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the frenchbooklover - Page 145

  • 3000 façons de dire je t'aime

    3000 façons de dire je t'aime

    de

    Marie-Aude Murail

     

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    "Nous étions trois collégiens de cinquième et nous venions d'horizons si différents que rien ne nous destinait à nous dire un jour je t'aime"

    Bastien, Neville et Chloé sont dans la même classe de 5ème. Grâce à Madame Plantié, leur professeur de français, ils assistent à une représentation de Don Juan. Marqué par ce spectacle, ils décident tous les trois de participer au club théâtre en 4ème et de monter Roméo & Juliette.

    Puis, le destin les sépare et les remet en présence six ans plus tard lors du concours d'entrée au Conservatoire d'art dramatique de leur ville. Ils réussissent tous les trois à intégrer le cours de Monsieur Jeanson.

    Commence alors pour eux une période de découvertes, de nouvelles expériences...

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    Quand j'étais adolescente, je me souviens qu'une de mes meilleures amies vouait un culte à Marie-Aude Murail. Elle avait tout lu et guettait chacune de ses parutions. Malgré son enthousiasme, je n'avais jamais ouvert un de ses ouvrages.

    Une erreur que j'ai réparée lors de ma deuxième année de travail à la médiathèque. Miss Charity venait de sortir et j'ai été immédiatement attirée par le sujet et par les aquarelles de Philippe Dumas. Lorsque je l'ai ouvert, j'ai lu la première phrase. Et je me suis trouvée emportée dans un monde merveilleux dont je n'ai pu m'échapper qu'une fois les derniers mots parcourus.

    Depuis, j'ai rattrapé mon retard. Et j'ai même eu l'immense chance de recevoir cette grande dame de la littérature pour une journée de rencontre avec les classes et les adolescents.

    Vous vous doutez donc bien que quand 3000 façons de dire je t'aime a été disponible en librairie, je n'ai pas résisté longtemps à la tentation.

    J'ai adoré la phrase d'introduction. Tellement accrocheuse et tellement juste.

    Cette fois-ci, la romancière s'est attachée à dépeindre le destin de trois adolescents: Bastien, Neville et Chloé.

    Bastien est le fils des épiciers Vion. Il a été bercé par la télévision populaire dans sa jeunesse et ne supporte pas de fournir le moindre effort. Neville a été élevé par une mère célibataire asthmatique et femme de ménage qui l'a prénommé ainsi en raison d'un film BBC. Chloé vient d'une famille bourgeoise et sous la pression de ses parents, va tenter de réussir en classe préparatoire.

    Ces trois héros vont intégrer la classe de M. Jeanson au conservatoire d'art dramatique de leur ville. Très vite, le vieux professeur va discerner qu'ils correspondent tous trois à des types dramatiques: Neville au héros romantique tourmenté, Chloé à la jeune première fragile et innocente et Bastien au valet de comédie. Il va également comprendre qu'ils ont besoin d'évoluer ensemble et qu'ils sont plus forts à trois.

    C'est pour cette raison qu'il va les pousser à répéter en duo ou en trio. Chaque scène qu'il va leur donner éclaire un pan de leur vie et leur donne la force d'évoluer.

    Le lecteur est ainsi invité à découvrir ou redécouvrir le répertoire classique. Chaque chapitre commence par une citation tirée d'une pièce et on assiste à des bouts de scène. Tout ceci est si savamment distillé qu'on ne peut que refermer le livre avec l'envie de se plonger dans Lorenzaccio, Phèdre...

    Mais ce roman ne rend pas seulement hommage au monde du théâtre. Il dépeint également avec beaucoup de pudeur, de sensibilité et d'humour ce moment-chrysalide que nous traversons tous: le passage de l'adolescence à l'âge adulte.

    De plus, Marie-Aude Murail se révèle encore une fois très percutante dans la présentation de chacun de ses protagonistes, de leur famille et de leur milieu. Chaque mot, chaque situation, chaque description sonnent juste et font mouche.

    Seul bémol: j'ai regretté la fin que j'ai trouvé un peu trop accélérée.

    Bref, vous l'aurez compris: ce roman qui met en scène un trio d'adolescents à la Jules et Jim m'a beaucoup plu. Je l'ai d'ailleurs dévoré en une soirée et j'espère que cette auteure de talent ne tardera pas à publier de nouveau.

    Ecole des Loisirs, 2013, 262 pages, 16 euros

  • Mort à Devil's Acre de Anne Perry

    Mort à Devil's Acre

    de

    Anne Perry

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    "L'agent de police Withers éternua. En ce mois de janvier glacial, le vent venu de la Tamise s'engouffrait en hurlant dans la ruelle sombre. L'aube ne poindrait que dans trois heures, et les becs de gaz des rues avoisinantes éclairaient à peine ce passage lugubre, encombré d'ordures, situé à la limite de Devil's Acre, à l'ombre de Westminster"

    Un médecin est retrouvé poignardé et émasculé dans les rues de Londres.

