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des romans français - Page 15

  • Baronne Blixen de Dominique de Saint-Pern

    Baronne Blixen

    de

    Dominique de Saint-Pern

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    "Il existe un dieu pour veiller sur les légendes en perdition. Pour sauver les étoiles un peu oubliées. Un ange gardien capable de quitter la table du banquet où les dieux festoient. Il existe, sinon comment expliquer.

    Blixen. Karen Blixen. Ce nom n'évoque plus grand chose de nos jours. Pas davantage Isak Dinesen, son nom de plume. "Celui qui rit" en hébreu. Isak, la perpétuelle promise à un prix Nobel de littérature qui n'est jamais venu. Quant à la baronne Blixen...de son vivant déjà, ses jeunes compatriotes danois la croyaient morte. Sa vie et ses contes appartenaient à une époque périmée."

    Clara Svendsen a vécu plus de vingt ans en compagnie de Karen Blixen. Jusqu'à sa mort à l'automne 1962.

    En 1983, elle est contactée par la production d'Out of Africa. En effet, Meryl Streep qui doit incarner l'écrivain dans ce biopic souhaiterait en apprendre plus sur elle.

    "Qui la connaît mieux que vous?

    La connaître...Je l'ai vue, telle une bougie sur le point de brûler la dernière fibre de sa mèche, puis flamboyer à nouveau. Ou courbée par la souffrance, écrivant ses contes pour continuer d'avancer dans une nuit vivante. Je l'ai surprise à créer des romances avec des êtres de chair, brisant des couples pour en former d'autres avec les débris des premiers. Je l'ai connue tourbillon de foudre, cri de joie, incisive ou vulnérable, joyeuse, jamais la même, toujours poussée par son goût immodéré du jeu. Car elle jouait, comme les enfants dans leur toute-puissance s'inventent un monde malléable, comme les dieux s'amusent des mortels, à leur manière désinvolte et cruelle."

    Après quelques hésitations, Clara s'envole pour Nairobi. L'occasion de découvrir les lieux qui ont hanté Karen Blixen tout au long de son existence...L'occasion aussi de parler d'elle, son "Honorable Lionne"...

     

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    Quand j'avais 12 ans, je me souviens avoir pris par hasard une vidéocassette dans la collection de ma grand-mère. Le titre Out of Africa m'avait plu. Je me souviens l'avoir lancée. Je me souviens être restée scotchée devant pendant deux heures. Et une fois fini, avoir immédiatement ré-entamé le visionnage.

    On ne sait jamais quand on va tomber sous le charme d'un film. Et ce soir-là, la magie a opéré. Le pays, l'intrigue, Meryl Streep, Robert Redford, Mozart dans la nuit, un vol en avion...Autant d'ingrédients qui m'ont plu et qui continuent à me plaire quand je regarde de nouveau ce long métrage.

    J'ai tenté de lire ensuite La ferme africaine. Mais je n'ai jamais réussi à poursuivre l'ouvrage.  Avec cette sensation de passer à côté de quelque chose. Aussi, quand Baronne Blixen a été proposé dans la dernière Masse critique Babelio, je me suis dit que ce serait l'occasion d'en apprendre plus sur cette femme fascinante.

    Elle est née en 1885 dans une riche famille danoise. A 9 ans, son père se suicide par pendaison.

    Après avoir éprouvé une passion non réciproque pour son cousin, elle se marie avec son frère jumeau le baron Bror Blixen-von Finecke. Tous deux partent pour le Kenya où ils doivent gérer une plantation de café.

    Bien vite, cette affaire périclite. Tout comme le couple de Karen et de Bror. Karen ne pardonne pas à Bror ses infidélités à répétition et la syphilis qu'il lui a transmise. Tous deux se séparent.

     

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     Karen et Denys Finch-Hatton lors d'un safari

    Entrée en scène de Denys Finch-Hatton. Treize ans de passion. Et puis, la ruine. Et la mort qui frappe Denys en avion.

