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des romans français - Page 17

  • Les Croix de bois de Roland Dorgelès

    Les Croix de bois

    de

    Roland Dorgelès

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    "Les fleurs à cette époque de l'année, étaient déjà rares, pourtant on en avait trouvé pour décorer tous les fusils du renfort et la clique en tête entre deux haies muettes de curieux, le bataillon, fleuri comme un grand cimetière, avait traversé la ville à la débandade."

    Ainsi commence le roman Les Croix de Bois. Il tire son nom de toutes les croix, faites à la va-vite, que l'on pouvait trouver au-dessus des cadavres des soldats français et allemands.

    Rolend Dorgelès entend, avec cet ouvrage, rendre hommage à tous ces combattants de la Première Guerre mondiale. Et on le sent bien dès les premiers chapitres.

    En effet, on assiste à une succession de scènes toutes représentatives du front: l'arrivée des nouvelles recrues, la première nuit dans les tranchées, l'appel, les permissions....Autant de succédanés de ce que pouvait être la vie de ceux qui ont été appelés ou se sont engagés.

    A ces scènes de la vie quotidienne s'entremêlent des scènes de combat ou d'attente de l'ennemi.

    Des scènes qui nous parlent de l'absurdité des batailles et de la cacophonie des ordres.

    Des scènes qui nous disent tout de la peur des hommes et de la tristesse de voir leurs compagnons tomber.

    Des scènes inoubliables qui restent longtemps ancrées dans la mémoire et qui nous rappellent ce qu'a subi toute une génération.

    "Nous acceptons tout: les relèves sous la pluie, les nuits dans la boue, les jours sans pain, la fatigue surhumaine qui nous fait plus brutes que les bêtes, nous acceptons toutes les souffrances, mais laissez-nous vivre, rien que cela, vivre...Ou seulement le croire jusqu'au bout, espérer toujours, espérer quand même. Maintenant et à l'heure de notre mort, ainsi soit-il..."

    Adolescente, j'avais déjà lu ce roman mais je ne me souvenais pas de cette structure si particulière. Quand je l'ai repris pour cette lecture commune avec ma copinaute Céline, je dois avouer que j'ai été quelque peu désarçonnée par ce rythme et cette absence d'"intrigue".

    Puis, je me suis attachée à ce groupe de soldats, je me suis fondue dans leur bataillon, j'ai vécu leur quotidien, j'ai prié avec eux sur la colline...et je me suis laissée prendre par le style de Roland Dorgelès, par son humanité et par sa faculté à donner du souffle même aux situations les plus triviales.

    Ce qui donne encore plus de force à ce récit, c'est le sentiment de vécu qui se dégage de ces pages. On se rend bien compte que l'auteur a mis beaucoup de lui et de son expérience dans son œuvre.

    "Maintenant, on savoure la moindre joie, comme un dessert dont on est privé. Le bonheur est partout: c'est le gourbi où il ne pleut pas, une soupe bien chaude, la litière de paille sale où l'on se couche, l'histoire drôle qu'un copain raconte, une nuit sans corvée...[...] Pareil aux enfants pauvres, qui se construisent des palais avec des bouts de planche, le soldat fait du bonheur avec tout ce qui traîne."

    Ce sentiment de vécu amplifie d'ailleurs encore plus l'horreur de certaines séquences. Celle du tunnel creusé...Celle du soldat blessé qui appelle au secours et que tout le monde laisse mourir...Celle du cimetière...

    On ressort des Croix de Bois profondément choqués et émus. Avec la conviction de ce "plus jamais".

    Et je ne vous dis rien des pages finales qui prennent, au regard de l'histoire, une résonance particulière.

    Bref, vous l'aurez compris: je vous recommande vivement cette lecture.

    Le Livre de Poche, 288 pages, 5,10 €

    Billet dans le cadre d'une lecture commune avec Céline et du Challenge Première Guerre mondiale.

     

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  • La Ballade de Lila K. de Blandine Le Callet

    La Ballade de Lila K.

    de

    Blandine Le Callet

     

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    "Dans la vie, il y'a toujours un avant, un après, vous avez remarqué? Avec entre les deux, une cassure franche et nette, heureuse ou malheureuse-c'est une question de chance. Elle ne peut pas sourire à tout le monde, évidemment. Je suis sûre que personne n'y échappe."

    Pour Lila, la rupture s'est produite quand des hommes l'ont arrachée à sa mère et l'ont emmenée dans un centre pédagogique.

    Dans cette société futuriste de 2100 où chaque activité est encadrée, normée, épiée, elle a dû réapprendre les gestes du quotidien, le contact avec les autres...Elle a grandi, a été accompagnée par des tuteurs, est devenue savante...

