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  • Sarah Thornhill de Kate Greenville

    Sarah Thornhill

    de

    Kate Greenville

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    "L'Hawkesbury était un joli fleuve, large et tranquille; son eau verte ridée, ses falaises dorées par le soleil, les oiseaux perchés dans ses arbres comme le linge d'une lessive étendue. En cette douce matinée paisible, les casuarinas chuchotaient et, dans les reflets sur l'eau, le monde se tenait sur la tête.

    On nous appelait la colonie de la Nouvelle-Galles du Sud. Ça ne m'a jamais plu. Nous sommes pas rien de nouveau. Nous sommes nous.

    C'était sur l'Hawkesbury que venait les bannis. Dès qu'ils retrouvaient leur liberté, c'est là qu'ils partaient. Quatre-vingt kilomètres de Sydney et pas l'ombre d'un magistrat ou d'un constable. N'importe qui pouvait se choisir un lopin de terrain et se monter une cabane, sans un regard en arrière"

    Ainsi débute le récit de Sarah Thornhill, une jeune femme née au début du 19ème siècle, non loin de Sydney.

    Elle est fille cadette d'un banni qui a monté sa propre entreprise fluviale et prospéré. Comme sa mère est décédée alors qu'elle était toute jeune, elle a été élevée par Ma, une femme autoritaire et fière de ses origines.

    On suit les jeux de ses premières années, on la voit tomber amoureuse de Jack, l'ami de son frère et son compagnon d'expédition.

    Le temps passe et un jour, quand il revient de voyage, leurs rapports évoluent.

    "C'était rien du tout. Un silence qui a duré un battement de cœur et les yeux de Jack plongés dans les miens. Mais ce rien voulait dire: tout est différent à présent"

    Une idylle se noue entre eux. Mais peut-elle résister au poids des préjugés et au souvenir des anciens occupants aborigènes massacrés?

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    J'avais déjà entendu parler de la romancière Kate Grenville mais je n'avais jamais eu l'occasion de croiser un de ses ouvrages. Aussi, je remercie vivement Anne-Sophie et les éditions Métailié pour cet envoi.

    J'ai beaucoup apprécié la structure narrative de ce livre. L'auteure a opté pour le "je" de Sarah Thornill et je trouve que cela souligne bien l'idée de cet apprentissage que subit l'héroïne au fil des pages.

    Dès son plus jeune âge, dans un monde où tout se veut nouveau, où on prétend oublier les origines de chacun tout en les rappelant sans cesse, Sarah se pose des questions et tente de percer certains mystères. Celui de son aîné prétendument disparu. Celui de ces Noirs qui rejettent son père...

    De même, elle entend mener son existence comme elle le souhaite. C'est pour cette raison qu'elle se lance dans une idylle avec Jack. Mais sa famille s'oppose et Sarah doit trouver une autre voie vers l'indépendance.

    Ce personnage ne peut laisser indifférent. Kate Grenville en a fait une héroïne profondément libre, généreuse, passionnée, exigeante...

    On la voit évoluer dans sa famille, puis partir dans l'Australie plus profonde. Sans oublier un périple au pays des Maoris.

    On en apprend ainsi beaucoup sur la vie de ces colons, souvent anciennement condamnés, sur leurs codes sociaux, sur leur rejet des autochtones...

    Bref, vous l'aurez compris: Sarah Thornhill constitue un beau portrait de femme et m'a donné très envie de me plonger dans les autres ouvrages de Kate Grenville. Si vous appréciez les romans d'apprentissage dépaysants, je pense que vous serez conquis par ce titre.

    Editions Metailié, mai 2014, 256 pages

  • Deux albums autour de l'amour et de ses hasards

    Deux albums autour de l'amour et de ses hasards

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    Récemment, j'ai eu l'occasion de découvrir deux très jolis albums jeunesse autour de l'amour et de ses hasards.

    Le premier, Herman et Rosie pour la vie de Gus Gordon, nous embarque à New York.

    "Il était une fois dans une ville très animée, dans une rue très animée, deux très petits appartements: dans l'un vivait Herman Schubert....Dans l'autre, Rosie Bloom."

    Herman et Rosie apprécient tous les deux la vie dans cette grande métropole. Mais il leur arrive parfois de se sentir seuls. Alors qu'Herman travaille en haut d'une tour, Rosie fait la plonge dans un resto chic et chante tous les jeudis soirs dans un club de jazz.

    Malgré leurs nombreux goûts en commun, rien ne les prédispose à se voir.

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    Mais un soir, en passant dans une école de jazz, Herman entend Rosie chanter.

    "Quelqu'un chantait....et c'était merveilleux. Il éprouva la même sensation que s'il avait mangé du miel à même le pot."

    Cela lui donne envie de monter sur le toit et de jouer un air au hautbois. Rosie l'écoute et est sous le charme.

    Les jours passent....et on se demande si ces deux héros vont un jour se croiser.

    J'ai beaucoup apprécié l'intrigue de cet album qui traite avec beaucoup d'habileté des hasards qui président souvent aux rencontres amoureuses. Herman et Rosie constituent deux protagonistes attachants qui tentent d'occuper la solitude qu'ils ressentent dans cette grande ville qui les fascine. De plus, même si on se doute et on espère de l'issue, Gus Gordon prend un malin plaisir à nous entraîner sur de fausses pistes.

    Enfin, les dessins retranscrivent à merveille l'humour et la poésie du texte.


    Autre métropole, autre destin. Place maintenant à l'Oeil du pigeon, un album écrit par Séverine Vidal et illustré par Guillaume Plantevin.