    Retour définitif de Karen au Danemark. A Copenhague, dans la maison familiale de Rungstedlund, elle se met à écrire sous le nom de plume d'Isak Dinesen. Succès fulgurant.

    Et début d'une nouvelle existence? Ou début du déclin plutôt? Loin de cette Afrique qui lui manque tant. Quelques fulgurances de vie cependant, lors de ses voyages aux États-Unis ou lors de ce "pacte" avec Thorkild Bjornvig.

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     La maison de Karen au Danemark

    Pour raconter ce destin extraordinaire, Dominique de Saint-Pern n'as pas choisi une structure linéaire. Au début, on suit Clara dans sa découverte de Nairobi et des anciens acteurs de la vie de Karen. Rencontres. Discussions. Et une vision de Karen toujours réinventée.

    Puis, lors d'une conversation de nuit avec Meryl Streep près de la maison refuge de Karen, Clara dévide le fil des souvenirs.

    Cette construction m'a semblé très intéressante. Non seulement elle dynamise le récit mais elle reflète plus le mécanisme de la mémoire et les méandres des réminiscences.

    Au fil des pages, nous faisons donc connaissance avec la baronne Blixen. Une femme fascinante qui a marqué tous ceux qui ont croisé son chemin. Une femme cruelle, aussi. Tyrannique. Manipulatrice. Possessive. Amoureuse. Passionnée. Volontaire. Têtue. Machiavélique.

    Je dois avouer que j'ai eu du mal à complètement adhérer à ce personnage. Autant j'ai ressenti de l'admiration pour cette noble danoise partie à l'aventure en Afrique et passionnément éprise d'un homme toujours en fuite, autant j'ai été choquée par son comportement à son retour au Danemark et sa façon de vampiriser tout son entourage. Et que dire de ce pacte avec le poète Thorkild?

    Bref, vous l'aurez compris: un portrait féminin hors norme, une vie habitée par un souffle romanesque...et un ouvrage qui se lit d'une traite tant on ne peut rester indifférents aux événements qui nous sont contés. Grâce à Baronne Blixen, j'ai d'ailleurs retrouvé l'envie de me plonger dans les œuvres d'Isak Dinesen.

    Un grand merci à Babelio et aux éditions Stock pour cet envoi!

    Stock, 2015, 429 pages

    Billet dans le cadre d'une lecture commune avec Fanny et du challenge Un pavé par mois de Bianca.

     

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  • Quel effet bizarre faites-vous sur mon cœur

    Quel effet bizarre faites-vous sur mon cœur

    de

    Christine Orban

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    "Enfin une lettre de toi, retenu à l'île d'Elbe. Comment est-ce possible? Je n'aurais jamais imaginé qu'un jour tu serais exilé et moi répudiée. Que de douleurs nous avons traversé pour en arriver là.

    On me connait mal, dis-tu dans ta lettre. Tu te prépares à substituer ta plume à l'épée, voilà presque une bonne nouvelle. Puisque nous devons être jugés, soyons-le pour ce que nous sommes. Moi, je n'ai pas de comptes à rendre à l'Histoire. A toi seulement. C'est pourquoi j'entreprends de t'écrire. De te raconter ma vie depuis de funeste dîner où tu décidas de la séparer de la tienne."

    Dans son château de la Malmaison, Joséphine décide de rédiger une longue lettre à l'adresse de celui qu'elle a tant aimé. Une lettre de déclaration certes. Mais aussi une lettre de justification sur ses erreurs passées.

    Cette longue confession débute par le moment tant redouté: celui du dîner avec l'Empereur où il annonce sa décision de se séparer d'elle. Une répudiation longtemps repoussée mais finalement, irrémédiable et qui plonge notre héroïne dans les affres du désespoir.

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    J'avais beaucoup aimé la plume et la sensibilité de Christine Orban dans la Mélancolie du dimanche. Aussi, j'étais très curieuse de découvrir ce qu'elle avait pu écrire sur ces deux personnages historiques célèbres.

