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  • Treize raisons

    Treize raisons

    une série Netflix de Brian Yorkey

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    "Salut, c'est Hannah. Hannah Baker. Eh oui! Pas la peine de régler...ce sur quoi tu écoutes ça. C'est moi en direct et en stéréo. Pas de remboursement, pas de bis et cette fois-ci, absolument pas de réclamations. "

    Hannah Baker, une jeune lycéenne, s'est suicidée quelque temps auparavant. Clay Jensen, un de ses camarades de classe, semble avoir du mal à se remettre de sa mort. Un soir, il trouve devant sa porte une boîte à chaussures. A l'intérieur: 13 cassettes audio. Il se met à écouter la première et reconnaît la voix de la disparue.

    "Mange un truc. Installe-toi.

    Parce que je vais te raconter l'histoire de ma vie.

    Plus précisément, pourquoi ma vie s'est arrêtée.

    Et si tu écoutes cette cassette..., tu en es une des raisons. "

    13 cassettes pour 13 raisons que nous allons découvrir en compagnie de Clay Jensen au fil de ces 13 épisodes.

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    Cette nouvelle série Netflix, je l'attendais avec impatience. Parce que j'avais beaucoup apprécié le roman de Jay Asher dont elle est adaptée/Parce que j'étais curieuse aussi de voir comment ce sujet à la fois si douloureux et si nécessaire du harcèlement et de ses conséquences allait être traité sur petit écran.

    En soi, le sujet du harcèlement au lycée n'est pas novateur. On le retrouve dans beaucoup de "teen movies" mais il y est plus souvent abordé de manière optimiste car les héros s'en sortent, après maintes péripéties.

    Là, il n'en est rien. Dès les premières images, on assiste à la chronique d'une mort annoncée et au mécanisme implacable qui a conduit au décès d'Hannah Baker. Un peu comme dans une tragédie grecque où les personnages principaux tentent de s'affranchir de leur destin et échouent. Il en va de même pour notre protagoniste qui voit toutes ses portes de sortie se fermer les unes après les autres.

    "Si ça s'était passé autrement, ça ne serait peut-être jamais arrivé"

    Voici une question lancinante qui revient tout au long du visionnage, aussi bien chez le spectateur que chez ceux qui écoutent les cassettes, transformés en audience malgré eux. J'ai beaucoup aimé cette idée du double niveau d'écoute car elle nous permet encore plus de nous identifier aux autres qui ne sont pas forcément nous mais dont certaines lâchetés humaines peuvent faire miroir avec les nôtres (je n'évoque bien entendu que les raisons les moins "graves").

    Cette assimilation peut donc jouer le rôle d'un électrochoc pour le public et servir le propos didactique de cette série, à savoir la lutte contre toutes les formes de harcèlement.

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    Mais il ne faut pas réduire Treize raisons à la nécessité de se battre et de porter secours à ceux qui sont plongés dans la solitude par des bourreaux ordinaires.

    Non, cette série constitue également à une enquête. Une enquête sur tous les crimes qui ont pousséHannah Baker au suicide. A l'inverse du roman qui se concentrait sur le contenu des cassettes et l'impact sur Clay, la série permet de développer les interactions entre tous ceux concernés au premier plan et d'accroître le suspense. On pressent parfois la gravité de certains rebondissements mais on ne les devine jamais tout à fait.  On s'interroge aussi sur qui détient vraiment la vérité: Hannah? les autres? un peu des deux? De même, on mesure mieux l'impact du geste de l'héroïne et comment sont gérés la douleur et la culpabilité par son entourage.

    J'ai bien aimé ce parti pris narratif, même si je dois avouer que je n'ai pas toujours été convaincue par la pertinence de certains ajouts. Je pense notamment à certaines scènes entre le directeur et le conseiller dans les toilettes ou celle entre un professeur et le même conseiller. Peut-être est-ce dû à la prestation de ces acteurs...Qui ne m'ont pas toujours semblé justes.

    En revanche, le casting "adolescent" est incroyable. Tous, avec en tête Dylan Minette (Clay) et Katherine Langford (Hannah Baker), incarnent à merveille leurs personnages. J'ai également été bluffée par Kate Walsh, la mère d'Hannah qui aurait pu en faire trop dans le registre de la douleur mais demeure impeccable en femme broyée par le chagrin et minée par les doutes.

