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the frenchbooklover - Page 36

  • Le Secret du mari de Liane Moriarty

    Le Secret du mari

    de

    Liane Moriarty

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    "Pauvre, pauvre Pandore.  Zeus lui confie une mystérieuse jarre et l'envoie ici-bas pour épouser Epiméthée, un type passablement intelligent qu'elle n'a jamais vu de sa vie. Personne ne lui a dit de ne pas ouvrir la jarre. Bien évidemment, elle l'ouvre. De toute façon, elle n'a rien d'autre à faire. Comment pouvait-elle savoir que les maux les plus vils s'en échapperaient pour tourmenter l'humanité à jamais, et que seul l'espoir y resterait enfermé? Une étiquette de mise en garde, c'était trop demander?"

    Banlieue de Sydney, de nos jours: c'est un lundi pas comme les autres pour Cecilia. Alors qu'elle vaquait à ses occupations, selon une mécanique bien huilée, elle a trouvé dans le grenier une lettre de son mari John-Paul. Sur l'enveloppe, figure la mention: "A n'ouvrir qu'après ma mort". Forcément, telle une Pandore moderne, Cecilia n'a qu'une envie: décacheter la missive et savoir ce qu'elle contient. 

    Pour Rachel, ce lundi n'est pas comme les autres non plus: elle vient d'apprendre que son fils allait partir s'installer avec son épouse et leur enfant à New York pour une durée de deux ans. Cette nouvelle agit comme une sorte de cataclysme. Et réactive encore plus le sentiment de deuil de cette femme qui a perdu dans des circonstances tragiques sa fille. Personne n'a jamais compris qui l'avait étranglé et Rachel n'arrive pas à surmonter cette épreuve. Face au départ de son petit fils, son obsession concernant l'identité du meurtrier s'accroît et pourrait même avoir de désastreuses conséquences.

    Pour Tess, ce lundi n'est pas du tout comme les autres non plus. Depuis l'enfance, elle est proche de sa cousine Felicity. Elles ont tout partagé jusqu'à créer leur propre boîte avec Will, le mari de Tess. Cependant, tout vient de voler en éclats: Felicity et Will sont amoureux et veulent vivre leur passion au grand jour. Ne reste pour Tess qu'une solution: fuir avec son fils et partir s'installer chez sa mère, à Sydney.

    Trois femmes à un tournant de vie. Trois femmes qui vont vivre une semaine qui va tout changer et faire basculer leur destin.

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    Cela faisait longtemps que je voulais lire un roman de Liane Moriarty. Je me suis donc tournée pendant les vacances vers son premier. 

    J'ai immédiatement aimé cette atmosphère à la Desperate Housewives. Nos trois héroïnes évoluent dans une banlieue aisée de Sydney. Dans cet univers aseptisé, tout semble aller. Les mères emmènent leurs enfants à l'école, créent leurs costumes, se retrouvent entre elles pour boire des cafés, des verres de vin et participer à des réunions tupperware. Les drames ne sont pas légions dans cet endroit. Et les secrets restent dissimulés derrière les façades bien lisses. L'autrice démontre un vrai talent pour créer une ambiance et c'est là l'une des qualités principales de son livre.

    Malgré le titre de cet ouvrage, ce n'est pas la découverte du secret qui importe, c'est le poids de ce secret et ses conséquences. Dès le premier chapitre, on sait que Cecilia a une lettre porteuse d'un secret de son mari. Elle qui croyait que son union était des plus heureuses, la perspective de ce secret caché lui montre les béances de sa vie conjugale. Elle tente de comprendre la teneur de ce mystère mais ses hypothèses lui font du mal. Jusqu'à la révélation de ce secret et l'impact qu'il a.

    La psychologie des personnages se révèle fouillée, notamment en ce qui concerne Cecilia, Rachel et leur entourage. Un peu, comme les pièces d'un puzzle, chaque morceau de leur caractère, de leurs interactions s'assemble et une sorte de portrait de groupe s'esquisse. Un portrait sans cesse mouvant et dont l'équilibre peut se révéler fragile. 

