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the frenchbooklover - Page 28

  • Sans foi ni loi de Marion Brunet

    Sans foi ni loi

    de

    Marion Brunet

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    Il est des matins qui ont le goût du quotidien et des ces gestes répétés à l'infini.
    Il est des matins qui bousculent nos repères et bouleversent nos existences.
    C'est ce qui arrive à Garrett quand Ab Stenson, la hors-la-loi, débarque chez lui et l'enlève.

    Débute alors un long voyage pour ces deux âmes d'apparence opposées. Un voyage aux allures de fuite. Comme si chacun d'entre eux voulait échapper à la vie-prison qui l'attendait.
    Mais peut-on vraiment préserver sa liberté face à la sauvagerie et au jugement des autres?

    J'avais envie de voyager hier après-midi et d'oublier cette pluie mélancolique du dimanche. Je ne pouvais donc pas trouver meilleur choix que ce livre qui m'a emportée directement au Far West.

    Dès les premières lignes, le récit prend des allures de témoignage. On sent que le narrateur revient sur un événement capital : sa rencontre et sa relation avec Ab Stenson. Une jeune femme indépendante, vêtue comme un homme, à la gâchette redoutable et redoutée et dont le mystère continue de le fasciner.

    À cet aspect testimonial s'adjoint très vite une dimension d'apprentissage. Apprentissage d'une manière d'être ensemble mais surtout apprentissage pour Garett de ses envies, de ses besoins et de son identité même. Comme si son rapt, paradoxalement, lui ouvrait des horizons insoupçonnés. Cette réflexion autour de la liberté et de la définition de son essence m'a beaucoup intéressée.

    En outre, Marion Brunet intègre à ces deux ressorts principaux de l'intrigue tous les codes ou les acteurs traditionnels du western. Notre route croise ainsi des marshalls, un tenancier de saloon, un esclave... Des coups de feu retentissent. Éclats de duels ou de règlements de compte...
    Pour autant, aucun de ces ingrédients attendus du genre ne sonnent faux. Au contraire, ils contribuent à densifier la narration et à lui donner encore plus de relief.

    J'ai été très sensible à l'atmosphère de ce texte. Les phrases palpitent d'impressions sonores et nous offrent des panoramas dépaysants. Juste par le choix de quelques mots resserrés qui suggèrent tant.

    De plus, la galerie des personnages se révèle très aboutie. Même si j'ai regretté que certains méchants soient sans doute un peu trop appuyés, j'ai apprécié les portraits en creux des héros et de leurs proches, entre lumières et ombres.

    Bref, vous l'aurez compris: Sans foi ni loi constitue une lecture très plaisante, aux personnages archétypes bien campés, aux rebondissements maîtrisés et à l'ambiance réussie. Il confirme tout le bien que je pense de Marion Brunet dont j'avais tant aimé le sublime Dans le désordre.

     

     

     

     

    Fin de la discussion

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  • L'Albatros de Nicolas Houguet

    L'Albatros

    de

    Nicolas Houguet

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    "Parfois, pas souvent dans une vie, on bloque.

    Tomber amoureux dans le parc d'un château. Garder l'instant figé dans une tête. Une photo indélébile. Parfois, on touche à l'éternité en étant mortel. Des grâces qui vous tombent d'on ne sait où. On se demande même si on les mérite, mais enfin voilà, c'est là. On l'a vécu."

    Il est des nuits où notre cœur déborde. Où notre trop plein de mots veut se déverser. Où nos confessions se bousculent sur le bord de nos lèvres. Dans l'attente d'une oreille aimante qui sera capable de les comprendre. Ou d'une oreille inconnue qui nous écoutera et répondra par un silence complice à tout ce que nous avons enfin osé partagé.

    Parce que la nuit libère nos émotions. Parce que la musique aussi.

    Parce que certains concerts peuvent parfois nous faire voyager loin. Bien loin et nous ramener à l'essentiel. A ce qui nous constitue et nous porte. Notre cohorte de joies et de chagrins. Nos présents et nos absents. Toute notre grammaire de l'intime que certaines notes ou certaines paroles réveillent.

