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the frenchbooklover - Page 149

  • I was Jane Austen's best friend

    I was Jane Austen's best friend

    de

    Cora Harrison

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    "Tuesday, 12 January 1796

    Dearest Jane,

    Yesterday I was up in the attic and discovered a bundle of my old journals-I spent half the night reading this one. I'm sending it to you because I think you will enjoy it too.

    I can't believe how much my life changed in that spring of 1791! It was like coming out of a dark room into bright sunlight. With you as a friend. I learned so much that year-about life,about love-and about how to have fun!"

    Jenny Cooper envoie un de ses anciens journaux intimes à sa cousine Jane Austen: celui de l'année 1791. Une année déterminante où elle a découvert l'amour et la joie d'une famille affecteuse.

    La première entrée remonte au 7 février 1791. Jenny est très inquiète de voir sa cousine délirer sous l'effet de la fièvre. Elle a l'impression qu'elle peut mourir de sa maladie et tente en vain de convaincre Mrs Crawley, la directrice de leur pensionnat, d'avertir Mr and Mrs Austen de son état.

    Elle décide de braver les interdits et sort de nuit à Southampton à la recherche d'une boîte aux lettres. Des marins l'abordent et elle ne doit son salut qu'à l'intervention du Capitaine Thomas Williams qui la raccompagne à son école.

    Deux jours plus tard, elle tombe à son tour malade. Mais sa missive aux parents de Jane est bien arrivée et ils accourent aussitôt au chevet des deux patientes...Ils les ramènent toutes deux à Steventon.

    C'est ainsi que Jenny entame un séjour dans la famille Austen. Un séjour qui va se révéler déterminant pour elle...Et qui va la rapprocher de sa cousine.

    Cela faisait longtemps que j'avais remarqué ce livre et Emmanuelle me l'a très gentiment offert lors du swap VO.

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    Cora Harrison est une auteure irlandaise. Comme peu de choses sont connues sur l'adolescence de Jane Austen, elle a décidé de l'imaginer. Ainsi, elle a repris des personnes ayant réellement existé: la famille Austen, les élèves de Steventon, la cousine Eliza, les voisins les Bigg-Wither, le capitaine Williams, Jane Cooper ( rajeunie et rebaptisée Jenny pour ne pas faire trop redondant...) Et elle s'est inspirée de leur correspondance ou de certaines situations des romans de Jane Austen pour retracer leurs interactions.

    J'ai beaucoup apprécié le schéma narratif. Je trouve que la forme du journal intime se révèle parfaitement adéquate pour restranscrire les émotions de la fin de l'adolescence. On oscille sans cesse entre exaltation, humour, inquiétude, tristesse, jalousie, enthousiasme..Les réflexions se révèlent souvent pleines d'esprit (sans oublier les notes intercalées de Jane Austen) De plus, comme Jenny est douée pour le dessin, le lecteur retrouve au fil des pages des esquisses de toutes les personnes évoquées.

    Cela a été un réel plaisir de plonger dans l'univers de la famille Austen à Steventon. On en apprend ainsi plus sur l'adolescence (parfois supposée) de Jane Austen: ses interactions avec ses cinq frères (dont George, tenu à l'écart par ses parents en raison de son handicap mental), avec ses voisins, son goût pour les bals, son esprit déjà caustique à 15 ans, ses participations aux représentations théâtrales familiales, sa rencontre avec Tom Lefroy...

    De même, on perçoit mieux le quotidien d'une famille anglaise dotée de peu de moyens financiers à la fin du 18ème siècle: les charges qui incombent à chacun, le devoir de faire un bon mariage, les questions sur chaque achat...

    On sent qu'Orgueil et préjugés a influencé la romancière. En effet, Mr et Mrs Austen s'apparentent beaucoup au couple Bennett ; Cassandra à Jane Bennett; Jane à Elizabeth Bennett; Jenny à Catherine Morland (pour son innocence et sa douceur)...

    De plus, à l'instar des livres de Jane Austen, plusieurs intrigues amoureuses se nouent. Notre héroïne se laisse impressionner par quelqu'un qui ne lui conviendrait pas. Avant de faire LA rencontre...Cassandra tombe aussi sous le charme d'un des pensionnaires de son père...

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai passé un excellent moment à la lecture de ce roman, plein d'humour et d'esprit. Il devient même une des mes austeneries préférées. J'espère qu'il ne tardera pas à être traduit en français. En attendant, je me suis déjà commandée la suite: Jane Austen stole my boyfriend.