    Mais elle n'a jamais oublié son objectif principal: celui de retrouver sa mère.

    Jusqu'au jour où...

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    De Blandine Le Callet, je connaissais Une pièce montée, un roman que j'avais découvert à sa sortie et beaucoup apprécié et le premier tome de la bande dessinée Médée. Mais je ne m'étais jamais lancée dans La Ballade de Lila K., malgré les très bons échos que j'en avais eus. Aussi, quand ma copinaute Bianca m'a proposé cette LC, je n'ai pas hésité longtemps avant de me lancer.

    J'ai commencé cet ouvrage hier soir et je l'ai achevé cet après-midi. Avec son style toujours aussi percutant, l'auteure m'a happée dans l'univers qu'elle a imaginé.

    Dans cette société de 2100, il existe une forte scission entre l'intra-muros et la Zone, divisée en de nombreux districts réputés dangereux.

    Dans cette société, chaque acte de la vie humaine est réglementé: le travail, la sexualité, la reproduction....

    Dans cette société, des caméras surveillent et enregistrent en permanence tout.

    Dans cette société, les livres sont perçus comme extrêmement dangereux. Les manipuler sans gants est réputé mortel et on tâche de les faire disparaître petit à petit pour les remplacer par des fichiers pour grammar books.

    Dans cette société, Lila, profondément asociale et marquée par la séparation avec sa mère, tente de trouver sa place. On la suit ainsi de 4 à 21 ans.

    Sur son chemin, elle croise plusieurs personnes: M. Kauffmann, Lucienne, Fernand, Justinien...et ce mystérieux "vous", destinataire de sa confession. Même si certaines rencontres vont se révéler plus déterminantes que d'autres, chacune va lui permettre de s'ancrer plus dans la vie et de se rapprocher des autres.

    "On passe sa vie à se construire des barrières au-delà desquelles on s'interdit d'aller: derrière, il y'a tous les monstres qu'on s'est créés. On les croit terribles, invincibles, mais ce n'est pas vrai. Dès qu'on trouve le courage de les affronter, ils se révèlent bien plus faibles qu'on les imaginait. Ils perdent consistance, s'évaporent peu à peu. Au point qu'on se demande, pour finir, s'ils existaient vraiment."

    Je me suis attachée à cette héroïne atypique, à son parcours hors du commun. J'ai aimé la voir évoluer, s'humaniser au contact de cette galerie de personnages secondaires réussis.

    J'ai attendu ses retrouvailles avec sa mère, émue de la force des sentiments qu'elle éprouvait toujours pour elle au bout de quinze ans. J'ai guetté les explications qui justifiaient leur isolement.

    Cependant, le destin de Lila n'a pas constitué le seul attrait de ce roman. En effet, je me suis particulièrement intéressée à la vie en 2100. Reprenant des thématiques chères aux œuvres de science-fiction, à l'instar de la surveillance des caméras ou de la dangerosité des livres (l'ombre de George Orwell et de Ray Bradbury n'était jamais loin), Blandine Le Callet a su créer un monde qui fait froid dans le dos.

    Surtout qu'il ne paraît pas improbable. Je ne sais pas si cela tient au fait qu'elle utilise des lieux que nous connaissons déjà: Paris, la banlieue, la BNF à Tolbiac ou qu'elle accentue des phénomènes déjà en cours (les livres papier scannés et détruits...).

    On sort de ces pages, un peu hagards et la tête pleine de réflexions sur le moyen d'éviter de telles dérives.

    On sort également de ces pages profondément émus par cette intrigue qui sait si bien parler d'amour, d'amitié, de pardon, d'espoir, de deuil...et de vie.

    "C'est cela sans doute, faire son deuil: accepter que le monde continue, inchangé, alors même qu'un être essentiel à sa marche en a été chassé. Accepter que les lignes restent droites et les couleurs intenses. Accepter l'évidence de sa propre survie."

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai adoré La Ballade de Lila K. Et je pense que cette lecture va continuer à m'accompagner pendant les prochains jours.

     

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    Le Livre de Poche, 2012, 354 pages, 7,10 €

    Billet dans le cadre d'une lecture commune avec Bianca et Yuko

    Et pour finir, je vous mets en bonus un lien vers Summertime, cette magnifique chanson qui joue un rôle si important dans les souvenirs de Lila.


  • Juste avant le bonheur d'Agnès Ledig

    Juste avant le bonheur

    de

    Agnès Ledig

    JUSTE_AVANT_LE_BONHEUR.jpg

    "Elle en a vu d'autres, Julie.

    Elle aurait pu s'opposer, prendre le risque, perdre son travail, mais garder sa dignité.