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    Malgré sa tonalité profondément tragique, 13 raisons parvient à offrir de belles séquences, un peu comme si elles épousaient les battements du cœur d'Hannah, toujours sur le fil de l'espoir. Je fais notamment référence à celles entre Hannah et Clay, dans le cinéma où il travaille ou aux après-midis "chocolat" avec Jessica et Alex au Monet. On se laisse prendre nous aussi au jeu et on espère, malgré tout...Et la chute n'en est que plus terrible.

    Bref, vous l'aurez compris: je ne peux que vous recommander cette série, sans faux-semblants, autour du harcèlement et qui parvient, malgré son sujet douloureux, à ménager quelques ilots de poésie.

    13 raisons, Netflix, 2017, 13 épisodes


     

     

     

  • La Conspiration du globe de Thierry Bourcy et François-Henri Soulié

    La Conspiration du globe

    de

    Thierry Bourcy et François Henri-Soulié

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    "N'eût été la violente querelle qui éclata au cours du quatrième acte entre deux marchands de chevaux, pris de boisson, la représentation d'Hamlet pouvait être considérée comme un succès. Les spectateurs avaient ri aux bons endroits, hurlé en vain pour sauver Polonius et frémi à l'arrivée du fantôme. Quand aux deux invités exceptionnels de Shakespeare, deux princes venus du Danemark, ils avaient semblé fascinés par la pièce."

    En ce début du mois de mars 1603, les émissaires Rosencrantz et Guildenstern ont été envoyés par le roi du Danemark pour mener à bien des négociations secrètes avec la reine Elizabeth I. A la demande de William Shakespeare, rencontré dix ans auparavant, ils ont assisté à la représentation d'Hamlet où le dramaturge a créé deux personnages éponymes.

    Justement, à la suite d'une méprise, les deux comédiens interprètes de ces rôles sont retrouvés morts dans les coulisses. Afin de faire la lumière sur ce double assassinat, la reine réquisitionne Lord Dawson, le commandant de sa garde, et dépêche Lady Dorchester, une de ses dames de compagnie, à Prague pour chercher le capitaine Kassov. Ce dernier s'était distingué dans la résolution du crime du prince Tsycho Brahé et la souveraine tient à mettre toutes les chances de son côté pour enrayer la crise diplomatique qui couve.

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    Je n'avais pas lu Le songe de l'astronome, le premier volet des aventures du capitaine Kassov. Mais, en parcourant les allées de Gibert Jospeh avec mes copinautes Titine et Emjy jeudi dernier, j'ai immédiatement été attirée par le ce titre. En effet, j'espère pouvoir visiter ce fameux théâtre lors de mon prochain séjour londonien. Aussitôt acheté, aussitôt lu.

    J'ai été ravie de retrouver cette période de l'histoire qui m'a toujours fascinée. Contrairement à la série des Marston dont j'avais précédemment parlé sur le blog, ce roman se situe dans le dernier mois de l'existence de la reine Elizabeth I. Désormais, au Conseil, elle s'appuie sur le fils de son fidèle Sir William Cecil, sir Robert qu'elle a surnommé méchamment le "Pygmée" et dont elle admire les qualités politiques. Lors de plusieurs scènes, notamment dans la salle du Trône , le lecteur est convié à partager le point de vue royal. Ne serait-ce que lors des épineuses négociations avec le Danemark.

    Cependant, l'aspect gouvernemental n'est pas le seul thème abordé. En effet, les deux auteurs ont pris le parti de s'attarder sur un des fleurons du règne d'Elizabeth I, à savoir le théâtre. Lors d'une représentation  d'Hamlet, deux comédiens sont tués. L'occasion pour le lecteur de mieux découvrir le fonctionnement du Globe, le rythme des représentations, les répétitions, les interactions entre Shakespeare et sa troupe... J'ai beaucoup apprécié toute cette partie et mon envie de visiter ce lieu artistique n'a fait que croître.

    Pour lier ces deux aspects, politique et artistique, Thierry Bourcy et François-Henri Soulié ont eu recours à un habile procédé narratif: un double meurtre par méprise des protagonistes des deux princes danois. Comme si la création du dramaturge lui échappait et prenait vie en réservant le même sort aux deux émissaires du roi du Danemark, Rosencrantz et Guildenstern. Ce ressort de l'intrigue m'a bien plu.

