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the frenchbooklover - Page 103

  • Half Moon Street

    Half Moon Street

    de

    Anne Perry

    half moon street anne perry.jpg

    "La brume montait en volutes de la surface argentée du fleuve, étincelant dans les premières lueurs de l'aube. Sur sa droite, contre le ciel perlé, se dressait l'arche sombre de Lambeth Bridge. Des péniches suivaient le courant descendant en direction du port de Londres, vers des docks encore invisibles dans le brouillard."

    Debout sur une dalle de pierre humide, le commissaire Pitt observe une petite barque sur laquelle le cadavre d'un homme, habillé en robe verte, a été menotté. Comme si le meurtrier avait voulu livrer une parodie de l'Ophélie de Millais.

    Alors que les soupçons se portaient d'abord sur un diplomate disparu, notre héros se rend très vite compte qu'il a affaire au corps d'un photographe renommé. Mais qui aurait pu en vouloir à cet artiste apparemment bien sous tous rapports?

    Pour les besoins de cette enquête délicate, Thomas va tantôt arpenter les salons bourgeois, tantôt se mêler aux acteurs d'une troupe de théâtre.

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    Comme à chaque début de mois, me voici de retour avec mon billet autour de la série des Thomas et Charlotte Pitt.

    Et, contrairement à Bedford Square, je dois tout de suite avouer que j'ai été moins convaincue par cet opus.

    Certes, comme souvent, ce tome permet à Anne Perry de se livrer à une radioscopie de la société victorienne anglaise. A la suite du commissaire, on découvre ainsi les réunions artistiques d'Oscar Wilde, les rencontres photographiques de Hampstead, la vie d'une troupe de théâtre...Ces investigations se révèlent également l'occasion de rappeler certains combats de cette fin du 19ème siècle, tels que le droit au divorce des femmes.

    Et comme souvent, j'ai été conquise par le talent de cet écrivain à ressusciter cette époque.

    Toutefois, j'ai été moins séduite par ses tentatives de confrontation avec la société américaine et française.  Par le biais de Samuel Ellison, beau-frère américain de Caroline, nouvellement débarqué à Londres et par le biais des lettres de Charlotte en voyage à Paris, elle essaie, en effet, de souligner les différences de ces trois pays. Mais tout m'a semblé un peu trop plaqué et assez maladroit.

    En l'absence de Charlotte, de Grace et d'Emily, j'ai apprécié en apprendre un peu plus sur Caroline Ellison et sur son irascible belle-mère. Caroline est un personnage que la romancière a su formidablement faire évoluer et qu'on prend plaisir à voir heureuse avec son mari, Joshua. Finalement, suivant une voie assez parallèle à celle de sa fille cadette, elle a su se débarrasser du carcan de la société et choisir un mariage d'amour.

    Et, n'est-ce pas ce justement que lui reproche le plus Mariah Ellison? Au fil des pages de Half Moon Street, de nombreuses révélations sont faites sur le passé de cette protagoniste. Et on comprend que cette femme n'a pas osé défier ses pairs et combattre un ordre établi. Un moyen pour Anne Perry de mettre en lumière toutes celles qui ont subi le joug de leur mari.

    En ce qui concerne l'intrigue policière, je ne lui ai pas trouvé grand intérêt. Je n'ai pas compris ce début de recherches sur la disparition du diplomate. Tout comme j'ai eu l'impression que souvent, l'enquête passait en second voire troisième plan avant de trouver une issue assez mal tournée.

    Bref, vous l'aurez compris: même si j'ai goûté l'arrière-plan historique et l'évolution des rapports entre Caroline et Mariah, je n'ai pas pris autant de plaisir que d'habitude avec cet opus de la série. Vivement la Conspiration de Whitechapel et le retour de Charlotte et de Grace!

    Editions 10/18, 2006, 284 pages

    Billet dans le cadre du challenge Anne Perry et d'une lecture commune avec Bianca, Céline, Fanny, Sybille et Soie.

     

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  • Il était une fois...Contes en haïku

    Il était une fois...

    Contes en haïku

    de Agnès Domergue

    illustré par Cécile Hudrisier

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    "Petit capuchon

    noisettes et fraises des bois

    rencontrent le loup"

    Ainsi commence ce beau recueil, hommage aux contes que nous connaissons tous. Ou comment vingt haïkus tentent de restituer l'essence de vingt récits de notre enfance.

    Les pages se tournent et à chaque fois, c'est le même plaisir de la devinette.

    "Nuit cahotée

    sous le poids des matelas

    Aïe! Un pois sournois"

    Voici un album que j'ai découvert sur la blogosphère (malheureusement, je ne me souviens plus où) et que j'ai pris grand plaisir à feuilleter.

    J'ai été bluffée par le pari fou d'Agnès Domergue et par son idée de définir en trois petites phrases des contes célèbres. A chaque page, son mystère poétique.

    A ces mots ciselés s'accordent à merveille les illustrations tout en douceur et en finesse de Cécile Hudrisier. Là encore, comme pour le texte, chaque élément est scrupuleusement choisi pour rendre l'esprit de l'histoire évoquée.

