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des romans français - Page 3

  • Les Amants météores d'Eloïse Cohen de Timary

    Les Amants météores

    d'Eloïse Cohen de Timary

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    "Comme un sportif avant l'épreuve, elle se répète mentalement le geste à accomplir. C'est sûr, elle aurait préféré faire cela à l'hôpital-entendre le bip des machines, le chariot repas qui passe dans le couloir, sentir l'odeur des détergents médicaux et puis celle, si familière, des anesthésiants-mais les circonstances ont voulu qu'elle se trouve quelque part en Bretagne, dans cette vieille maison aux murs humides et aux tomettes écaillées par le temps."

    A quoi tiennent les rencontres d'une vie ? A un détour, à un bus manqué ou à un sourire croisé par hasard et qui s'attarde dans la mémoire.

    Pour Marianne et Virgile, c'est une interview ratée qui les a rapprochés. Un échange de regards dans un bar reculé. Et les voilà, nos amants météores.
    Nos amants étonnants. Nos amants incandescents. Nos amants émouvants. Nos amants marquants.

    On dit souvent que toutes les histoires d'amour ont déjà été contées et qu'il ne reste plus qu'à trouver une manière différente de les écrire. C'est ce qu'a réussi à faire dans ce second roman Éloise Cohen de Timary.

    Déjà en réinventant le modèle de couple avec ce héros à la sexualité fluide qu'on aurait pas forcément attendu dans le rôle de l'amant éperdu.

    Puis, en livrant un récit d'amour à la fois éphémère et ancré dans le futur. Comme s'il jouait sa propre partition. Aux accents de vie et de mort.

    Il y a de très belles images entre ces pages. Des images qui puisent leurs racines dans ces jardins paysages si chers à Virgile. Dans ce ciel météore aussi.

    Il y a des scènes qui marquent. Comme cette fête opulente aux allures de crépuscule. Comme ce week-end iodé. Comme cette arrivée dans leur appartement de Montmartre. Comme ce déjeuner chez les parents.

    Il y a cette alternance de narration. Ces voix qui s'entremêlent pour mieux nous parler de cette relation fulgurante.

    J'ai trouvé cette construction intéressante. Même si j'ai eu du mal parfois à quitter Virgile et Marianne pour Florence, cette médecin attachante mais dont je ne percevais pas l'importance.

    Même si la fin m'a permis de mieux saisir la portée de cette protagoniste, j'aurais préféré  moins me plonger dans son vécu pour mieux rester avec nos amants.

    De même, je dois avouer que j'ai moins accroché avec Tatiana et avec toute la partie de l'intrigue qui se rapporte à elle.

    J'ai regretté également que certains thèmes forts ne soient pas plus développés. Comme celui de la possibilité de la paternité.

    Pour autant, malgré ces quelques bémols, je garderai un bon souvenir de cette lecture et de nos amants météores. 
     
    JC Lattès, 328 pages, 2020

  • Il est juste que les forts soient frappés

    Il est juste que les forts soient frappés

    de

    Thibault Bérard

    il est juste que les forts soient frappés,thibault bérard,éditions de l'observatoire,premier roman,littérature française,amour,maladie,deuil-

    "J'imagine que vous serez d'accord: ce que tout le monde veut dans la vie, c'est laisser une trace, non. Résister à l'oubli éternel?"

    Cela commence comme un film de Capra. Une femme en proie à des démons qui la broient. Deux rencontres à quelques années. Et la voilà métamorphosée.

    Mais, pour celle qui pensait mourir avant 40 ans, point de happy end.
    C'est elle qui nous raconte son histoire. Depuis une cellule dans un au-delà où ses souvenirs remontent comme des bulles. Bulles de joie. Bulles de combat. Bulles de douleur. Bulles de tout ce qui ne se dit pas.

    Il y a la voix de Sarah qui nous mène sur ce chemin peuplé de tous ces rires passés, de toutes ces souffrances larvées et de tous ces possibles réinventés. Sarah, la reine noire, qui ne croit pas au bonheur mais que la rencontre avec Théo a bouleversée. Sarah qui se dévoile entière, dans ses failles les plus reculées. Avec une sincérité désarmante qui nous pousse à l'aimer et à la pleurer.

    Il y a son lutin. Cet amoureux porté par une foi dans l'existence. Celui qui revoit les scènes de ses longs métrages préférés dans les séquences de ses journées. Celui qui grandit dans l'épreuve. Comme si le baptême de feu de l'inquiétude et de la peur le rendaient adulte et balayaient son insouciance.