    Ce moment sublime, Nicolas l'a vécu. Lors d'un concert. Celui de Patti. Patti Smith. Un mardi 20 octobre 2015. A l'Olympia. 

    "C'était l'anniversaire de Rimbaud. Le début d'une nouvelle page et d'un nouvel automne pour moi, marqué par la conscience de ma fragilité, de ma mortalité et par la fin de souffrances chroniques qui m'avaient contraint à l'immobilité pendant des mois. J'étais disponible."

    Dans la fosse, E. était là aussi. E. la femme tant aimée. La femme tant pleurée. Ce concert sonnait comme le mot ultime de leur histoire.

    Et chaque chanson de Patti résonnait en Nicolas. Comme si la musique allait chercher aux tréfonds de son âme. 

    Chaque morceau entonné par cette chamane des temps modernes suscitait en lui tout un flot de souvenirs. Son enfance. Sa maladie. Ses parents. Ses grand-parents. Ses amis. Ses amours. Ses absents. E.  

    Et c'est ce flot qu'il a choisi de nous confier dans l'Albatros.

    "Je ne sais pas si on peut vivre sans s'inventer des histoires, sans masquer notre peur du vide. Ces maladroites rustines d'idéal pour combler le vide."

    Parfois, on est pas à l'heure de certains rendez-vous. Notamment des rendez-vous littéraires. Un peu comme si les livres savaient exactement à quel moment nous trouver et nous toucher. C'est ce qui est arrivé pour moi avec l'Albatros. Je l'ai commencé une première fois. J'ai aimé le style. Ce phrasé. Cette intensité. Mais j'ai senti que je restais en dehors. Comme si je n'étais pas prête à recevoir le récit de Nicolas. 

    Et puis, le billet d'Eva m'a redonné envie de reprendre l'intrigue. Je me suis laissée happer par toute cette densité. Ces émotions brutes. Cette sincérité. Cette authenticité.

    Nicolas se met à nu devant nous. Dans une sorte de pudeur impudique. Une retenue et un laisser-aller. Il nous fait rentrer dans son univers. Sensible. Poétique. Engagé. Et porté par une liberté de tous les instants.

    "Tout passe par le corps. Même les mots, surtout les mots. On doit transpirer quand on les sort de soi. On doit s'essouffler. Ça doit vous vider, être une nuit d'amour ou un marathon. Sinon, ça veut rien dire."

    On se laisser porter justement par ces mots. Par cette chanson. Autour de sa vie. Bonheurs, malheurs, luttes, répits, courage....Par ces personnes qui l'accompagnent. Ce père et cette mère incroyables. Ce grand-père et cette grand-mère tout aussi remarquables. E. bien évidemment. E. la femme envolée mais dont la lumière aura nimbé de joie tant d'instants. 

    Tout un pan d'une existence se dévoile sous nos yeux. Une existence unique certes. Mais dont certains chapitres font forcément écho en nous. Car Nicolas, comme le soulignait si justement Eva, parvient à rendre son histoire à la fois singulière et universelle.

    Ce livre est beau. Habité. Par tant d'émotions. 

    Comme Nicolas, ce 20 octobre 2015, on aimerait qu'il ne se finisse jamais. Ou alors qu'il y ait très prochainement des bis. Et que nos cœurs, une fois encore, battent à l'unisson de celui de cet auteur. Dans une sorte de communion. Autour de la vie. De la mort. De l'amour. De la perte. 

    Comme seuls certains concerts, certains spectacles ou certaines lectures peuvent provoquer. Ces moments que l'on collectionne précieusement et qui font que nous sommes des vivants.

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai été bluffée par ce premier roman. Par cette construction maîtrisée qui laisse la part belle aux vibrations de l'âme. Et j'espère qu'à votre tour, vous vous laisserez porter par ce voyage.

    Editions Stock, 2019, 227 pages

     

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    Et, en bonus, un extrait de ce concert de Patti Smith du 20 octobre 2015.