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    Bref, vous l'aurez compris: un album bijou à déguster rime après rime et un beau cadeau à faire à tous les amoureux des "il était une fois"

    Editions Thierry Magnier, 2013, 11 €

    Billet dans le cadre du challenge Il était une fois....les contes de fées de Bianca.

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  • Comme des images

    Comme des images

    de

    Clémentine Beauvais

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    "Il y a un corps dans la cour du lycée Henri-IV."

    Au bout d'une journée pas comme les autres, un corps se fracasse dans la cour du Cloître du lycée Henri-IV.

    "Je contemple ce corps, d'abord, avec l'intérêt poli que l'on réserve aux statues excentriques des artistes contemporains, car il faut du temps pour que la vérité chemine jusqu'à moi à travers cette installation spectaculaire [...]

    A présent, j'attends, en pensant à ce qui s'est passé ce jour-ci et tous ceux d'avant."

    Ainsi, notre narratrice (anonyme, jamais son prénom n'est mentionné en 200 pages) revient sur les évènements qui ont conduit à cette chute fatale.

    Tout a commencé quand Leopoldine Gauthier a rompu avec Tim pour se mettre en couple avec Aurélien. Tristesse du rejeté et forcément, volonté de se venger. Ou du moins, lors d'une soirée trop alcoolisée avec ses amis, de montrer son ex dans une position indécente.

    Et un matin, à huit heures, tout le lycée (parents et professeurs compris) se voit adresser par mail ladite vidéo.

    Rires/Dégoût/Rejet/Gêne/Moqueries/Soutien: autant de réactions qui secouent ce microcosme parisien et qui vont avoir des répercussions dramatiques.

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    J'avais entendu parler de ce roman sur le blog de mon amie Loucy et j'avais envie de le lire depuis. Aussi, quand il est arrivé à la médiathèque, je me suis lancée.

    Dès les premières pages, on se sent étouffé dans ce lycée d'élite, enfermé dans une de ses nombreuses cours à côté d'un cadavre. Comme si finalement cet établissement-Hache quatre-avait réussi à broyer un de ses membres.

    "alors je me prenais à imaginer une sorte de rite initiatique terrifiant conduit dans l'ombre de la montagne Sainte- Geneviève. sous le visage acariâtre de la tour Clovis. Il y avait des épreuves de gladiateurs où on devait dompter des monstres et leur couper la tête avec cette fameuse "Hache quatre 100% de réussite" dont on entendait parler."

    Bien entendu, il est question de réussite scolaire et de pression pour passer dans la bonne section en 1ère. Chaque devoir est un enjeu. Chaque note est disséquée et tous redoutent le moindre faux pas. Aucune erreur n'est tolérée et chacun sait qu'il joue sa future position sociale.

    Mais cette idée, finalement, même si elle est plusieurs fois développée, m'a moins frappée que la méditation sur l'âge adolescent. Comme dans une Cour, chacun occupe un rang, de la reine aux courtisans. On jette les amis comme des kleenex, on se jauge...Et on tente de préserver sa place.

    C'est ce que la confession de la narratrice met clairement à jour. On sent toute sa fascination pour sa Leo, son amie depuis la sixième, si belle, si intelligente, auréolée de toutes les qualités. Et si la publication de cette vidéo faisait descendre de son trône cette reine?

    Elle dispose d'une journée. Une journée pour garder la tête haute et affronter tous les lazzis.

    "Je me suis plu à imaginer Leopoldine comme leur petit chaperon rouge, et moi en bûcheron qui les attaquerait à la Hache quatre pour la sortir fraîche et ensanglantée et souriante de leurs entrailles. Sauf qu'elle n'avait pas besoin de moi: elle n'a pas pris de petit chemin alternatif, elle a marché droit devant eux avec son hochement de tête et son recoiffage rapide. Ils ont tous baissé la tête vers l'asphalte, comme balayés par le coup de fouet de ses cheveux."

    Guerre de classe, guerre de position, guerres familiales...Et si l'adolescence se faisait encore plus cruelle à Hache-quatre?

    A ces sujets forts se superpose un autre, qui depuis la parution de photos volées de stars dans le plus simple appareil en septembre, revêt une résonance encore plus particulière. J'ai parlé bien entendu de l'atteinte à l'intégrité du corps de la femme. Et de la multitude de réactions que provoque une diffusion de tels clichés et/ou films? Du "sale pute" au "je te soutiens", toute une gamme de comportements est évoquée lors de cette journée pas comme les autres. Et bien entendu, se dessinent en filigrane le sexisme et l'inégalité encore existante entre les hommes et les femmes dans leur rapport à la nudité et au sexe.

    J'ai beaucoup apprécié toutes ces réflexions et ce portrait au vitriol de la jeunesse privilégiée dans ce lycée d'élite.

    Mais, ce qui m'a gênée, c'est le style. Certes, les phrases brutes, sans fioritures, font forte impression et s'adaptent à la violence du sujet traité. Cependant, certaines tournures m'ont trop heurtée.

    Bref, vous l'aurez compris: un ouvrage qui ne peut laisser indifférent et qui nous interroge profondément.

    Editions Sarbacane, 2014, 204 pages