisir le camp de ses ennemis. Ou, au contraire, si l'autrice va prendre le contrepied de cette légende et en faire une alliée de Samson, envers et contre tout.

    Tout part mal entre eux au début de cet ouvrage. Samson, sorte de fils prodigue, est parti il y a des années du village et il n'est jamais revenu, malgré la mort de son meilleur ami, le frère de Delilah. Tout le monde, à commencer par notre héroïne, le considère comme un traître. En découlent certaines scènes villageoises très drôles.

    Mais, sans le savoir, Delilah a accepté Samson comme locataire de son rez-de-chaussée. Cette proximité forcée va les rapprocher. Tout sonne juste entre eux et on sent que Julia Chapman se réserve le droit d'explorer plusieurs pistes relationnelles dans les opus suivants. J'ai hâte de savoir ce qu'ils deviendront l'un pour l'autre.

    Autour d'eux, gravite toute une galerie de protagonistes savoureux. Certains ne sont encore qu'esquissés, d'autres, au contraire, sont approfondis. Je pense notamment à Ida Capstick, la femme de ménage de Delilah. Elle m'a fait beaucoup rire et j'apprécie sa générosité bourrue.

    Pour nous dérouler le fil de son intrigue, l'autrice a choisi une structure narrative chorale. Même si on entend surtout les points de vue de Samson et Delilah, se greffent parfois ceux d'Ida, de certaines victimes ou même du meurtrier. Ainsi, le lecteur est toujours tenu en haleine et il en apprend plus sur chacun de ses narrateurs.

    L'équilibre entre mystère et humour est bien respecté. Aux scènes comiques se succèdent des séquences qui relancent l'enquête. Celle-ci m'a semblé maîtrisée. Cependant, je dois confesser que, vers la fin, je me doutais de l'issue et mes suspicions se sont avérées justes.

    De même, la description de la vie dans un petit village constitue une réussite. On sent bien le poids de la communauté (dans le rejet quasiment en bloc de Samson dans les premiers chapitres) et en même temps, le soutien qu'elle représente pour ceux qui en font partie. Le chemin des rumeurs est également dépeint avec beaucoup de véracité. Tout comme les événements qui rythment les semaines à Bruncliffe (le tournoi de fléchettes)

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai vraiment passé un très bon moment avec Samson et Delilah et j'ai hâte de les retrouver dans un prochain titre. Si, comme moi, vous êtes fans de résolutions de meurtres à l'heure du thé et d'humour so british, n'hésitez pas à prendre ce rendez-vous avec le crime.

    Robert Laffont, 2018, 383 pages

    Billet dans le cadre d'une lecture commune avec mon amie Bianca