    Quelle dignité?

    Ça fait belle lurette que ce bout de femme l'a perdue. Quand c'est une question de survie, on range au placard les grands idéaux qu'on s'était fabriqués gamine. Et on encaisse, on se tait, on laisse dire, on subit.

    Et puis, elle a besoin de ce boulot. Vraiment. Ce connard de Chasson le sait. Directeur sans scrupules, capable de virer une caissière pour une erreur de dix euros. Alors cinquante! "

    Julie, 20 ans, mère célibataire d'un enfant de trois ans peine à joindre chaque mois les deux bouts. Aussi, quand elle est accusée à tort d'avoir volé cinquante euros dans la caisse, elle fait le dos rond afin de ne pas perdre son poste.

    Mais elle ne peut empêcher une larme de couler quand elle tient la caisse et s'occupe d'un client pas comme les autres.

    En effet, elle ne le sait pas mais Paul, un homme d'affaires à la cinquantaine bien entamée et qui vient de se faire plaquer par sa femme, est ému par la tristesse de cette jeune femme.

    Il décide de l'inviter au restaurant et de fil en aiguille, il l'emmène en vacances avec son fils en Bretagne.

    Ce séjour va tout changer dans l'existence de ces trois vies brisées. Mais aucun d'eux n'imaginait ce qui les attendrait sur le chemin du retour...

     

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    Je n'avais jamais entendu parler de ce roman avant qu'une lectrice de la médiathèque ne m'en dise le plus grand bien et me pousse à m'y plonger.

    Juste avant le bonheur appartient à ce genre d'ouvrages simples mais qui provoquent une sensation de bien-être. Je l'apparente un peu aux œuvres de Lorraine Fouchet que j'ai eu l'occasion de découvrir l'année dernière: L'agence et la Mélodie des jours.

    Il s'agit d'un livre choral qui met en scène plusieurs personnages: Julie, Paul et Jérôme. Quand on fait la connaissance de ces trois héros, tous ont subi de grandes épreuves dans leur existence.

    Julie est tombée enceinte lors d'une soirée arrosée à 16 ans et s'est retrouvée à assumer toute seule son destin et celui de son fils Lulu. Les fins de mois sont toujours difficiles. Et Julie a depuis longtemps tiré un trait sur le Prince charmant.

    "Difficile d'en sortir, quand on y croit dur comme fer, aux jolis contes de fées. Un jour, on se réveille en prenant conscience que la vie n'est pas si idyllique que ces histoires veulent bien le faire croire"

    A l'inverse, Paul vient de se faire quitter par sa femme. Mais elle l'ennuyait et il est finalement assez satisfait de son sort. En revanche, il souhaiterait se réveiller de la torpeur où l'a plongé le décès de sa première épouse trente ans auparavant.

    Quant à Jérôme, le fils trentenaire de Paul, il souffre de ne pas avoir pu empêcher le suicide de sa conjointe trois mois auparavant.

    A priori, rien ne prédisposait Paul à rencontrer Julie. Mais un peu comme dans un conte de fées, tout s'est enchaîné pour les mettre face à face. Un peu comme dans un conte de fées aussi, Paul va se transformer en marraine bienfaitrice et emmener notre héroïne en vacances.

    Cette dernière, sorte de princesse cynique, va réveiller Paul et Jérôme à la vie.

    Cependant, comme dans tout conte de fées, après la parenthèse enchantée en Bretagne, les obstacles surgissent. Le roman bascule alors dans une tonalité plus grave, plus sombre...Néanmoins, subsistent toujours certaines lueurs d'espoir et l'apprentissage de Julie, Paul et Jérôme se poursuit. Avec comme unique horizon: le bonheur.

    "La vie est légère comme une plume quand le souffle qui la porte est animé d'amour et de tendresse, alors, je veux bien me délester de quelques plumes..."

    On tourne les pages. Et, tour à tour, on sourie, on rit, on est émus, on est bouleversés... Juste avant le bonheur nous touche profondément et nous rappelle l'importance de profiter de chaque instant.

    Certes, on pourrait faire des reproches à ce livre: la simplicité du style, le rapprochement parfois trop facile de certains des personnages....Mais je me suis demandée si justement ces défauts ne contribuaient pas en partie à son charme. Par exemple, le langage épuré, sans fioritures, confère une plus grande sincérité aux monologues de Julie & co.

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai passé un très bon moment en compagnie de ce roman aux allures de conte moderne dont les défauts n'entachent pas la grande humanité. Parfois, on est juste heureux de parcourir ce genre de livre qui fait du bien.

    Albin Michel, 2013, 342 pages, 19,50 €

    Billet dans le cadre d'une lecture commune avec Céline