    Il y a ceux qui évoluent autour de ce couple frappé par la pire épreuve. Simon et Camille, leurs deux enfants, pris dans la tourmente. Le Dr House, figure de référence, contre laquelle achoppent tous les espoirs comme toutes les colères.

    Il y a ce style fébrile qui épouse au mieux l'urgence. Ces phrases qui se font tantôt courtes ou tantôt longues pour accompagner les méandres de la pensée et du discours de l'héroïne. Cette poésie qui émerge dans certains paragraphes. Ces bulles. Cette nacre. Comme des îlots de beauté dans un univers dévasté.

    Il y a cette émotion qui nous saisit et nous accompagne. Cette envie d'y croire. Malgré la chronique d'une mort annoncée.

    Il y a cet entremêlement de références modernes et plus anciennes qui s'harmonisent au fil des pages.

    Il y a ces chansons qui réconfortent et apaisent. Comme autant d'échappées magnifiques et momentanées.

    Il y a ces instants fugaces de communion et de paix que Sarah fige pour l'éternité.

    Il y a Cléo, la lumière , qui ouvre ses bras pour le rescapé et l'empêche d'échouer.

    Il y a cette pensée qui envahit le lecteur. Cette idée que le roman s'appuie sur une matière autobiographique qui rend l'hommage encore plus poignant.

    Ce livre, je l'ai fini le cœur à la fois serré et ensoleillé.

    Ce livre, il m'a embarquée. Même si le premier chapitre, ce pacte narratif nécessaire, m'avait laissée dubitative. Même si j'aurais préféré que l'intrigue s'achève sur ce "Hey Jude" vibrant et laisse les vivants s'effacer devant Sarah, l'absente si présente.

    Ce livre, malgré ces deux réserves, je ne peux que vous le recommander.

    Editions de l'Observatoire, 2020, 296 pages

     

     

     

  • Moi, Tituba sorcière... de Maryse Condé

    Moi, Tituba sorcière….

    de

    Maryse Condé

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    "Abena, ma mère, un marin la viola sur le pont du Christ the King, un jour de la 16** alors que le navire faisait voile vers la Barbade. C'est de cette agression que je suis née. De cet acte de haine et de mépris."

    Il est des destins placés sous le sceau de la malédiction et de bonheurs trop rares.

    Il est des femmes qui soignent et font peur. Comme si leur talent de guérisseuse les plaçait au ban d'une société avide de vengeance et de proies toutes désignées.

    Il est des cœurs qui battent à l'unisson de ceux qui ne les méritent pas ou qui les mèneront à leur perte.

    Il est des êtres libres qui tentent de résister et de vivre. Malgré tout.

    Fruit d'un viol sur un navire négrier, Tituba est née à la Barbade. Elle a grandi sous les yeux d'un père adoptif aimant mais dans une atmosphère de tension permanente. Et déjà, la voilà orpheline. Recueillie par Man Yaya, elle a été initiée au surnaturel et aux sorts de guérison.

    Puis, vient son mariage avec John et le départ pour Salem. Où l'attendent bien des malheurs...

    Ce livre, je l'ai pris par hasard en octobre sur une des tables de présentation de la Libraire Millepages de Vincennes. Comme happée par ce titre affirmatif. Cette déclaration aux trois points de suspension qui sonnait comme une confession.

    Dès les premières pages, la semaine dernière, j'ai été emportée. Sur cette île de la Barbade. Où Tituba faisait ses premiers pas dans cette violence de l'esclavage.

    Ce roman est habité d'un souffle rare. Comme si les mots faisaient corps avec nous et nous emmenaient loin, très loin. Comme si nous devenions nous-mêmes les jouets de cette fatalité d'être femme et de savoir réparer les êtres . Dans un environnement-carcan où toute distinction sonne le glas de toute espérance.

    Tituba avance, trébuche, palpite, se débat. Comme un papillon pris dans une gigantesque toile qui va forcément, un jour, l'engloutir.

    La prose riche et foisonnante de Maryse Condé remet en lumière cette figure oubliée. L'occasion pour elle de ressusciter tout un pan de l'histoire et de donner un éclairage nouveau notamment sur Salem. L'occasion également de capter tous les contrastes de l'âme humaine.

    Bref, vous l'aurez compris: un livre fort qui résonne et retentit comme un chant. Un chant de larmes et de résistance face à ce destin qui accable.

    Et vous, vous l'avez lu?

    Folio, 277 pages