    En revanche, je dois avouer que j'ai moins accroché au segment narratif concernant Tess. Autant les autres voix de cette chorale féminine m'ont plu, autant j'ai trouvé celle de Tess moins aboutie, moins intéressante. Je comprends l'intérêt de cette protagoniste quant à l'illustration d'une autre vision de la vie conjugale. Mais je regrette son traitement.

    Le Secret du mari appartient à ces œuvres qui nous font réfléchir sur la fragilité de nos existences et sur la façon dont nos destins peuvent basculer à tout moment.

    "Les mille autres chemins que nos vies auraient pu, et peut-être dû prendre, nous restent à jamais inconnus. C'est probablement pour le meilleur. Certains secrets sont faits pour demeurer secrets. Ce n'est pas Pandore qui vous dirait le contraire."

    Les références mythologiques et catholiques émaillent le récit. La plus évidente reste évidemment celle à Pandore. Tout de suite, avec ce préambule sur cette malheureuse humaine, nous dressons une comparaison entre elle et Cecilia. Néanmoins, une fois plusieurs chapitres clos, on se rend bien compte que nos trois héroïnes sont chacune à leur façon des Pandore en puissance. Est-ce que l'espoir leur reviendra devient d'ailleurs une question sous jacente dans l'esprit du lecteur.

    Quant à la dimension catholique, elle apparaît dans le choix de l'établissement fréquenté par les enfants de Cecilia, de Tess et par Rachel comme secrétaire. Mais elle est aussi visible dans le choix de la semaine pour situer l'action. Il s'agit de celle de Pâques. Comme si les secrets devaient éclater pour mieux renaître. Comme si, à l'instar du Christ, il fallait expier ses péchés pour en quelque sorte "ressusciter".

    Bref, comme vous l'avez sans doute perçu à la lecture de ce billet, j'ai apprécié ce premier roman pour son ambiance, son histoire, le choix de certaines péripéties et la psychologie des personnages. Mais j'ai regretté certains effets de style comme ses flash-forward pas toujours idéalement placés et je n'ai pas vu beaucoup d'intérêt dans l'arcane narrative concernant Tess.

    Le Livre de Poche, 2015, 499 pages

    Billet dans le cadre du challenge de Bianca Un pavé par mois

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  • La Vallée des poupées de Jacqueline Susann

    La Vallée des poupées

    de

    Jacqueline Susann

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    "Septembre 1945,

    La température frisait les trente-trois degrés le jour de son arrivée. New-York fumait, tel un furieux animal de béton piégé par une vague de chaleur hors saison. Cette étuve ne la gênait pas davantage que les détritus qui jonchaient le champ de foire dénommé Times Square. Pour elle, New York était la ville la plus exaltante au monde."

    Septembre 1945, Anne Wells, une jeune femme de 20 ans, arpente pour la première fois les rues de New York. Elle vient de s'échapper de Lawrenceville, dans le Massachussets, et du destin tout tracé qui l'attendait là-bas. Très vite, elle trouve une place de secrétaire auprès d' Henry Bellamy, un avocat spécialisé dans le théâtre. Par son biais, elle fait la connaissance de Jennifer North. Cette dernière est réputée pour sa plastique de rêve et pour ses aventures amoureuses fracassantes. Mais elle entend acquérir désormais sa notoriété sur la scène de Broadway.

    Tout comme Neely, la colocataire d'Anne. Une jeune fille de 17 ans qui a déjà pas mal écumé les routes américaines pour présenter son show les Gringos et qui rêve de percer dans l'industrie du spectacle.

    Pendant plus de vingt ans, nous allons suivre le destin de ces trois amies et le prix que chacune va payer pour réaliser ses rêves.

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    Ce livre m'a été conseillé par mes amies Emjy et Martine, lors d'une de nos nombreuses pérégrinations en librairie. Il a attendu plus d'un an sur mes étagères avant que je me décide à l'emmener lors de mes vacances provençales. Je l'ai dévoré là-bas entre deux promenades et deux baignades.