    L'inspecteur Pitt, chargé de l'enquête, apprend très vite qu'un autre homme a été découvert récemment, éliminé selon le même mode opératoire. Il s'agirait d'un ancien domestique qu'il avait croisé lors d'une précédente enquête chez les Ballantyne et qui, après avoir été chassé, exerçait le métier de souteneur dans le quartier de Devil's Acre.

    Aucun lien ne semble relier ces deux cadavres. Et la situation se complique encore quand un Lord est assassiné de la même manière.

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    Mort à Devil's Acre constitue la septième aventure des investigations de Thomas et de Charlotte Pitt. Cette fois-ci, notre enquêteur se retrouve confronté à un serial killer. Mais sans avoir aucune idée du lien qui peut justifier le choix de ses victimes. D'un côté, un souteneur, ancien valet dans une grande famille et de l'autre, deux hommes d'apparence très respectable: un médecin et un Lord. En fouillant dans leur passé, il va très vite se rendre compte que les trois fréquentaient ou tenaient les maisons de plaisir de Devil's Acre.

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    Le quartier de Devil's Acre

    Cet ouvrage permet donc à Anne Perry d'évoquer un sujet fort tabou de la société victorienne. Comme le rappellent plusieurs protagonistes, la capitale comptait à cette époque 85 000 prostitués. A la suite de Thomas, on découvre les lupanars et on apprend avec étonnement que certaines femmes de la bourgeoisie ou de la noblesse, par ennui ou désœuvrement, acceptaient de vendre leurs charmes.

    J'ai pris beaucoup de plaisir à retrouver le général Ballantyne. Un homme d'un ancien temps qui tente d'évoluer. Un homme qui va, malgré lui, succomber aux charmes de Charlotte.

    Comme beaucoup de mes amies de LC, je n'ai pas apprécié l'évolution de l'héroïne. Alors que je l'ai toujours considérée comme une femme très intelligente, forte, avertie, j'ai eu du mal avec le côté midinette qu'elle adopte quand elle est en présence du général.

    De plus, l'intrigue policière m'a semblé traîner en longueur. Pitt peine à rassembler des indices. Il va de fausse piste en fausse piste. Et, ce n'est qu'à la toute fin qu'il commence à entrevoir la solution.

    Un solution que je n'avais pas du tout anticipée et qui, comme souvent dans cette série ou celle des Monk, débouche sur un dénouement dramatique intense et très prenant.

    Bref, vous l'aurez compris: Mort à Devil's Acre constitue un cru agréable. Une fois encore, Anne Perry démontre son talent à ressusciter l'époque victorienne. Mais j'ai moins adhéré au visage qu'elle donne à Charlotte et à l'intrigue policière qu'elle a concoctée.

    Editions 10/18, collection "Grands détectives", 286 pages

    Billet dans le cadre d'une lecture commune avec Bianca, Céline, Fanny, Sybille et Madcat et des challenges Anne Perry, God save the livre 2013, Victorien et La plume au féminin 2013challenge la plume au féminin.jpg

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  • Et si Virginia Woolf ne s'était pas suicidée?

    Le Jardin blanc

    de

    Stephanie Barron

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    "Octobre 2008, Kent, Angleterre

    Jo Bellamy engagea précautionneusement sa voiture de location dans le rond-point de Slip Road, anticipant de toutes les fibres de son corps l'horrible accident qui n'allait pas manquer de se produire. Comme il ne se produisait rien-par miracle ce tronçon circulaire de chaussée restait libre de chauffards britanniques en cette matinée de fin octobre-elle jeta un regard dans la mauvaise direction, jura à voix basse, puis guetta par-dessus son épaule gauche la première bretelle de sortie de ce cercle particulier de l'enfer"

    Jo Bellamy, une Américaine de 34 ans, est en route pour Sissinghurst, la demeure de Vita Sackville-West. Elle a, en effet, été engagée par les Gray afin de recréer, dans leur propriété, le magnifique Jardin blanc de la romancière.

    Elle espère également trouver dans cette demeure plus d'informations sur son grand-père qui y a travaillé dans sa jeunesse et visiblement, vécu un drame.

    Dans une remise, elle découvre très vite un cahier qui lui aurait appartenu. Mais en l'ouvrant, elle ne reconnaît pas son écriture.

    "N'eût été ce chant d'oiseau, elle aurait pu entrer dans l'eau ce jour-là. Elle cherchait des pierres pour lester ces poches, quelque chose de lourd, elle aurait pu les glisser dans ces bottes. [...]

    L'oiseau ne s'envolait pas. Vie! chantait-il. Vita!

