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des romans américains - Page 11

  • La Plantation de Leila Meacham

    La Plantation

    de

    Leila Meacham

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    "Sous le large bord de sa capeline, Elizabeth Toliver observait Silas, son fils cadet, qui depuis le porche, scrutait fébrilement l'allée bordée de chênes menant à la plantation familiale. En ce début d'octobre 1835, Elizabeth avait fort à faire dans la roseraie de sa vaste demeure. Armée d'un sécateur, elle taillait les Lancaster rouge qu'elle avait bien cru perdre..."

    Après s'être fait déshériter par son père, Silas Tolliver, qui rêve de diriger sa propre plantation, accepte de partir avec son ami Jeremy au Texas.

    Mais il a besoin d'argent pour entreprendre ce dangereux voyage et doit accepter le marché proposé par M. Wyndham, un riche propriétaire terrien. C'est ainsi qu'il rompt ses fiançailles et épouse Jessica Wyndham.

    Une décision contestée par sa famille. Sa mère lui prédit même:

    "Je vais te dire une chose, Silas William Toliver: si tu te maries selon les termes fixés par cet accord, tes terres du Texas seront maudites! Rien de bon ne peut sortir de ce qui est construit au prix d'un tel sacrifice, de l'égoïsme et de la cupidité."

    Ignorant cette malédiction, Silas part.

    Et c'est l'histoire de sa famille que nous allons suivre tout au long du 19ème siècle.

     

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    L'année dernière, même si je n'en avais pas parlé sur ce blog, j'avais vraiment bien aimé les Roses de Somerset. Aussi, j'ai été ravie quand j'ai reçu, dans le cadre des Lectrices 2014 des Editions Charleston, ce prequel imaginé par Leila Meacham.

    En effet, après avoir fini son premier roman, elle ne s'imaginait pas écrire la suite. Aussi, elle a plutôt suivi le conseil de son mari qui souhaitait savoir comment les Tolliver, Warwick et Dumont s'étaient installés au Texas.

    Je trouve que c'est une très bonne idée car le lecteur comprend mieux l'origine des roses et les rapports entre les différentes familles. Sans oublier la fameuse malédiction qui prend tout son sens.

    Mais La Plantation ne constitue pas seulement un roman "explicatif" des mystères qui pouvaient exister dans les Roses de Somerset.

    Cet ouvrage se révèle également une grande fresque. Sans jamais donner l'impression d'assister à un cours, il nous éclaire sur tout un pan de l'histoire américaine. On suit ainsi l'expédition de ces pionniers à la recherche de terres exploitables dans le Texas. Une expédition dangereuse (les Indiens rôdent et menacent les convois) pour arriver dans un endroit hostile où les Mexicains, les Américains et les Indiens s'affrontent encore.

    On découvre aussi le développement de cet Etat, la manière dont une ville naît et prend de l'ampleur, les codes sociaux en vigueur à l'époque, la vie pendant la Guerre de Sécession et les conséquences de cette dernière...

    De plus, la question de l'esclavage est longuement abordée. Si Jessica Wyndham a été mariée contre son gré à Silas, c'était pour la punir de son engagement en faveur des esclaves En effet, elle avait décidé d'aider une passeuse à cacher l'un d'entre eux et à favoriser sa fuite. Un crime découvert par son frère et sa milice. Malgré cette union forcée et ce départ pour le Texas, Jessica n'oublie jamais sa lutte et continue de traiter d'égal à égal les Noirs qu'elle côtoie. En ce sens, elle s'oppose à sa famille, son mari, ses voisins....

    J'ai beaucoup apprécié le personnage de Jessica. Sans conteste l'héroïne de cette saga. Une femme forte, aux idées arrêtées, capable de combattre pour ce qu'elle juge juste. Autour d'elle, gravitent plusieurs hommes: Silas, Jeremy, son fils, tous fascinés par son caractère et sa présence, et quelques femmes. Leurs points de vue s'enchaînent et permettent de mieux les connaître.

    Je les ai tous appréciés, même les plus antipathiques. Ils m'ont accompagné la semaine dernière et j'avais grand plaisir à les retrouver le soir.

    Amours, amitiés, trahisons, infidélités, combats, réussites, échecs, décès, secrets, révélations....peuplent toutes les pages de la Plantation. Sans jamais que cela paraisse exagéré, ce qui n'est pas toujours le cas dans ce genre littéraire.

    Bref, vous l'aurez compris: ce roman forme une très bonne saga, divertissante à lire.

    Editions Charleston, 2014, 525 pages, 22,50 €

     

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  • Belle Epoque de Elizabeth Ross

    Belle-Epoque

    de

    Elizabeth Ross

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    "Parfaite, tout simplement parfaite.

    Le petit bonhomme bedonnant me scrute sous tous les angles. Son gros ventre menace de faire sauter les boutons de son gilet. M. Durandeau, j'imagine, même s'il n'a pas eu la politesse de se présenter. Il tourne autour de moi tandis que je reste pétrifiée au milieu du salon. Un parfum indéfinissable flotte dans l'air"

    Après avoir entendu ses voisines parler de son futur mariage avec le boucher, Maude Pichon a décidé, à tout juste 16 ans, de fuir sa Bretagne natale. Récemment débarquée à Paris, elle peine à joindre les deux bouts. Jusqu'au jour où elle répond à l'annonce d'un certain M. Durandeau...