    Dès les premières pages, on est happés par cette narration à la première personne. De la séparation à la rencontre, en passant par l'épisode avec le capitaine Charles, Josèphe-Rose (rebaptisée Joséphine par son illustre mari) dévide le fil de ses souvenirs.

    J'ai trouvé cette partie très intéressante. En effet, sans jamais sombrer dans l'écueil de la leçon d'histoire, l'auteur parvient, par petites touches, à nous parler des points les plus importants de la vie de cette femme.

    Par son biais, elle esquisse également le portrait d'un Napoléon intime: un homme profondément épris aux débuts de leur relation.

    "Je me réveille plein de toi. Ton portrait et l'enivrante soirée d'hier n'ont point laissé de repos à mes sens. Douce et incomparable Joséphine, quel effet bizarre faites-vous sur mon cœur." (Lettre d'octobre 1795)

    Un homme qui dort peu et qui mange avec un lance-pierre. Un homme qui travaille d'arrache-pied. Un homme qui consacre peu de temps aux siens, même s'il leur est profondément attaché.

    Avec cette confession, on suit également son destin hors normes, ses premières victoires, son accès au pouvoir, son sacre d'Empereur. Et, corrélativement son désir de pérenniser cette position qui le pousse à répudier sa femme stérile et à rechercher une nouvelle alliance.

    Ce roman, je l'ai dévoré. Car, comme je le disais précédemment, le "je" nous interpelle immédiatement. Et l'histoire et le style, à la fois sobre et émouvant, nous retiennent.

    Néanmoins, avec le recul, je dois avouer que, pendant toute ma lecture, j'ai été quelque peu gênée par la modernité de cette déclaration. A plusieurs reprises, je me suis demandée si le ton correspondait pleinement à celui qu'aurait pu employer cette souveraine ou s'il ne sonnait pas plutôt comme celui d'une femme de notre époque confrontée à l'échec douloureux de sa relation.

    Peut-être que ce bémol tient à mes connaissances préexistantes sur la vie de cette impératrice et sur l'image que je m'en étais faite...

    Peut-être qu'il provient aussi de mes souvenirs de la Mélancolie du dimanche dont je parlais plus haut et de l'impression d'une similarité dans le ton...

    Bref, vous l'aurez compris: malgré cette réserve sur la contemporanéité de la voix de la narratrice, ce roman épistolaire constitue un beau portrait de femme en souffrance et permet de découvrir la vie de Joséphine de Beauharnais.

    Albin Michel, 2014, 263 pages

     

     

     

  • Swing à Berlin

    Swing à Berlin

    de

    Christophe Lambert

    swing à Berlin.jpg

    "Berlin, 1936,

    Wilhelm Dussander terminait son solo au piano quand il vit les hommes en noir entrer dans le club. Ils étaient cinq, vêtus de gabardines, avec casquettes et chapeaux enfoncés jusqu'aux sourcils. Ils conversaient entre eux en inspectant les lieux du regard. Tous portaient le sinistre brassard de la SS."

    A Berlin, en 1936, certains membres du groupe de jazz, les Musician Harmonists, sont arrêtés en raison de leurs opinions politiques ou de leur judaïcité.

    Puis, l'action se déplace en 1942, toujours dans la capitale allemande. Afin de soutenir le moral de la population, Goebbels a décidé de diffuser de nouveaux programmes "qui feront la part belle aux "musiques de danse fortement rythmées" mais dans un esprit typiquement germanique".

    Pour accomplir cette mission, il recrute Wilhelm Dussander qui a jadis appartenu aux Musician Harmonists. Cet ancien jazzman se voit donc contraint de sillonner le pays entier à la recherche de jeunes talents susceptibles d'interpréter de "la musique de danse fortement rythmée".

    Mais, même s'il a toujours refusé de se mêler de politique, pourra t-'il conserver son indépendance et ne pas se laisser influencer par tout ce qu'il découvre, au fil des castings, des répétitions et des concerts?