    Néanmoins, je regrette que les deux auteurs n'aient pas réussi à brosser des personnages aussi intéressants que leur description de l'époque. Peut-être est-ce dû à la multiplicité des figures dépeintes. Certains sont esquissés avec plus de soin et retiennent davantage l'attention, tels que Lady Dorchester qui m'a fait penser à la Milady de Dumas. D'autres, même s'ils sont présentés par quelques détails pittoresques, ne suscitent pas le même intérêt. Par exemple, je suis complètement passée à côté du neveu du capitaine, Matteus, dont le côté jeune premier trop accentué, ne m'a pas convaincue.

    Quant à l'histoire policière, elle sert plus de prétexte finalement à plonger le lecteur dans cette Angleterre du début du 17ème siècle, à la fin d'un règne et d'en saisir l'atmosphère, sur fonds de conspiration et d'instabilité.

    Bref, vous l'aurez compris: la Conspiration du Globe m'a permis de passer un moment de lecture agréable et je me laisserai peut-être tenter par les prochaines aventures de Kassov.

    Editions 10/18, 2017, 258 pages

    Billet dans le cadre du challenge de Titine A year in England.

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  • Le Groupe de Jean-Philippe Blondel

    Le Groupe

    de

    Jean-Philippe Blondel

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    "Avant cette année, je n'avais jamais mêlé mes deux professions-enseignant et romancier. Elles étaient deux tenues différentes que j'enfilais au moment opportun. Je pensais qu'il était impossible de les cumuler. Et puis en octobre dernier, un soir, alors que ma collègue de philosophie, Marion Grand, et moi prenions un café dans la salle des profs, après une journée particulièrement éprouvante, elle m'a demandé pourquoi je n'avais jamais organisé d'atelier d'écriture ici, dans cet établissement dans lequel j'enseigne depuis vingt ans"

    Suite à la demande de Marion Grand, sa collègue de philosophie, François Roussel, à la fois enseignant et écrivain, se retrouve à animer un atelier d'écriture avec quelques terminales volontaires. Ainsi, durant cinq mois, deux professeurs et dix élèves vont se réunir une heure par semaine dans une salle pour écrire. Au fil de ces séances pas comme les autres, des liens se nouent, des masques tombent...et une sorte d'intimité se crée entre ces personnes jusqu'alors inconnues.

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    J'attends toujours avec plaisir une nouvelle parution de Jean-Philippe Blondel et j'ai été particulièrement ravie de le retrouver avec ce titre autour d'un sujet qui m'interpelle. Je n'ai encore jamais assisté à un atelier d'écriture et j'hésite à franchir le pas. Alors, forcément, quand un roman s'attarde sur une telle expérience, je suis intéressée.

    Pour parler de ce groupe, l'auteur reprend un schéma narratif a priori classique. En effet, il déroule les ateliers d'un point de vue chronologique. Mais ce qui fait la force de son récit, c'est la multiplication des points de vue, à la fois par les changements de narrateurs et par l'introduction des produits de ces rencontres. Des textes s'intercalent donc à cette histoire et nous permettent de mieux comprendre les personnalités de chacun et de mieux cerner aussi ce qui va les lier lors de ces mois.

    "On a tous été très secoués. Par toutes les histoires. Les fausses. Les vraies. C'est comme si nous avions été projetés à l'intérieur d'un film très réaliste."

    Comme vous vous en doutez, j'ai beaucoup aimé cette construction et cette approche progressive de la psyché des héros. Chacun apporte sa pierre à l'édifice de ce groupe et aucun ne se démarque des autres. Ce qui conforte cette idée d'unité proclamée par le titre.

    C'était un pari risqué de faire vivre et évoluer autant de "voix"différentes en si peu de pages. Mais Jean-Philippe Blondel se révèle à la hauteur de ce défi. Non seulement chacun des monologues a son identité mais il en va de même de chacun des textes proposés dans l'atelier.

    De plus, j'ai apprécié la mise en abyme entre sa situation et celle vécue par son double, François Roussel.  Et ce traitement de la peur de la panne, propre à tout écrivain.

    Bref, vous l'aurez compris: si vous souhaitez comme moi participer à un atelier d'écriture ou si vous aimez les histoires à la fois humanistes et sensibles, ce roman est pour vous! Ne serait-ce que pour le plaisir de découvrir la petite musique de son auteur.

    "Des vers luisants. Voilà. Ils sont mes vers luisants. Ceux qui éclairent par intermittence le cimetière de ma mémoire."

    Actes Sud Junior, 2017, 125 pages