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    "C'est quand même pas facile tous les jours, une vie de pigeon. Vous pouvez me croire. On vit dans l'ombre. On se fond dans le décor. Gris parmi les gris, pas évident de sortir du lot. D'ailleurs, là, en ce moment, vous me cherchez. Vous vous demandez où je me cache"

    Léon est un pigeon pas comme les autres qui "regarde, observe, suit des yeux, contemple [et a plein] d'histoires à raconter"

    Sa préférée, c'est cette de Youri et Rose. "Comment ils se sont rencontrés, comment ils se sont aimés, au premier coup d’œil. Ou presque"

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    C'est ainsi qu'on suit toutes les occasions qu'ont eues ce jeunes homme et cette jeune femme de se croiser. Jusqu'au jour où....

    Là encore, j'ai été sensible au ton très humoristique qui se dégage de ces pages. Ce qui fait également l'originalité de cet album, c'est le choix d'un pigeon comme narrateur et comme deus ex machina.

    De même, les illustrations très gaies et assez rétro accompagnent à merveille les mots de Séverine Vidal.

    Bref, vous l'aurez compris: je suis sous le charme ce ces deux albums jeunesse à la fois tendres et drôles et j'espère que vous aurez l'occasion de les découvrir.

    Herman et Rosie pour la vie de Gus Gordon, Gallimard Jeunesse, 2013, 13 €

    L'oeil du pigeon de Séverine Vidal et Guillaume Plantevin, Sarbacane, 2013, 15,50 €

     

  • (Re)play de Jean-Philippe Blondel

    (Re)play

    de

    Jean-Philippe Blondel

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    "Clément s'est penché vers moi en sortant du cours de maths. Il m'a lancé:

    -Tiens,au fait, j'ai parlé avec le documentaliste ce matin. Tu sais quoi? Il paraît que Franck Ménard va venir au lycée donner une conférence sur l'état de la presse rock en France.

    Je n'ai rien répondu. J'ai fait semblant de ne pas être intéressé. C'est là qu'il a lancé l'estocade.

    -Il paraît que cela se finira par un concert. Enfin, il écoutera quelques morceaux de deux ou trois groupes de l'établissement, quoi. Dommage que les Frontlights se soient séparés."

    Benjamin, un adolescent de dix-sept ans, vient d'apprendre qu'une des sommités du rock allait se déplacer dans son lycée. L'année dernière, cette nouvelle aurait revêtu tellement d'importance. Mais là, maintenant qu'il est brouillé avec Mathieu et Clara, maintenant que leur groupe les Frontlights s'est dissous, à quoi bon?

    Et si cette visite lui donnait l'occasion de rejouer son passé?

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    Grâce à Claire, une de mes collègues, cela fait maintenant plus d'un an que j'ai découvert Jean-Philippe Blondel. J'ai adoré Blog et 06h41, j'ai trouvé beaucoup de qualités à Accès direct à la plage et je suis passée à côté de This is not a love song (je n'en ai d'ailleurs pas parlé ici).

    Comme la thématique de cet ouvrage pour adolescents me plaisait, je me suis décidée à me lancer dans (Re)play. Et dès les premières pages, la magie de cet auteur a opéré. J'ai reconnu sa petite musique si particulière, ses réflexions si justes et si sensibles sur les relations, sur les transformations de vie...

    En début de seconde, Benjamin a rencontré Mathieu. Très vite, ils sont devenus amis. Leur relation a duré très exactement dix-huit mois.

    "Un an et demi à passer des heures avec quelqu'un. Un an et demi à penser que, pour la première fois, on a un ami. Un ami à qui on confie tout ce qu'on n'aurait jamais pensé confier. La trouille qui prend au ventre quand on pense à l'avenir et à ce qu'on est censé devenir. Les films qui émeuvent tellement qu'on ne peut pas s'empêcher de refouler les larmes en regardant fixement le plafond du cinéma. L'impression, parfois, d'être au fond du trou. Le sentiment de l'inutilité et l'impatience dans les jambes."

    Ensemble, ils se sont lancés dans la musique. Ensemble, ils ont fondé le groupe Frontlight. Ensemble, ils ont recruté Max comme batteur. Ensemble, ils ont engagé Clara.

    Clara, la jeune fille qui les a séparés et qui a fait connaître à Benjamin les affres du premier amour non partagé.

    La venue du très célèbre critique de rock Franck Ménard (je lui ai reconnu quelques ressemblances avec Philippe Manoeuvre) permet à ses deux anciens amis de renouer et de donner une seconde chance à leur "carrière" musicale.

    Elle offre également la possibilité à Benjamin de se découvrir une vocation de parolier. Grâce au documentaliste de son établissement scolaire, il se lance dans l'écriture des chansons de leur groupe. Une façon d'exorciser sa non-idylle avec Clara et d'évoluer.

    J'ai vraiment apprécié cette histoire toute simple (peut-être que certains aspects de l'intrigue auraient mérité néanmoins d'être un peu plus fouillés). Mais qui évoque de façon tellement vraie l'amitié, l'amour, la difficulté d'avancer, de se lancer, d'oublier ses préjugés...Et qui se révèle aussi un bel hommage au rock.

    "L'écriture, ça n'a rien à voir avec la musique, finalement. L'essence de la musique, c'est le groupe, l'orchestre, la bande. L'essence de l'écriture, c'est l'inverse. C'est peut-être pour cela que l'une a besoin de l'autre."

    Bref, vous l'aurez compris: je vous recommande ce court roman qui parle si bien de l'état adolescent, des sentiments et de la musique. Je pense que je ne tarderai pas à ouvrir une autre œuvre de Jean-Philippe Blondel. Si vous avez des conseils, n'hésitez pas...

    Et pour conclure ce billet, je vous laisse un lien vers Because the night de Patti Smith. Un morceau que je ne verrai plus désormais de la même façon.


    Actes Sud Junior, 2011, 125 pages, 10 €