     

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    Les Goldene Sieben

    J'avais entendu du bien de ce roman sur la blogosphère. De même, Claire, une de mes collègues, l'avait lu et beaucoup apprécié. Aussi, je n'ai pas hésité longtemps avant de me lancer et j'ai dévoré cet ouvrage.

    Pour l'écrire, Christophe Lambert s'est fortement documenté sur la période et s'est inspiré des Goebbels bands (tels que les Goldene Sieben) mais aussi de récits biographiques.

    J'ai été immédiatement bluffée par le prologue. Un groupe de jazz est en train de jouer dans un club et quelques SS entrent dans la salle et en bloquent les issues. On sent la tension monter parmi les musiciens, surtout que certains d'entre eux peuvent être menacés par ces soldats (en raison de leur religion ou de leur engagement politique). Malgré tout, comme si leur vie en dépendait, ils continuent leur morceau...Plus la peur les gagne, plus les fausses notes s'accumulent. Jusqu'à la fin et le début des affrontements. Un coup de feu est tiré et... fondu au noir. Le lecteur n'en saura pas plus sur le sort réservé aux Musician Harmonists.

    Après un bond dans le temps de six ans, on retrouve leur leader Wilhelm Dussander chargé d'une mission de formation d'un groupe de jazz (même si officiellement, le jazz est considéré comme de la musique "nègre", on lui demande de créer un groupe capable de jouer ce type de musique rebaptisée pour l'occasion). Accompagné d'un membre du parti, il sillonne ainsi le pays afin de dénicher de futurs talents.

    Une opération loin d'être facile, tant son niveau d'exigence est élevé. Ce qui engendre des difficultés avec son "censeur" (et quelques scènes très drôles)

    Finalement, quatre jeunes gens sont recrutés. Quatre profils différents: l'un vient de la rue, l'autre se révèle totalement embrigadé dans les jeunesses hitlériennes et fidèles aux idéaux aryens...

    Un peu à la manière du professeur du Cercle des poètes disparus, Wilhelm va les initier au jazz...Mais cette aventure pédagogique va forcément avoir des répercussions humaines. Petit à petit, ces jeunes gens s'ouvrent à une culture qu'ils ne connaissaient pas, se confient, se débarrassent de leurs préjugés, apprennent à réfléchir autrement, évoluent...

    De plus, leur changement rejaillit sur leur enseignant. Alors qu'il ne s'était encore engagé qu'une fois (et je vous laisse découvrir comment), il va se questionner sur son comportement citoyen.

    Et, alors qu'il considérait que la politique n'était pas l'affaire des musiciens, il va entrer progressivement en révolte. Révolte contre l'ordre établi. Révolte contre sa passivité. Révolte contre le sort réservé à ceux que les théories aryennes condamnent (les Juifs, les handicapés, les homosexuels...)

    Cette thématique de l'engagement de l'artiste et de l'entrée en résistance m'a vraiment passionnée.

    De même, j'ai beaucoup apprécié la description de l'Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale. A la suite des musiciens, on sillonne ce pays, on côtoie plusieurs cercles de la société, plusieurs écoles de pensée également... Des couloirs du Ministère de la Propagande à l'imprimerie de Sophie et Hans Scholl, il y a évidemment tout un monde que le lecteur est amené à observer. Cette radioscopie m'a rappelé celle dans Seul à Berlin d'Hans Fallada (un roman très fort que je vous recommande si vous ne le connaissez pas encore et que l'auteur Christophe Lambert évoque justement dans sa postface).

    J'aimerais également saluer l'écriture très cinématographique. Les scènes s'enchaînent, souvent fortes en émotions ou en tensions, et on est happés par le rythme. Et cette fin? Ah, cette fin, juste sublime, qui a failli me tirer quelques larmes...

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai été transportée par ce livre. Et je ne suis pas passée loin du coup de cœur (je crois que j'aurais aimé qu'il soit un tout petit peu plus long).

    Bayard Jeunesse, 2012, 274 pages

    En bonus, voici un extrait musical des Goldene Sieben.