    Ce dernier a monté une agence qui propose un service unique à ses clientes: elles peuvent louer un repoussoir qui mettra leur beauté en valeur.

    Après quelques hésitations, Maude accepte ce travail et est engagée par la comtesse Duberne pour servir de faire-valoir à sa fille Isabelle.

    Mais tout se complique quand notre héroïne devient amie avec la jeune fille....

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    J'ai immédiatement été attirée par la superbe couverture de cet ouvrage. Aussi, quand il est arrivé à la médiathèque, je l'ai emprunté immédiatement et dévoré en deux jours.

    Il s'agit du premier roman d'Elizabeth Ross. Elle s'est inspirée des Repoussoirs, une nouvelle d'Emile Zola. Ce court récit narre "comment un individu nommé Durandeau fonde une agence de location de femmes laides qui vont servir de faire-valoir à des clientes issues de la bonne société." Une manière pour l'écrivain de dénoncer une "bourgeoisie qui ne s'embarrasse pas de scrupules, capable qu'elle est de faire de la laideur féminine une marchandise comme une autre".

    Dès les premières pages, on découvre la fameuse agence Durandeau. Après avoir été évaluée sur son physique par le directeur, Maude Pichon passe son premier "casting". Avec tous les autre faire-valoirs, elle se retrouve scrutée par une cliente potentielle. Et réussit à être engagée.

    Cette scène très forte a immédiatement retenu mon attention. On a l'impression que ces femmes choisies sur leur physique se voient retirer toute humanité et se transforment en bétail. Un bétail sélectionné selon des critères bien particuliers.

    Dans ces conditions, on ne peut que comprendre la réaction de Maude et son refus. Mais la vie pour une jeune femme, fraîchement débarquée de la province, se révèle difficile dans le Paris de 1889. Elle tente d'exercer d'autres professions (blanchisseuse..). Cependant, bien vite, elle doit se résoudre à accepter le poste qui lui est proposé. Comme toutes celles qui l'ont précédé...

    On lui confie la tâche de repoussoir auprès d'une jeune femme noble, Isabelle, qui vient de faire son entrée dans le monde et que sa mère espère voir fiancée avant la fin de la saison.

    Comme Maude, Isabelle refuse son destin.

    "Il y'a tout un monde au-delà de cette société brillante, un nouveau siècle pointe le bout de son nez. Mais pour moi, la vie se limitera éternellement à ça: une alliance avec un homme bien né"

    Ces deux héroïnes, ainsi que toutes les figures féminines qui gravitent autour d'elles, permettent à la romancière de dresser un portrait de la condition des femmes à la fin du 19ème siècle.

    Un tableau bien sombre car on se rend compte que chacune d'elles, peu importe sa position dans l'échelle sociale, se retrouve prisonnière. Prisonnière de son rang, prisonnière de son image, prisonnière de sa réputation...Et il faut beaucoup de courage pour se sortir de tous ces carcans.

    Mais Belle Epoque nous plonge également dans le Paris de 1889. On se promène dans les différents quartiers. On assiste aux bouleversements induits par l'Exposition universelle, à l'instar du chantier de la Tour Eiffel qui suscite tant de critiques...On fraye avec les artistes de Montparnasse (dont une certaine Suzanne Valadon)...

    De même, on découvre la bonne société, celle qui impressionnait tant notre héroïne quand elle était plus jeune. C'est là justement où le schéma narratif se révèle le plus efficace. Le "je" de Maude se fait évolutif au fil des pages. A la fascination et la naïveté des débuts (le premier bal, le premier opéra...) succèdent un certain désenchantement et une prise de conscience quand elle va au-delà des apparences.

    Cette problématique des apparences se trouve bien évidemment au cœur de l'intrigue. Chacun des protagonistes y apporte sa réponse...Et je trouve cette thématique particulièrement intéressante car elle se fait l'écho de ce qui se passe dans notre société contemporaine, où l'image se révèle primordiale.

    J'ai aussi apprécié le fait que je ne m'attendais pas à tous les rebondissements imaginés par Elizabeth Ross. Même si j'ai regretté la fin un peu trop rapide et certaines résolutions un peu trop simplistes.

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai vraiment passé un très agréable moment en compagnie de ce roman d'apprentissage bien documenté, doté de personnages attachants et d'une histoire originale.

    Robert Laffont, collection "R", 2013, 17,90 €

    Billet dans le cadre du challenge 19ème siècle

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  • A comme Aujourd'hui

    A comme Aujourd'hui

    de

    David Levithan

     

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    "Je me réveille.

