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livre de poche - Page 3

  • Jézabel d'Irène Nemirovsky

    Jézabel

    un roman d'Irène Nemirovsky

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     "Une femme entra dans le box des accusés. Elle était belle encore, malgré sa pâleur, malgré son air hagard et las: seules, les paupières, d'une forme délicieuse, étaient fanées par les larmes et la bouche affaissée, mais elle paraissait jeune. On ne voyait pas ses cheveux cachés sous le chapeau noir.

    Elle porta machinalement ses deux mains à son cou, cherchant, sans doute, les perles du long collier qui l'avait orné autrefois, mais son cou était nu; les mains hésitèrent; elle tordit lentement et tristement ses doigts, et la foule haletante qui suivait des yeux ses moindres mouvements fit entendre un sourd murmure."

    Gladys Eysenach comparaît pour le meurtre de Bernard Martin, un jeune étudiant de vingt ans. Elle lui aurait tiré dessus la nuit de Noël, dans sa chambre. Tout semble indiquer un crime passionnel.

    Défilent à la barre des témoins sa femme de chambre, son fiancé, son amie...L'accusée entend leurs propos, subit leurs attaques...Jusqu'au verdict du jury.

    Reviennent ensuite ses souvenirs, de son entrée dans le monde à cette veillée fatale.

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    Jusqu'à présent, je n'avais lu qu'un roman d'Irène Nemirovsky: Suite française. Un ouvrage qui m'avait bluffée tant par sa construction que par son style. Aussi, quand Martine a publié un très beau billet sur ce titre, elle a suscité mon envie de replonger dans l’œuvre de cette auteure.

    Jézabel s'ouvre dans un tribunal. Une procédure pénale à l'encontre de l'héroïne comme prologue. Des voix qui s'entremêlent pour dire leur vérité sur Gladys Eysenach.

    Se dessine ainsi le portrait d'une femme qui ne fait pas son âge et qui a cherché toute sa vie les plaisirs de l'amour. Mais pourquoi a t elle tué celui que tout le monde semble désigner comme son amant?

    "Ma Mère Jézabel devant moi s'est montrée"

    Difficile cependant de se faire une idée du véritable caractère de celle que tout condamne et des motivations derrière son acte.

    Puis, le chapitre premier débute. Et le lecteur est invité à suivre le destin de Gladys.

    "Il reste toujours au fond du cœur le regret d'une heure, d'un été, d'un court moment, où l'on atteint sans doute le point de floraison"

    Ce point de floraison, c'est une saison. Celle de ses débuts, à dix-huit ans, où elle découvre sa beauté et où elle constate le pouvoir de séduction qu'elle exerce sur les hommes.

    Un acte fondateur dont va découler tout le reste de son existence. Car notre protagoniste refuse les ravages du temps sur son physique et sur l'attrait qu'elle peut avoir. Elle a sans cesse besoin de sentir les regards admiratifs sur elle.

    Une obsession qui va la conduire maintes fois à des drames personnels. Une obsession qui va aussi pervertir son rapport avec sa fille.

    Irène Nemirovsky brosse donc le portrait cruel d'une femme qui ne se définit que par le désir des autres. Au risque de tout perdre et de commettre le pire.

    Les pages se tournent toutes seules, on est souvent choqués par le comportement de cette Jézabel. Et en même temps, envahis à plusieurs reprises par une certaine pitié.

    Outre son style percutant, cette œuvre frappe par sa profonde modernité, sa réflexion sur le diktat des apparences qui conduit parfois à la folie et par le choix d'une héroïne que l'on plaint mais que l'on déteste surtout.

    Bref, vous l'aurez compris: même si je n'ai pas eu le même coup de cœur que pour Suite française, j'ai été marquée par ce court et sombre roman.

    Le Livre de Poche, 217 pages

     

  • Une femme d'imagination et autres contes de Thomas Hardy

    Une femme d'imagination et autres contes

    de

    Thomas Hardy

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    "Longtemps, j'ai rêvé d'un tel être inaccessible, comme tu le sais; elle a d'ailleurs cette introuvable, cette insaisissable été l'inspiratrice de mon dernier recueil: la femme imaginaire, elle seule, car, en dépit des propos répandus dans tel ou tel cercle, il n'existe pas de femme réelle derrière le titre. Jusqu'au bout, elle est demeurée indévoilée, inconnue, inconquise."

    Ce recueil, je l'ai choisi en raison de sa magnifique couverture. Et parce que le titre m'intriguait. Puis, je me suis laissée happer par ces quatre destins de femmes.

    Une jeune fille rencontre un hussard de la Légion germanique.

    Une autre subit la loi de son fils.

    Une troisième tombe sous l'emprise d'un violoniste.

    Une dernière se languit d'un homme jamais rencontré, un poète comme elle, qui a habité dans sa location de vacances.

    Autant de variations pour montrer qu'il n y a pas d'amour heureux.

    Chacune de ses héroïnes, à sa manière, en fait la douloureuse expérience.

    En très peu de pages, on suit leurs aspirations, leurs rêves, leurs désirs, leurs déceptions.

    La plume de Thomas Hardy se montre tour à tour sensible et pudique pour nous retranscrire toute la gamme des sentiments par lesquels Phyllis, Sophy, Caroline et Ella passent.