    Il retrace le parcours de trois jeunes femmes. Anne Welles entend se démarquer du modèle qu'on lui a inculqué depuis sa plus tendre enfance. Le modèle d'une femme qui s'épanouit dans un mariage de raison, entre ses enfants et son "home sweet home". Contrairement à sa mère, elle veut être indépendante et épouser par amour l'homme de son choix. C'est pour cette raison qu'elle part à New York.

    Neely nourrit d'autres espoirs. Cette jeune fille veut devenir une star. Même si elle ignore encore comment elle va pouvoir gravir les marches vers la gloire.

    Il en va de même pour Jennifer, la plus âgée des trois et la plus expérimentée en matière de relations masculines. Elle cherche à s'émanciper de l'image fatale qu'elle véhicule et réussir dans le milieu artistique pourrait l'aider à montrer qu'elle n'est pas seulement un corps.

    Derrière ces trois ambitions, se juxtapose une autre, plus intime: celle d'être aimée. Mais dans la vallée des poupées, est-ce vraiment possible?

    Pour nous narrer le sort de ses trois protagonistes, Jacqueline Susann a recouru à une structure chorale. Ainsi, les voix d'Anne, Jennifer et Neely se font entendre pendant ces vingt années charnières de leur existence. Une manière de mieux les comprendre chacune et de mieux cerner leurs interactions.

    La Vallée des poupées, c'est le roman des illusions perdues. Tout est d'ailleurs dit dans ce titre. Les poupées, on pourrait penser que ce sont ces comédiennes aspirantes. Mais ce sont plutôt les pilules: pour maigrir, pour mettre à distance, pour dormir...C'est ainsi qu'on les appelait dans les années 1960 à Hollywood. Ces pilules vont apparaître au fil des pages. Comme des miroirs de l'état d'Anne, Jennifer et Neely. A la fois libératrices car elles permettent l'oubli. Néanmoins, aussi castratrices car elles rajoutent un carcan supplémentaire à la liste de ceux qu'elles doivent déjà supporter.

    De même, la Vallée des Poupées constitue une formidable plongée dans les coulisses de Broadway ou des studios d'Hollywood, où se font et se défont en un instant tant de carrières. Les trois femmes sont confrontées à ce décor, chacune par un prisme différent, qui peut d'ailleurs évoluer. Jalousies, coups bas, critiques, contrats asservissants, tromperies, drogues...: rien ne nous est épargné. L'autrice a elle-même connu une carrière d'actrice. Ce qui confère encore plus d'authenticité à son propos. On peut se demander dans quelle mesure elle ne s'est pas un peu représentée dans ses héroïnes ou dans quelle mesure elle ne s'est pas inspirée de ses comparses. J'ai notamment pensé à Marilyn Monroe pour Jennifer North.

    La Vallée des poupées démontre tout le talent de Jacqueline Susann. Talent pour dépeindre l'univers du spectacle. Talent pour créer des protagonistes tour à tour attachants, sensibles, cruels, cyniques, perdus, détestables. Chacun d'entre eux, même les "seconds rôles" tels que l'attentif Henry ou le fascinant Lyon Burke, est très bien campé et nous accompagne longtemps, une fois les pages refermées. Talent également pour jouer avec nos nerfs et nos espoirs, un peu comme si nous étions parfois Anne, Jennifer ou Neely. Talent enfin pour écrire des scènes saisissantes (l'hôpital psychiatrique, les répétitions du spectacles à Broadway, les dernières pages...)

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai été saisie par la modernité de ce texte, par la beauté et la cruauté de ses personnages, par la description du milieu théâtral et cinématographique....et j'ai quitté à regret Anne et les autres. Je ne peux donc que vous recommander la lecture de cette chronique douce-amère qui a été un véritable coup de cœur pour moi.

    Éditions 10/18, 2014, 478 pages

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  • Brexit Romance de Clémentine Beauvais

    Brexit Romance

    de

    Clémentine Beauvais

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    "Un mariage rend toujours heureux; et d'autant plus lorsqu'on peut y porter de jolis costumes, que l'on est amplement rémunéré pour l'occasion et que l'on sait que les voeux passionnément échangés se déferont aussitôt le rideau tombé."