    Aussitôt, je dois déterminer qui je suis. Et il n'est pas seulement question de mon corps-ouvrir les yeux et découvrir si la peau de mon bras est claire ou foncée, si mes cheveux sont longs ou courts, si je suis gros ou maigre, garçon ou fille, couvert de cicatrices ou lisse comme un bébé. S'adapter au physique, c'est finalement ce qu'il y a de plus facile quand on se réveille chaque matin dans un corps différent. Non, le véritable défi, c'est d'appréhender la vie, le contexte de ce corps

    Chaque jour, je suis quelqu'un d'autre. Je suis moi-même-je sais que je suis moi-même-, mais je suis aussi un autre.

    Et c'est comme ça depuis toujours."

    Tous les matins, depuis sa naissance, A. se réveille dans le corps d'un ou d'une adolescente de 16 ans. Une nouvelle identité qu'il va emprunter le temps d'une journée.

    A. a accepté ce destin extraordinaire. Et s'est même fixé quelques règles pour régir son existence: ne jamais s'attacher, ne jamais s'immiscer dans la vie de son hôte et ne jamais se faire remarquer.

    Mais tout ce code vole en éclats le jour où A rencontre Rihiannon...

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    J'aime beaucoup la maison d'édition Les Grandes personnes. Je leur dois notamment ma découverte de Mary Hooper ou de magnifiques albums en pop-up comme Drôles d'oiseaux de Philippe Ug.

    Aussi, quand ce roman est sorti en septembre, je n'ai pas tardé à l'acquérir pour la médiathèque où je travaille et à me plonger dedans.

    En effet, j'étais très attirée par l'idée de départ qui n'était pas sans me rappeler une série de mon enfance: Code Quantum.

    Mais, contrairement au docteur Samuel Beckett, A. expérimente, en général, une journée ordinaire pour son hôte. Tout au long du roman, nous le voyons ainsi habiter différents corps. L'occasion pour l'auteur de dresser le portrait d'une génération très contrastée d'adolescents américains. On croise ainsi le sosie de Beyoncé, une jeune fille suicidaire, un ado accro aux drogues, un joueur de football américain, un jeune homme obèse, une mineure contrainte d'effectuer illégalement des ménages....Certains sont en butte aux préjugés, d'autres au contraire jouissent d'une grande popularité.

    J'ai été vraiment très intéressée par cette incursion (plus ou moins approfondie selon les profils) dans la société américaine. David Levithan a su éviter l'écueil du trop plein de clichés. J'ai trouvé chaque tranche de vie juste et passionnante. De plus, j'avais hâte de découvrir à chaque chapitre la nouvelle identité de notre héros.

    A. a décidé de ne jamais influer sur le cours de l'existence de chacune des personnes qu'il incarne. Cependant, un matin, il endosse le rôle de Justin et rencontre Rihiannon, sa petite amie.

    "Que se passe-t-il au moment précis où l'on tombe amoureux? Comment un laps de temps aussi court peut-il contenir quelque chose d'aussi immense? [...] Le moment où l'on tombe amoureux semble puiser sa source des siècles, des générations en arrière-dans un passé qui s'aligne pour donner naissance à cette intersection précise, étonnante. Peu importe que cela puisse paraître ridicule, on sent au plus profond de soi que tout cela était écrit, que toutes les flèches invisibles pointaient dans cette direction, que l'univers préparait tout cela depuis l'éternité-et c'est seulement à cet instant que l'on s'en rend compte, en arrivant là où l'on était attendu depuis toujours"

    Les sentiments de A. vont le pousser à contrevenir au code qu'il s'était érigé. Il veut sans cesse revoir Rihiannon. Et révèle très vite à la jeune femme son destin.

    Mais comment débuter une histoire d'amour alors que chaque jour est un recommencement sous une nouvelle apparence? Telle est la question que tente de résoudre A.

    S'ensuivent des rendez-vous tour à tour réussis, éphémères, ratés, sublimes....Et un sentiment de frustration qui s'installe. Mais je ne vous en dirai pas plus afin de ne pas gâcher tous ces rebondissements.

    A cette problématique amoureuse, se superpose une autre éminemment morale. Est-ce que notre héros a le droit de changer le destin de ces hôtes? Peut-il même envisager d'envahir définitivement l'un d'entre eux?

    J'aimerais aussi parler du schéma narratif. Je l'ai trouvé très astucieux. Chaque chapitre correspond à une nouvelle personnalité. On ne peut donc s'empêcher de commencer le suivant afin de découvrir le sort quotidien qui attend A.

    De même, j'ai été sensible au style de David Levithan et aux nombreuses réflexions qui l'émaillent.

    "L'amour vous donne envie de réécrire le monde. Il vous donne envie de choisir les personnages, de construire le décor, de mener l'intrigue. Celui ou celle que vous aimez est assis en face de vous, et vous voulez alors tout faire ce qui est en votre pouvoir pour que l'amour soit possible, indéfiniment possible. Et lorsqu'il n y a que vous deux, seuls dans une pièce, vous pouvez vous imaginer que vous touchez enfin au but, ce jour-là, et pour toujours."

    Bref, vous l'aurez compris: un roman juste, sensible, émouvant. Un véritable hymne à l'amour que j'ai eu du mal à refermer.

    Editions les Grandes personnes, 2013, 373 pages