    MacMillan, 2010, 342 pages

    Billet dans le cadre du challenge Austenien et du challenge La plume au féminin 2013

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  • Autumn de Philippe Delerm

    Autumn

    de

    Philippe Delerm

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    "L'automne est descendu sur le parc de Cheyne Walk. Les arbres ne sont plus des arbres. Infinis dégradés de tous les ors, de tous les roux, de tous les flamboiements secrets gagnés par l'ombre et le poids du passé. Comme la toile peinte d'un théâtre, ils se confondent avec la fin du jour. Octobre, le mot est doux à boire et triste comme un vin de mort, si riche encore du parfum de la vie."

    7 octobre 1869: le peintre Dante Gabriel Rossetti observe l'automne de la fenêtre de sa demeure. Il sait que le soir-même deux de ses relations vont déterrer le cercueil d'Elizabeth Siddal, sa bien-aimée. Dans le cimetière d'Highgate, tout est silencieux quand Howell et Williams ouvrent la tombe. Dedans, repose miraculeusement conservée la muse de Rossetti. Et à ses côtés, le recueil inédit de poèmes du peintre...

    Puis, après cette scène éprouvante, nous replongeons dans l'Angleterre de 1850 à la rencontre d'un groupe de jeunes artistes, les Préraphaëlites.

    "Un groupe d'amis, soucieux d'aller en peinture dans la même direction, en accordant davantage au regard intérieur du peintre qu'à l'exactitude de la réalité, en attachant plus d'importance au naturel qu'à la reproduction figée d'une image conformiste."

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    De Philippe Delerm, je n'avais lu pour l'instant que La première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules. Mais cela faisait longtemps que je voulais plonger dans ce roman autour d'un groupe d'artistes qui me fascinent. Je les ai découverts pour la première fois grâce à Jane Austen (la couverture de Persuasion).

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    Malheureusement, je n'ai pas pu encore admirer en vrai leurs toiles car lors de mon dernier séjour à Londres en mai, elles avaient été envoyées pour une grande exposition à Tokyo. Du coup, cela me fera une bonne raison de retourner dans la capitale anglaise...

    Au fil de pages, le lecteur est invité à suivre la trajectoire de tous ces jeunes artistes: la première génération formée notamment de John Everett Millais, Dante Gabriel Rossetti, Walter Deverett, puis la seconde avec Burne-Jones et Morris.

    Ce voyage auprès des Préraphaëlites de 1850 à 1869 permet de croiser également les personnaités qui ont gravité autour d'eux, à l'instar de la muse Elizabeth Siddal, du critique John Ruskin, de Charles Dodgson (alias Lewis Carroll) qui les a immortalisés par la photographie.

    La structure narrative s'articule autour de courts chapitres, des sortes d'"instantanés" des moments fondateurs de ce mouvement. S'intercalent également de temps en temps des lettres d'Elizabeth...

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    Elizabeth Siddal

    Dès le début de l'ouvrage, on assiste ainsi à une rencontre fondamentale, celle de Deverett et de Siddall. Deverett remarque cette ouvrière dans un magasin de mode et immédiatement,  sait que cette femme est "la vision qui venait incarner leurs rêves".

    "Elle semblait descendre d'un Moyen Age florentin pour habiter son rêve, avec une mélancolie blessée, mais cette inattendue sensualité de sa bouche un peu lourde, finement ourlée, fruit d'automne à la douceur offerte de virginité mystique. Dans ses cheveux dormaient toutes les flammes, tous les secrets d'une Italie brûlée de passions séculaires et dans la blancheur de sa peau tous les ailleurs du Nord"

    Quelques jours plus tard, Deverett présente Siddal au reste de ses amis lors d'une réunion pleine de dissensions. Dès le début, on sent que tous les membres ne partagent pas la même vision. Certains renoncent à l'art, d'autres préfèrent s'adonner au bonheur familial...

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    John Everett Millais

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    Dante Gabriel Rossetti

     Mais l'introduction de Siddal dans le groupe va avoir un impact très fort sur deux des artistes: Millais et Rossetti. Millais va l'utiliser comme modèle pour un de ses tableaux les plus célèbres: Ophélie. Une oeuvre pour laquelle Elizabeth a dû poser pendant des heures dans une baignoire remplie, entourée de bougies.

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    Ophélie de  John Everett Millais

    La jeune femme va également entamer une relation passionnée avec Rossetti. Il va ainsi la représenter dans de nombreuses toiles sous les traits de la Béatrice de Dante. Ils s'installent ensemble avant de se marier des années plus tard, ce qui est immédiatement mal perçu par la famille du peintre et par la bonne société. Leur amour se révèle destructeur: Rossetti trompe la jeune femme, celle-ci se réfugie dans les opiacés. Et s'achève dans le drame avec le suicide de Lizzie au laudanum.

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    Beatrix de Dante Gabriel Rossetti

    D'autres modèles vont la remplacer auprès du peintre: Fanny Conforth et Jane Morris. Mais il conservera toujours une pièce qui lui est consacrée dans son domaine.