    Elle sait insuffler de la vie aussi, comme si les scènes survenaient devant nos yeux.

    On entend des cœurs battre et se briser.

    On assiste à une scène dans une auberge où la musique prend possession des âmes.

    On compte les heures avant une visite, comme si celle-ci allait changer le cours de notre vie.

    On est sur un quai de gare à guetter l'arrivée de l'aimée, parmi les passagers...

    Je pourrais continuer la liste de tous ces moments décisifs où les destins basculent. Tous ces moments où le monde se révèle dans sa brutalité et broie tout espoir.

    L'art de la nouvelle est un exercice difficile, je trouve, et je sors parfois déçue de mes lectures de recueils car j'ai une sensation de trop peu, de chutes inabouties.

    Ici, il n'en est rien. Chaque récit (même si j'ai eu une préférence pour le dernier éponyme) m'a semblé très fouillé, m'a plu et m'a émue.

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai quitté à regret cet ouvrage et je pense que je ne tarderai pas à me replonger dans l'univers de Thomas Hardy.

    Le Livre de Poche, 153 pages

    Billet dans le cadre du challenge A year in England organisé par Titine

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  • Bérénice 34-44 d'Isabelle Stibbe

    Bérénice 34-44

    de

    Bérénice Stibbe

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    "Elle ne racontera pas les regards entendus, les sourires de connivence. "Il n y a pas de hasard", "C'était forcé", autant de formules attrapées au vol des centaines de fois, inaugurant la légende familiale selon laquelle l'appel du théâtre, qui fondit sur elle à six ans et qui dès lors ne la quitta plus, surgit de son prénom: Bérénice."

    Depuis son plus jeune âge, Bérénice Kapelouchnik, dite Capel, est éblouie par le monde du théâtre. Elle rêve même d'embrasser la carrière de comédienne mais se heurte à la résistance de ses parents. Bravant leur interdit, elle passe le concours du Conservatoire à tout juste 15 ans. Reçue première, elle quitte le foyer familial pour vivre sa passion.

    Des cours de Louis Jouvet à la scène de la Comédie française, il n y a qu'un pas....Et Bérénice de Lignières (le nom qu'elle s'est choisie) semble rencontrer tous les succès...

    Mais l'Histoire va la rattraper...Et, en ces heures sombres d'Occupation, il faut bien savoir choisir son camp...

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    Ce premier roman, je l'avais remarqué sur le blog de ma copinaute Bianca. Aussi, quand il est arrivé à la médiathèque, j'ai eu très envie de m'y plonger.

    Dès les premières pages, j'ai été happée par l'intrigue.

    Avec beaucoup de talent, Isabelle Stibbe retrace le parcours fictif d'une jeune femme dans l'univers théâtral. On la suit ainsi de ses premières auditions à ces premiers cours, de ses premières figurations à ces premiers rôles....Cette ascension fulgurante, elle la doit non seulement à sa beauté, mais à son talent. Et à son amour hors normes pour la scène.

    "Écoute Comédie-française, fais que je sois engagée, tu es la seule, l'unique, pour toi je sacrifierai tout, jeunesse, famille, enfants, qu'importe si tu me permets d'accéder à toi, de faire partie des tiens."

    Une religion du théâtre qui sert de fil conducteur à toute l'action de cet ouvrage. Rencontres, choix personnels, engagement: tout dépend des dieux de la comédie et de la tragédie.

    On est forcément fascinés par ce jusqu'au boutisme, ce sacrifice perpétuel pour l'art, cet égoïsme aussi dans ses relations...

    Car Bérénice ne laisse pas indifférent ceux qui l'entourent. De son père Maurice Capel au poète/avocat Alain Béron, en passant par Nathan Adelman, le compositeur, tous se brûlent à la flamme de ce papillon incandescent.

    Sur sa trajectoire, notre héroïne croise également de grands noms tels que Louis Jouvet, Marie Bell, Véra Korène, Marc Allégret...

    L'occasion pour notre auteur de brosser un tableau du monde artistique de cette période charnière. Et de nous montrer l'évolution de la Comédie-française lors de l'Occupation.

    Car ce théâtre/refuge pour Bérénice peut se transformer en monstre. En effet, très vite, des questions se posent au sein de cette institution: faut-il accepter le diktat des Allemands, à savoir l'absence de Juifs dans les distributions? Doit-on renoncer à des grands noms pour ré-ouvrir?  Chacun doit faire ses choix.

    Amour de la scène, engagement de l'artiste, attentisme, résistance, politiques d'exclusion des Juifs constituent donc autant de thématiques de ce roman dense, foisonnant, passionnant, en trois actes.

    Trois actes où la tension dramatique ne cesse de monter...Grâce au déroulé de l'intrigue bien entendu mais grâce aussi au style d'Isabelle Stibbe. Elle se joue de son lecteur en annonçant parfois que Bérénice pourra raconter son histoire à ses enfants ou, au contraire, qu'elle ne pourra pas...Et le dénouement, forcément, surprend...

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai vraiment beaucoup aimé ce portrait de femme confrontée à la tourmente de la Seconde Guerre mondiale.

    Le Livre de Poche, 2014, 355 pages