    Elle s'abandonna au son pur et liquide, si différent du bourdonnement métallique des moteurs d'avion. Une grande paix se fit, qui emplit les prairies comme une eau transparente. Elle n'entendait plus les voix belliqueuses, accusatrices, vindicatrices. Elle ne sentait plus les traces de plomb sur les doigts de L. Ses propres chairs flasques. Le désespoir sans fond, lourd comme un cercueil.

    Oui, songea-t-elle. Je dois aller voir Vita.

    Et elle jeta les pierres de sa poche."

    Après avoir parcouru quelques fragments de texte, Jo se demande si elle ne serait pas en présence d'un écrit inédit de Virginia Woolf. Un écrit débuté quelques jours après la date officielle de son suicide. Et si la célèbre romancière n'était pas morte le 28 mars 1941?

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    Cela faisait quelque temps que j'avais remarqué ce roman sur la blogosphère. Aussi, quand ma mère l'a reçu en cadeau pour son anniversaire, je n'ai pas tardé à lui emprunter.

    Je connaissais déjà Stephanie Barron pour ses romans policiers autour de Jane Austen (j'avais beaucoup aimé notamment Jane Austen et le révérend).

    Virginia Woolf s'est suicidée le 28 mars 1941. Elle a rempli ses poches de pierre et s'est jetée dans la rivière l'Ouse, tout près Monk's House, sa maison de Rodmell. Elle avait laissé une lettre à son mari

    " J'ai la certitude que je vais devenir folle : je sens que nous ne pourrons pas supporter encore une de ces périodes terribles. Je sens que je ne m'en remettrai pas cette fois-ci. Je commence à entendre des voix et ne peux pas me concentrer. Alors je fais ce qui semble être la meilleure chose à faire. Tu m'as donné le plus grand bonheur possible. Je ne peux plus lutter, je sais que je gâche ta vie, que sans moi tu pourrais travailler (...)"

    Le 18 avril, son corps était retrouvé.

    Stephanie Barron s'est servi de ces trois semaines de décalage entre le drame et la découverte du cadavre pour imaginer une autre alternative que le suicide du 28 mars 1941.

    Tout commence avec Jo Bellamy, une Américaine de 34 ans bien déterminée à élucider les raisons du récent suicide de son grand-père. Dans les papiers retrouvés après son décès, il faisait mention d'une "Dame" et de Knole.

    Elle entend profiter de la mission confiée par les Gray autour du Jardin blanc pour découvrir ce qui a poussé son grand-père à fuir cette région et à s'engager très jeune.

    Ces efforts se révèlent très vite couronnés de succès. Elle découvre un cahier intitulé "cahier de Jock" mais comprend très vite qu'il ne s'agit pas vraiment de celui de son aïeul mais sans doute d'un inédit de Virginia Woolf.

    Afin de vérifier son hypothèse, elle fait appel à Peter Llewellyn, un expert des anciens manuscrits à Sotheby's. Débute alors une course-poursuite d'Oxford à Cambridge, en passant par Charleston, Monk's House...pour tenter de trouver la fin de ce cahier et comprendre les derniers jours de la romancière.

    J'ai vraiment apprécié cette partie de l'intrigue, dans la lignée de Possession d'AS Byatt. On suit ainsi Jo et Peter dans des lieux fascinants: la Bodléienne à Oxford, la maison des Woolf à Rodwell, celle de Vanessa Bell à Charleston..Cet itinéraire permet de mieux cerner la personnalité de Virginia Woolf et de ses proches. Et donne très envie d'en apprendre encore plus sur elle.

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    Le Jardin blanc de Vita Sackville-West à Sissinghurst

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    Charleston's House, la maison de Vanessa Bell

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    Monk's House, la maison des Woolf à Rodmell

    A chaque étape, correspond une pièce du puzzle. Jusqu'au dénouement final...Un dénouement qui ne m'a pas convaincu. J'ai eu beaucoup de mal à croire à la thèse soulevée par Stephanie Barron.

    De même, je n'ai pas perçu l'intérêt de certaines intrigues annexes: celle entre Jo et Gray, par exemple.

    J'ai aussi trouvé que le style n'était pas toujours à la hauteur du sujet. Les passages du journal intime de Virginia m'ont paru très bien écrits. Mais certains dialogues entre universitaires ou certaines descriptions m'ont franchement déplu.

    Bref, vous l'aurez compris: une lecture en demi-teinte pour moi. Même si j'ai dévoré ce roman, même si j'ai beaucoup apprécié cette visite des hauts lieux de la vie de Virginia Woolf (j'espère la faire prochainement en vrai), j'ai eu du mal à adhérer à certains effets de style ou au dénouement.

    Editions du Nil, 2013, 406 pages, 21 €