    De plus, une autre relation amoureuse qui a défrayé la chronique victorienne est explorée dans ce roman. Il s'agit du triangle formé par John Ruskin-Euphemia Ruskin-Millais. Je ne vous donnerai pas le dénouement, histoire de préserver le suspense.

    J'ai été très intéressée par tous ces éléments biographiques, disséminés sans jamais trop s'appesantir. On apprend beaucoup de détails sur le mouvement, leurs contemporains. Et on ressort avec l'envie d'admirer les tableaux.

    De même, j'ai  apprécié les réflexions sur la condition de l'artiste.

    Est-ce que le bonheur ne compromet pas le talent? Doit-il rester avant tout libre? constituent des questions soulevées par Delerm et évoquées par les peintres au fil de leur existence.

    Ce livre s'attarde aussi sur la place de la femme d'artiste et de la femme-modèle dans la société victorienne. Euphemia Ruskin, Elizabeth Siddal, Christina Rossetti, Jane Morris...en sont autant d'incarnations. On sent la difficulté d'exister face à de tels hommes. Et celle-pour Lizzie-de s'affirmer en tant que démiurge (seul Ruskin la soutient dans ses tentatives picturales)

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    John Ruskin

    On suit aussi les trajectoires de John Ruskin et de Charles Dodgson. Deux créateurs critiqués pour leur relation à l'enfance. Leurs rapports proches avec Rose et Alice ont été très commentés sous le règne de Victoria.

    En revanche, j'ai moins accroché avec le style. Autant j'ai été sensible au lyrisme de la description des paysages, autant certains passages m'ont semblé trop lents (je fais notamment référence aux monologues de Rossetti)

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai beaucoup apprécié le sujet de ce roman, les considérations sur la condition d'artiste et de la femme à l'époque victorienne... Si vous cherchez à découvrir ou à approfondir votre connaissance des Préraphaëlites, n'hésitez pas à vous lancer dans cette lecture.

    Folio, 1999, 306 pages, 7,70 €

    Billet dans le cadre du challenge victorien

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  • La Grande fabrique de mots

    La Grande fabrique de mots

    de

    Agnès de Lestrade;

    illustré par Valeria Docampo

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    "Il existe un pays où les gens ne parlent presque pas. C'est le pays de la grande fabrique de mots."

    Dans ce pays, chaque mot a un prix. Pour pouvoir le prononcer, il faut l'acheter et l'avaler.

    "Au pays de la grande fabrique, parler coûte cher."

    Parfois, on retrouve certains mots dans l'air et les enfants sortent leur filet à papillon pour tenter de les rattraper.

    C'est le cas de Philéas qui, par un jour de grand vent, a récolté dans son épuisette trois mots: "cerise, poussière et chaise". Trois mots qu'il entend conserver précieusement pour le lendemain.

    En effet, il veut les utiliser pour l'anniversaire de Cybelle, la petite fille dont il est amoureux. Il arrive chez elle et dans l'escalier, lui adresse un sourire.

    Malheureusement pour lui, son rival Oscar a pu faire l'acquisition de mots précieux qu'il utilise pour déclarer son amour à Cybelle.

    Philéas prend à son tour une inspiration et "[ses] mots volent vers Cybelle: ils sont comme des cailloux précieux."

    Comment Cybelle va réagir face à ces deux confessions?

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    C'est ce que vous découvrirez en parcourant ce magnifique album. Il est arrivé récemment à la médiathèque où je travaille et son titre m'a aussitôt interpellé.

    J'ai immédiatement plongé dans ce pays où chaque mot revêt un sens et une valeur particuliers. Seuls les riches peuvent formuler de longues phrases. Les pauvres sont contraints de fouiller dans les poubelles, faire les soldes ou récolter les mots qui volent.

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    Dans un tel monde, comment déclarer sa flamme? C'est la question que tente de résoudre Philéas. Est-ce que Cybelle comprendra ce qui se dissimule derrière les mots "cerise, poussière, chaise"?

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    Le texte d'Agnès de Lestrade empreint de poésie nous fait tour à tour rêver, espérer, attendre...A l'aide de peu de mots (une simplicité parfaitement en adéquation avec la thématique de cet album), elle sait toucher le lecteur.

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    De plus, les très belles illustrations de Valeria Docampo se fondent à merveille dans cet univers dictatorial où la tendresse et la douceur peuvent l'emporter. Aux tonalités sombres et grises utilisées pour les riches et les soldats répondent ainsi les teintes chaudes des habits de Cybelle et Philéas.

    Bref, vous l'aurez compris: un très bel album empreint de poésie et de douceur, qui permet de rappeler la valeur des mots.

    Alice Jeunesse, 2009, 12,90 €