L'Amour au subjonctif
de
Pascal Ruter
"Voilà les enfants...Que dis-je, les enfants? Les jeunes, oui! Vous pouvez constater que je suis calme et prête à vous écouter.
Je ne suis pas là pour vous accabler, ni pour vous juger. Je suis là pour comprendre. Vous comprendre. Ou essayer, en tout cas. Ce n'est pas pour me vanter, mais je crois vous avoir toujours soutenus dans les périodes difficiles et les épreuves, comme j'ai partagé votre joie dans les moments de grâce. "
La principale convoque les élèves pour comprendre comment au bout d'une semaine ils ont pu rentrer tout seul de leur voyage scolaire en Italie sans leurs professeurs.
Et c'est le récit de ce périple pas comme les autres que nous sommes invités à découvrir...
J'ai commandé ce roman pour le fonds adolescent de la médiathèque où je travaille et quand il est arrivé, je l'ai immédiatement emprunté. J'étais amusée par le sujet car je vais moi aussi partir bientôt à Rome (fin juin-début juillet) avec un groupe de 11-17 ans.
"La vérité, c'est que nous avons tous confusément senti, à ce moment-là, qu'il se passerait d'une drôle de façon ce voyage, comme s'il était engagé sur des rails un peu tordus. Comme s'il était miné depuis le départ. Et tutti quanti."
Pour raconter cette histoire, Pascal Ruter a décidé de multiplier les points de vue. Plusieurs voix d'adolescents s'entremêlent ainsi.
On fait d'abord la connaissance de Roméo. Roméo est fou amoureux de Juliette depuis la maternelle. Il a appris tous les dialogues de la pièce de Shakespeare pour la séduire mais dès qu'elle s'approche de lui, il ne peut prononcer aucune phrase bien sentie...Il bafouille, rougit....Et se dissimule en permanence derrière ses Ray Ban. Il espère cependant que ces cinq jours vont lui donner enfin l'occasion de faire la conquête de l'adolescente.
"Chaque fois que je la rencontre le matin, c'est comme la traversée du triangle des Bermudes avec un brouillage de données et la navigation à vue. J'ai remarqué que chaque fois que je croise son regard, j'ai de l'aquarelle plein les yeux, et je me mets à fuir de partout. "
J'ai beaucoup apprécié les parties de Roméo, cet adolescent pas comme les autres aux références littéraires et cinématographiques prononcées, ce Pierre Richard en culottes courtes dont toutes les tentatives de séduction tournent court et donnent lieu à des scènes d'anthologie.
Juliette, quant à elle, se rêve future romancière et passe son temps à observer ses comparses et les professeurs. C'est grâce à elle qu'on surprend toutes les interactions de ces accompagnateurs pas comme les autres. Même si elle m'a moins fait rire que Roméo, j'ai aimé son ton souvent cynique et sa façon de décrire les autres.
A ces deux protagonistes s'ajoute une galerie de personnages secondaires haut en couleurs: Merlin, un kleptomane qui tente d'oublier l'absence d'un frère; Anna en quête de ses parents; Zoé un peu perdue dans la vie; Tarzan, le conducteur du car fan du soap opéra Coeurs déchirés et grand séducteur devant l'éternel...
Chacun d'entre eux porte une fêlure que nous découvrons au fil des pages. Mais ces "cœurs déchirés", que le voyage en Italie va tenter de réparer, ne baissent jamais les bras et nous font souvent rire...Un peu comme dans les films italiens dont Roméo est si fan (on a d'ailleurs le droit à un bel hommage à la Dolce Vita dans la fontaine de Trevi)
Très souvent, j'ai parcouru ce roman le sourire aux lèvres, amusée par l'enchaînement de catastrophes, de gaffes....et par les réflexions de ces adolescents de 15 ans.
Mais je dois avouer que j'ai moins accroché aux derniers chapitres trop fantaisistes...Je ne m'attendais pas à une telle résolution du mystère de la disparition des trois accompagnateurs...
Bref, vous l'aurez compris: L'amour au subjonctif (je vous laisse découvrir le sens du titre..)constitue un roman très drôle et qui donne très envie de repartir en Italie sur la route de Rome et de Pompéi.
Didier Jeunesse, 2014, 281 pages, 14,20 €