  • Douce de Sylvia Rozelier

    Douce

    de

    Sylvia Rozelier

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    "La première fois que je t'ai vu, rien. Aucune inclination amoureuse, attirance, regards qui en disent long, tressaillement, accélération du rythme cardiaque, aucun signe ne pouvait nous laisser penser à cet instant, ni d'ailleurs quelques semaines plus tard, qu'un amour allait naître de notre rencontre, encore moins que cet amour occuperait notre vie, au point qu'elle n'en serait plus une véritable, morcelée, incendiée, dédoublée, que chacune de nos existences se trouverait bouleversée par cette sorte d'amour qui nous serait tout. L'amour ou."

    A son travail, l'héroïne rencontre un homme. Un homme qui a priori n'a rien pour lui plaire. Pourtant, cet homme va lui inspirer une véritable passion. Et c'est ce récit qu'elle nous livre dans Douce.

    A 19 ans, lors de vacances chez une amie, je me souviens avoir pris par hasard sur les étagères de sa bibliothèque familiale, Passion simple d'Annie Ernaux. Et d'avoir vécu un de mes plus beaux éblouissements littéraires. Comme si le monde de l'amour qui s'ouvrait juste pour moi prenait tout son sens dans cette attente emplie de désir, dans ces palpitations de la chair et dans ces brûlures du cœur.

    Je n'avais pas spécialement prévu de lire Douce de Sylvia Rozellier. Du moins pas pour le moment. Et puis, lors de mes vacances à Bordeaux, j'ai été attirée par ce titre-là au rayon littérature française. Je l'ai ouvert et dès les premières signes, j'ai su qu'il fallait que je me le procure. Immédiatement. Il a attendu bien sagement mon retour chez moi. Et lors de ce samedi de mai aux allures de Toussaint, je l'ai ouvert et je ne l'ai refermé qu'une fois achevé. Tant j'avais été happée par cette chronique d'un amour absolu. Tant j'avais retrouvé les sensations qui m'avaient accompagnée lors de ma lecture de Passion simple.

    Chez Sylvia Rozelier, ce qui frappe de prime abord, c'est sa musique. Cette façon qu'elle a de former ses phrases et d'épouser avec elles les moindres oscillations de nos êtres. Comme si elle savait retranscrire tout ce qui peut nous habiter voire nous hanter quand notre cœur ne nous appartient plus. Quand nous nous dépossédons de tout  pour faire corps avec l'autre. Comme si seul lui comptait. Comme si il fallait s'aliéner face à sa puissance.

    Dans Douce, elle retrace toutes les étapes de la passion. De cette première rencontre non évidente à cette première fois. Des premières déclarations aux premières compromissions. Des mensonges aux trahisons. Le lecteur est entraîné dans ce tourbillon jusqu'à l'oubli de soi. Il vibre à l'unisson de ces deux personnages. Sortes de miroirs de lui-même et de tous ceux qui ont connu au moins une fois dans leur existence les ravages passionnels.

    Ce livre, il vibre à chaque mot. 

    Ce livre, il est empli de sensualité, de chair, de vie, de deuil, de larmes et de joie.

    Ce livre, c'est l'histoire d'un très grand amour, infiniment destructeur mais que beaucoup rêvent d'expérimenter au moins une fois.

    Ce livre, il parle de toutes ces choses infimes qui nous occupent quand elles viennent de l'objet aimé ou sont liées à lui.

    Ce livre, il parle de souffrance et d'absence. De toutes ces brisures de notre âme qui peu à peu, nous anéantissent.

    Ce livre a été pour moi un des plus beaux que j'ai jamais lus sur la passion. Entre l'espace-temps de ses pages, j'ai aimé, j'ai souffert et je me suis retrouvée. Rares sont les ouvrages qui savent aussi bien parler de nos fêlures et de ce qui fait battre nos cœurs.

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai tant aimé cette radioscopie d'une passion. Et je sais déjà que je me plongerai prochainement dans les deux précédents ouvrages de Sylvia Rozelier.

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