    L'histoire commence en juillet 2017, soit un an après le vote des Anglais en faveur du Brexit, dans un Eurostar direction Londres. A son bord, la jeune soprano, Marguerite Fiorel, qui va tenir un rôle dans les Noces de Figaro. Elle est accompagnée de Pierre Kamenev, son professeur et ami.

    A peine arrivés, ces deux jeunes gens vont croiser la route de Justine et Matt Dodgson qui ont créé Brexit romance, une application secrète destinée à organiser des mariages blancs entre Français et Anglais pour obtenir le passeport européen. Ils vont également rencontrer Cosmo Carraway, un Lord anglais, qui ne va pas rester insensible au charme de Marguerite...

    Débute alors un chassé-croisé amoureux. Mais peut-on vraiment prévoir et encadrer les élans du cœur?

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    Depuis quelques années déjà, je suis avec beaucoup de bonheur le parcours de Clémentine Beauvais. En effet, je trouve qu'à chaque fois, cette autrice frappe fort et démontre à quel point elle peut nous surprendre et emmener ses lecteurs sur des terrains toujours inconnus et renouvelés. J'avais été notamment bluffée par Songe à la douceur, sa magnifique retranscription moderne d'Eugène Onéguine et j'attendais donc avec beaucoup d'impatience son nouvel opus. Aussitôt reçu, aussitôt dévoré.

    Cette lecture m'a procuré un immense plaisir et ce, pour plusieurs raisons.

    Parce que je me suis profondément attachée aux personnages qui m'ont semblé tous justes et bien campés.

    Parce que j'ai apprécié la structure chorale qui nous permettait de les appréhender plus en profondeur.

    Parce que je me suis reconnue dans certaines des situations (notamment cet échange crucial de textos dans un train qui file vers le Nord).

    Parce que j'ai aimé le rythme insufflé à ce septuor amoureux qui m'a fait furieusement penser aux "screwball comedy", ces comédies de l'âge d'or du cinéma américain. Tout est mené de main de maître, tant au niveau de l'intrigue, de ses rebondissements, de ses quiproquos que des réparties. Certains dialogues témoignent d'un travail d'orfèvre, digne des plus grands.

    Parce que Clémentine Beauvais ne fait pas que des références au cinéma. Elle truffe également son texte d'hommages à la littérature  (la première phrase fait furieusement penser à du Jane Austen et j'ai trouvé parfois que Justine avait beaucoup de ressemblances avec son Emma), à l'opéra, au théâtre....

    Parce qu'elle a réussi à retranscrire la barrière linguistique et la difficulté de se comprendre quand on n'a pas la même langue maternelle. Cette fameuse "barrière" donne d'ailleurs lieu à de nombreux malentendus et à certains dialogues fort cocasses.

    Parce que cet ouvrage propose également, derrière sa légèreté apparente, une radioscopie de la société anglaise à l'ère du Brexit. De même, il nous plonge pendant un certain moment dans l'univers de l'extrême-droite anglaise et nous fait réfléchir sur la montée de ces mouvements partout en Europe. Il nous rappelle  ainsi de sombres pages du passé et la possibilité d'une éventuelle répétition (comment ne pas voir de similitudes avec la position de certains Lords à l'orée de la Seconde Guerre mondiale?).

    Parce que j'ai ri, souri, espéré, tremblé...

    Parce que je n'avais pas envie de lâcher ces personnages et que ce roman, je l'ai quasiment lu d'une traite

    Parce que j'attends désormais avec impatience le prochain Clémentine Beauvais et que je me demande quel défi elle va encore relever

    Bref, vous l'aurez compris: pour toutes ces raisons, je vous recommande de vous plonger à votre tour dans ce roman et j'espère que vous serez aussi conquis que moi.

    Merci aux éditions Sarbacane pour cette très belle lecture!

    Sarbacane, 2018, 449 pages